Contrairement je pense à mes petits camarades du cargo, j’en étais resté en 1997 et au premier disque de Dolly (et quel disque). J’avais bien du écouter leur second album sans plus accrocher et le temps s’était chargé du reste. 20 ans après (! !!), c’est l’annonce d’un album alternatif de Manu (ex-chanteuse de Dolly donc, suivez un peu) qui réveille ma curiosité au printemps 2018. Et comme souvent dans ces cas-là, alignement des astres aidant, voilà que je tombe début juillet sur le premier album de Manu, Rendez-vous (2008), à la médiathèque de Melun (ça ne s’invente pas, jolie médiathèque qui se laisse un peu aller côté musique mais qui sait être là aux moments décisifs). Une pochette sympathique pour bien fixer l’attention et c’est parti. C’était il y a 4 semaines* (je suis en retard, il faut que je le rende) et je l’écoute toujours au moins une fois par jour sous peine de manque certain. Lui se porte à merveille, s’acclimatant sous toutes latitudes (qu’il a détrôné de ma playlist quotidienne) de Mumbai-sous-mousson au Verdon-sur-canicule. Mais qu’a-t-il donc, avec 10 ans de décalage, de plus que les autres ?
cap
Déjà il commence en douceur dans l’ "Allée des tilleuls" et on se sent tout de suite bien dans cette voix reconnaissable entre toutes. Une voix un peu éraillée, un peu espiègle, avec toujours cette présence extrêmement forte. Et puis cela enchaîne avec deux tubes en puissance : "Tes cicatrices", du genre à te faire chanter à tue-tête sous la douche ou en faisant la vaisselle, et "Oh my friends" au riffs plus lourds mais aux atouts head-bangueurs indéniables. Et si le trio de morceaux chocs permet de démarrer idéalement ce disque, la suite maintient le cap et le niveau comme il faut en explorant les genres (tout en restant globalement très rock) que ce soit dans les accents western-survolté de "Cow-boy", dans l’héritage Dollyesque de "Sur mes lèvres", dans la fragilité de "Dis-moi un secret" ou même dans l’humour de "T’es bô, t’es con". Manu sait tout faire avec toujours l’intonation juste au niveau du chant, c’est suffisamment rare pour être relevé.
ton
La seule chanson qui détone un peu dans cet univers au final est "Suteki Ni", chantée en japonais. Apparemment Manu a même étendu le concept à un mini-album entier en japonais (qu’on n’a pas écouté, la médiathèque de Melun a ses limites). Il est clair que ce n’est pas notre morceau préféré mais on salue la tentative. Et c’est l’occasion d’évoquer un autre point important déjà à l’époque de Dolly (chez qui on avait un peu plus de mal avec les morceaux en anglais) et qui va main dans la main avec l’intonation dont on parlait plus haut, il s’agit bien sûr de l’intention. Et l’intention de Manu marche tellement bien en français que c’en est troublant. Peu de groupes rock français ont finalement su faire sonner le français comme ça avec toutes les couleurs que la langue mérite, avec des voix qui s’étalent sur toute la palette des émotions et une subtilité bienvenue. Subtilité qu’on retrouve en fin de disque dans "Good-bye" et "Rendez-vous", deux morceaux aussi forts dans la demi-teinte que les premiers morceaux le sont dans le rentre-dedans. Sans pathos, ni mièvrerie et le ton juste en prime.
vol
Et c’est sans grande surprise qu’on retrouve deux morceaux emblématiques de ce disque sur le nouvel album de Manu, Entre deux eaux (vol.1), sorti cette année. Un album à part puisqu’il s’agit de revisiter des morceaux de Dolly (un fantastique "Je n’veux pas rester sage" à l’appui), de Manu, ainsi que des reprises, le tout à la sauce acoustico-intimiste d’un trio guitare/harpe/violoncelle. Si vous souhaitez un aperçu, nous ne pouvons que vous conseiller très fortement la session cargo #948 publiée en juillet. Quant à nous, on a encore deux albums à découvrir (La dernière étoile -2013- et La vérité -2015-), on s’en réjouit d’avance.
* en cargotime, n’hésitez pas à tripler les chiffres …