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publié par Mickaël Adamadorassy le 12/07/22
Emma Ruth Rundle - L'Européen, Paris - 11/07/2022

Emma Ruth Rundle a sorti l’année dernière Engine of Hell un album qui avouons-le nous a pris totalement à contrepied après le rock fiévreux et sombre de "On Dark Horses", ce son saturé énorme solidement ancré dans le grave qui pour nous était un peu sa marque de fabrique ou encore ses aventures métalleuses avec Thou. En effet, Engine of Hell est un album minimaliste, contemplatif, construit autour du piano et de la guitare acoustique, enregistré en partie live, tous les instruments ensemble, ce qui oblige à tout recommencer encore et encore au moindre problème. Thématiquement l’album est très bien nommé : il parle de souffrance, de désespoir, de perte, avec une sincérité totale, il documente aussi un moment de la vie de la chanteuse où elle s’est retrouvée loin de ses racines en suivant son mari pour s’installer au Kentucky (ils ont depuis divorcé).

Toutes ces émotions sont bien présentes sur le disque mais musicalement aux premières écoutes on trouvait qu’il manquait un peu de variété, de mélodies qui se distinguent à part le "riff" de "Blooms of Oblivion" et le piano sublime sur "Body" portant cette phrase obsédante "I can’t feel your arms around me", répétée plusieurs fois.

Après le concert d’Emma Ruth Rundle ce soir à l’Européen, on réalise qu’on aurait du y revenir plus souvent : en effet la chanteuse, seule sur scène, a joué en entier tout "Engine of Hell", alternant entre guitare acoustique et piano comme sur le disque. Mais de l’avoir en face de soi, c’est comme une révélation, trouver enfin les clés qui changent la perception qu’on se fait de ce disque, mais aussi de la personne qui s’expose entre les lignes. Tout est dans la multitude de nuances, la dynamique de sa prestation, la multitude d’émotions qui passent dans les yeux, dans le corps et transcendent les compositions de l’album.

Emma dégage quelque chose d’assez différent du concert de Petit Bain : les cheveux courts et le visage dégagé, plus proche et plus souriante entre les morceaux, n’hésitant pas à s’arrêter pour parler un peu de ses chansons mais totalement habitée quand elle joue, le corps qui se plie, la tête qui bascule en arrière ou tout le buste qui se penche vers l’avant, elle a un rapport très "physique" avec ses instruments et elle délivre une interprétation de toute beauté, profondément émouvante dans la palette de ses nuances, qui va du murmure dans un quasi-silence où l’on entend l’intérieur du piano grincer quand elle enfonce la pédale de sustain (parfois utilisée de manière "percussive" à des montées vocales/instrumentales dont la puissance n’a rien à envier à la formule électrique "full band" qu’on connaissait.

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