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publié par Philippe Ache le 09/08/18
Pauline Drand
- Faits bleus
Faits bleus

Je suis le parcours de Pauline Drand depuis plus de cinq ans. A peine éclose des Oliver Peel sessions, elle surprenait déjà par sa prolificité artistique et sa capacité à combiner folk et chanson française.

En 2015, sortait un double EP de 8 titres d’une lumineuse mélancolie et un EP de 4 titres I see Beauty, moment de folk pur composé par Pauline sur des poèmes posthumes de Karen Dalton.

Transmuter le noir en bleu, parler d’amour

Les petites filles se rêvent princesses, plus rarement sorcières. Visiblement les deux personnages coexistent chez Pauline. Ce n’est pas la petite princesse du folk qui me captive (elle correspond d’ailleurs bien mal à cette image), mais plutôt la jeune femme, qui du noir de l’existence, sait tirer la substance dont elle fera des titres bleus, des morceaux paisibles, calmes, voluptueux. Il y a quelques années à la Bellevilloise, Pauline reprenait quelques titres chantés par Nico. Lors de ses derniers passages sur scène en 1986, Nico chantait le désespoir, Nico chantait la mort ; à l’image de Soulages elle représentait l’extra-noir.

L’espoir est à mon sens ce qui différencie, les deux artistes. Pauline chante la vie, Pauline chante l’amour ; j’entends dans les ellipses d’« Aéroport », « Soupirs », « Soleil Noir », « L’aile et l’eau », « Faits Bleus », « Les vaincus », « Les roses », différentes visions du sentiment amoureux. Par sa langue, son style, sa voix, elle incarne tour à tour les amours déçues, les amours débutantes, les amours fanées, les amours charnelles. L’amour n’y est pas rose, il est bleu. Cependant, de toutes ces visions, j’aime retenir celle de « Soupirs » : « Je n’ai plus que l’amour/Et c’est déjà beaucoup. »

Les textes et la mélodie de « Ma pareille », un déjà classique et mon titre fétiche sont signés Lo Brifo. « Ma pareille » n’est pas le seul cadeau fait à Pauline. Lo a collaboré avec elle sur chacun de ses disques dont il est d’ailleurs producteur et a su l’accompagner dans l’affirmation de son style et l’enrichissement de son univers musical. Je garde un souvenir ému d’une 1ère partie de Maissiat au Carreau du temple ; j’aurais adoré qu’ils se présentent au public comme les « Paulines Drand ».

S’émanciper du Folk et sublimer le genre

Le Folk n’est pas mon genre de prédilection, mais il me semble obéir à des standards assez précis, reposant sur une trame guitare/voix. Si « I see beauty » est l’exemple d’un vrai disque de folk, le double EP qui l’avait précédé s’écartait déjà des chemins balisés.

Faits Bleus confirme cette tendance. Si le folk originel reste l’ossature de l’album, certains titres se voient enrichis de somptueux arrangements de cordes (peut-être un poil trop classiques à mon goût). D’autres nous surprennent d’avantage : ainsi le dialogue Pauline/Pauline sur « L’aile et l’eau » et son entêtante mélodie ; le piano sur lequel repose le mélancolique « Porte d’Italie » ; le très jazzy et très entêtant « Gangsters (1&2) » et son irrésistible pont.

Faits Bleus m’apparaît comme la parfaite conclusion d’une époque. En 1992, après trois albums d’une belle homogénéité, Suzanne Vega sortait 99.9F°, un album où elle se renouvelait en grande partie. Puisse Pauline sortir un jour son 99.9F°.

Mais je souhaite d’abord bon vent à Faits Bleus. C’est pour moi le Solitude Standing de Pauline Drand : un grand et bel album !

Faits bleus sortira le 13 août – un lundi avec des airs de vendredi.

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publié par le 09/08/18