Quelques mois après son concert à la Bellevilloise pour le festival Aurores Montréal, on retrouve Elisapie à la Boule Noire avec tout son groupe. Comme nous l’avait raconté Emilie, le premier contact avec la chanteuse est un poil déstabilisant, elle parle Inuit et semble heureuse de nous faire découvrir sa langue même si on ne comprend pas... sauf qu’il y a aussi chez elle ce besoin de communiquer en dehors des chansons, de nous expliquer ses combats, son histoir. Elle finit donc par basculer vers l’anglais et se détend aussi progressivement tandis que le public lui est de plus en plus chaud et lui montre bien qu’il est venu pour elle et qu’il connait sa musique.
On avait été impressionné par l’album, au point de pousser les autres matelots du Cargo ! à chroniquer, interviewer, photographier cette artiste originale mais on est encore plus bluffé maintenant qu’on a l’occasion de la voir sur scène de nos propres yeux : c’est tout aussi beau et sophistiqué que sur disque mais on a en plus une présence charismatique, une chanteuse taillée pour la scène qui l’occupe complètement, capable de montrer son émotivité comme sa force.
Et puis il y a ce groupe très bien choisi : un batteur capable de s’effacer quand il faut et de dynamiter les crescendos et des plages instrumentales que les musiciens prennent plaisir à faire durer, tout comme nous), un bassiste qui joue de la Bass VI et des claviers et surtout "monsieur Joe Grass, qu’on ne connaissait pas, mais une des vidéos de lui en solo s’intitule "le maître des cordes". Et c’est tout à fait ça : sur sa vieille quart-de-caisse électrique dont une bonne partie du vernis a été arraché par le temps, il fait des choses incroyables. Avec ses doigts et beaucoup de feeling, tout en douceur ou en mode très rock pour faire rugir l’instrument mais aussi avec diverses ustensiles, le classique archet mais aussi une éponge avec un petit canard jaune et d’autres gadgets.
C’est un peu l’opposé du concert de Lucy Rose, un très beau live, mais on regrettait un tout petit peu que les musiciens soient finalement des "accompagnateurs", ponctuant le set de temps à autre, ici on a une musicienne qui pourrait être déjà géniale en solo, qui est déjà géniale mais en plus elle est en osmose avec des musiciens talentueux qui ont toute latitude pour s’exprimer, le résultat est un concert passionnant, surprenant qui offre une nouvelle gamme de plaisirs, différents et complémentaires de son très beau disque