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publié par Mickaël Adamadorassy le 12/04/19
Ex:Re - Le Café de la Danse, Paris - 08/04/2019

On était chanceux en tant que parisien ce lundi soir, parmi les trois dates de Ex:Re annoncées pour l’instant figurait un Café de la Danse. Les deux autres, à Bruxelles et à Londres affichaient complet pour le projet solo de Elena Tonra (Daughter), un album sorti en toute fin d’année qui raconte une rupture déchirante et l’après sans aucun fard, c’est d’une sincérité absolue, brutale, c’est triste, émouvant, déchirant et tout simplement beau (on vous raconte tout ça en détail dans l’interview d’Elena). A Paris on est pas tout à fait complet mais on est bien serrés, la salle étant même reconfigurée avec moins de sièges que d’habitude pour avoir plus de places debout. Et pas moyen même en arrivant tôt d’avoir le premier rang face à Elena, un petit groupe de fans enthousiastes s’est placé là. Et ma foi tant mieux, ils ont un peu le même genre d’interactions que Aurora avec son public : il s’envoient des cœurs esquissés avec les mains et quand Elena dit quelque chose d’émouvant on entend des "ooooooooh" attendris. Bref il y a du monde, de l’ambiance, des anglais mais pas bourrés et une belle salle à l’acoustique adaptée, toutes les conditions étaient réunies pour un bon concert qui respecte la délicatesse et la palette d’émotions du disque.

Et justement, grosse prise de risque, Elena, pantalon noir et haut noir pailleté qui scintille au gré des éclairages, entame le concert toute seule avec sa fidèle Telecaster noire (qui va quand même se faire un peu insultée et le lui rendra bien..) en jouant le très dépouillé "My Heart" qui conclue l’album. Ça pourrait paraître étrange de jouer en album live qui raconte une histoire en commençant par la fin mais comme Elena nous l’expliquait en interview, il y a quelque chose de très cyclique dans le disque et peut être aussi qu’il était important dès le départ de se dire qu’on se place de toute façon dans l’après, un après où elle a trouvé une forme de paix avec elle-même et ce qu’elle ressent, ce que dit texto cette chanson qui est presque plus une déclaration qu’une chanson. L’accompagnement est tout simple et tout passe dans le texte, dans les émotions qu’Elena parvient à y insuffler. Le son est bon, sa voix aussi belle voir encore plus belle que les fois précédentes dans ce cadre intimiste, pas trop de reverb, pas trop d’effets (pour cette chanson là). Le pari était risqué, il paye, on est déjà sous le charme (mais qui en doutait ?)

Sur les dernières notes, Josephine Stephenson la rejoint avec son violoncelle. Elle a participé au disque, tout comme Fabian Prynn dont la batterie est placée sur le devant de la scène en vis à vis avec Elena, très excentrée sur la gauche. Un quatrième larron, Jethro, alterne entre basse, guitare et claviers, ce qui permettra à Elena de ne faire que chanter sur certains morceaux. Quelque chose qui n’arrivait jamais avec Daughter en live il me semble. Certains musiciens sont un peu déstabilisés sans instrument pour "se cacher", chez Elena, ça ne donne pas cette impression, les mains retrouvent immédiatement leur mobilité, servent à exprimer des choses.

Après cette ouverture en douceur, on enchaîne avec la première piste du disque (logique puisqu’on est dans une boucle, après la fin, le début), "Where the time went" jouée avec tout le groupe et donc la batterie. On vous avait dit que le kit de Fabian était vraiment devant, tout près du bord de la scène, plus près même qu’Elena et ce n’est pas un hasard : comme sur le disque il a un jeu de batterie très particulier avec beaucoup de feeling, joué essentiellement aux balais et au mailloches, il est très présent, apporte de la dynamique, des placements rythmiques qui cassent la régularité des autres instruments sans pour autant prendre trop de place. Et quand la musique va crescendo, même avec des balais, il y met la puissance nécessaire pour que ça décolle vraiment. En avait mis préventivement nos bouchons parce que généralement un coup de grosse caisse quand la batterie est à 1m de vous ça fait plutôt mal et très vite on les enlève parce qu’il gère très bien son volume et qu’on a envie d’entendre tous les nuances de son jeu.

De la même manière, Josephine apporte énormément à cette déclinaison live de Ex:Re, que ce soit avec sa très belle voix ou son violoncelle qu’elle utilise à la fois d’une manière assez classique, de longues notes tenues à l’archet qui soutiennent l’harmonie et parfois de manière plus expérimentale avec ces fameux glissés "spectraux", dissonants, une approche plus moderne des cordes qu’on retrouve aussi sur le dernier Radiohead par exemple.

Quand à Elena, comme d’habitude son chant est impeccable, toutes les émotions du disque y sont et on sent qu’il y a clairement eu du travail pour le reproduire au mieux en live voir aller au delà, sur certains morceaux, elle rajoute deux ou trois voix via une pédale qui génère des harmonies vocales, dans l’intention même, il y a une énergie, une intensité qui n’était pas dans les versions disques et ça donne donc des passages qui prennent une tournure assez rock. Ce n’est pas parce que c’est triste que c’est forcément plombant. En fait quand on regarde Elena, c’est même plutôt le contraire, elle est tout sourire, très communicative, les yeux souvent ouverts et dirigés vers le public.

On savait que ça allait être court, on se disait au mieux elle jouera une ou deux chansons de Daughter, des anciennes qui se tiennent bien à une guitare et donc oui ça l’a été mais pas tant que ça l’album joué en entier (et presque dans l’ordre à part "Romance", certainement gardé pour la fin car c’est le "single" ?) dure 47 minutes et comme le concert est parfois coupé par de petits bugs techniques (la fameuse guitare qui ne sort plus de son et dont la courroie finit par lâcher mais le meilleur ami du roadie, le rouleau d’adhésif, est là pour ça).

On se quitte sur un rappel d’un titre qui sera une reprise, finalement pas de titres de Daughter et on ne le regrette pas particulièrement, Ex:Re est un projet singulier, une histoire à part, c’était finalement assez logique de "cloisonner" les choses ainsi. On vous commande notre longue interview d’Elena si vous voulez en savoir plus sur le disque et plein d’autres choses !

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