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publié par Mickaël Adamadorassy le 20/11/19
Tamino - L'Olympia, Paris - 19/11/2019

Alors que Tamino émerge peu à peu de l’épaisse brume crachée par les machines à fumée, sous les acclamations d’un Olympia archi-complet, et entame "Intervals", prenons deux secondes pour regarder le chemin parcouru par ce jeune belge de 22 ans. Son premier single, "Habibi" sort en 2016, son premier album, Amir, en 2018, lui n’a fait aucune télé-réalité, n’est pas acteur à succès, "fils de" ou youtuber, ses affiches ne sont pas placardées partout dans le métro et pourtant il remplit déjà peut-être pas la plus grande mais certainement la plus prestigieuse salle parisienne.

Il y a de quoi être impressionné... mais Tamino du haut de son mètre 98 n’a pas que la stature d’un géant , il a aussi pour lui le charisme, les compositions envoûtantes entre musique orientale classique et pop-rock occidentale moderne et puis ces fameuses quatre octaves de tessiture qu’il utilise très bien, que ce soit un grave/medium sombre et envoûtant qui constitue la base de son chant, souvent complimenté par le son tout aussi profond d’une Jazzmaster bariton, ou des aigus impressionnants mais jamais démonstratifs.

C’est notre deuxième concert de lui sur cette tournée, après une Cigale absolument magnifique dont quelques titres figurent d’ailleurs en bonus de l’édition augmentée de l’album, où le public lui avait réservé un accueil plus qu’enthousiaste.

Ce soit en plus des deux talentueux musiciens qui l’accompagnent habituellement, Vik Hardy aux claviers et Ruben Vanhoutte à la batterie et parfois au chant, il y deux invités exceptionnels ce soir : Tarek Alsayed au oud et Houssem Ben El Kadhi au ney (flûte) qui apportent une touche orientale à certains titres (ce qui offre au toujours très attendu "Habibi" un très joli solo d’introduction). Le set alterne entre morceaux dépouillés en solo essentiellement portés par la voix, titres en groupe parfois d’influence orientale, parfois plus pop-rock pointue à la Radiohead pré Kid A (avec d’ailleurs toujours la présence de Colin Greenwood à la basse). Les ambiances sont toujours aussi sombres, mélancoliques surtout en solo (le très joli "Persephone" en début de concert), tandis qu’avec le groupe on rajoute de l’impact et de la pêche, une alternance transe/énergie très réussie ("Cigar"), quand les touches orientales sont présentes, on est plutôt dans le domaine onirique, l’évasion vers un désert de cinéma et de mystères. Jouée à mi-concert "So it goes" fait un peu la synthèse de tout ça et sera certainement le moment le plus fort du concert : une longue plage musicale où tous les musiciens ont l’occasion d’exceller, que ce soit la section rythmique, les cordes orientales, la beauté de la flûte et du oud, les vocalises dans les aigus de Tamino, c’est un long trip qui monte en puissance, se casse brusquement, repart encore plus fort, lancinant, hypnotique, magique.

Tout cela nous donne une bonne heure de concert où tout s’enchaîne parfaitement et plutôt rapidement : contrairement à la Cigale le chanteur parlera peu. Par contre musicalement on sent le groupe encore plus rôdé et la prestation sera donc irréprochable de bout en bout. En fait, la seule chose qui était moins bien c’est peut-être le public : ultra-respectueux et attentif ce qu’on apprécie mais en même temps il n’y avait pas la même impression de chaleur qu’à la Cigale, les longues ovations enthousiastes répétées qui avait fini de détendre complètement Tamino. Mais bon loin de nous l’idée de reprocher aux gens de savourer discrètement un tel spectacle plutôt que de "clapper".

Autre petit pinaillage : le concert finit très haut avec un "Habibi" parfaitement exécuté, les trois titres du rappel paraissent un peu ternes en comparaison, même le tout dernier "Smile" qui possède bien des moments très pêchus où le batteur a l’occasion de se lâcher. On serait curieux de voir si pour une fois en faisant le truc attendu, appuyer sur une pédale de distorsion et envoyer du gros gros son, ça ne marcherait pas mieux que ce que Tamino fait actuellement : gratter les accords plus forts en son clair, ce qui n’est pas franchement plus beau ni plus puissant. Mais bon on est vraiment dans le détail, on pinaille parce qu’on a la chance d’avoir un point de comparaison, après un concert comme ça on est surtout heureux et inspiré par les belles choses qu’on a eu la chance d’entendre et de voir une deuxième fois sur cette tournée.

Vous pouvez voir l’intégralité du concert grâce à Arte jusqu’au 18/05/2020 :

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