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publié par Natalia Algaba le 21/03/19
John J Presley
- As the Night Draws In
As the Night Draws In

En écoutant son premier album As the Night Draws In, on a tout de suite dans la tête l’image d’un bluesman américain, pur produit du terroir et de générations de six-cordistes torturés. Et bien non John J Presley a grandi dans les West Midlands, en Angleterre, et a passé les dernières années à Londres et surtout à Brighton. A 32 ans, le songwriter ne vient pas de débarquer dans la musique, il avait déjà sorti un EP solo de cinq titres en 2015, « White Ink », et son premier album, nous dit-il, est une collection de titres composés pendant ces dix dernières années où il montre les différents aspects de sa musique : « des riffs puissants de guitare mélangés à de la tendresse et la clarté ». « Cet album », poursuit-il, « est un reflet de mes frustrations et anxiétés mais on y trouve également une lueur de lumière. C’est le travail le plus profond et le plus complet que j’ai fait à ce jour ».

En effet, pendant 40 minutes, à travers les 14 titres du disque, John J Presley joue savamment avec les ambiances et les approches sonores. Il excelle dans le rock ténébreux et énergique, porté par des riffs de guitare rageurs. Le résultat pourrait être "juste" captivant pour la qualité de l’écriture musicale mais en plus il a "le" son, le graal des guitaristes : une distorsion à la fois massive, puissante mais qui coule aussi comme du miel dans vos oreilles. C’est le son d’un vieil ampli à lampes comme le Selmer qu’il utilise en live qu’on pousse dans ses derniers retranchements qu’on entend sur « Left » ou « Rise and Fall ». A l’autre bout du spectre, l’héritage blues parle et on trouve des titres plus apaisés, des tempi lents, où sa voix grave et profonde nous fait frémir comme dans le morceau qui ouvre l’album, « The Fear », qui installe une atmosphère oppressante avec la répétition de la phrase qui donne son titre à l’album « As the night draws in ».

L’album alterne ainsi entre titres lancinants qui nous emportent avec eux dans un univers sombre, hanté ou planer dans un ciel sombre à la lisière de l’orage (« True Love Waits ») et d’autres plus rock, construits autour de la voix et la guitare , des chansons qui relèvent plus d’un "effort de groupe" : leRhodes et surtout l’harmonium de Danielle Presley (sa claviériste qui est devenue sa femme) et une batterie solide viennent appuyer des montées explosives façon rock très noisy (« Right and high »). Dans l’hypnotique « The Fault » et dans « Exhale and Go », d’une voix caverneuse et menaçante, John récite plus qu’il ne chante. Et d’autres morceaux plus inattendus comme l’instrumental « Cold Water » nous rappellent qu’on est face à un artiste complexe, qu’on ne saurait réduire aux genres musicaux cités ci-dessus

John J Presley a fait le pari d’un blues moderne, expérimental, gothique et sauvage, qui dépasse les limites du genre sans renier ses racines. Dans The Night Draws In, on trouve des arrangements orchestraux époustouflants, des parties de clarinette qui s’intègre bien dans l’univers et un son de guitare vintage unique qu’on adore. Son rock’n’blues est fantasmagorique, intense et troublant. Il en émane une beauté sombre qu’on retrouve dans les paroles inquiétantes où le compositeur confesse ses angoisses, se livre et se libère. Sa voix rauque pourrait nous faire penser à Nick Cave mais chacun a un univers et une personnalité bien différente. Il s’agit d’un album parfaitement orchestré où les silences et les pauses ont aussi un sens : elles permettent de décrire le silence assourdissant des paysages découvert lors d’un voyage dans le désert californien, dans la vallée de la Mort, qu’il essaye de reproduire dans le titre « Rider ». Les silences entre les titres nous permettent aussi de sortir d’un univers obsessionnel avant de rentrer dans un monde libérateur, comme dans l’autre instrumental du disque, « And with the Last Laugh I am Victorius ».

Pour finir on ne saurait trop vous conseiller d’aller voir ce musicien virtuose en concert si vous en avez l’occasion. Sa musique gagne encore à être entendue live. John défend extraordinairement bien ses titres et on a été séduit par son élégance toute britannique. Nous vous proposons aussi de découvrir John J Presley en acoustique pour une session live de trois titres qu’il nous a offert lors de son passage au Point Éphémère en février dernier.

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publié par le 21/03/19
Informations

Sortie : 2019
Label : NicaRecordings/AWAL

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