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publié par Céline Non, Mickaël Adamadorassy le 07/10/19
Emma Ruth Rundle - Petit Bain, Paris - 01/10/2019

Dans une époque où la norme semble être de multiplier les claviers et les pedalboards façon porte-avions, la scène d’Emma Ruth Rundle semble étonnamment sobre : en backdrop, une jolie illustration de Themis, déesse de la Justice, les yeux bandés et représentée comme il se doit avec sa balance, les amplis alignés les un à côté des autres au même niveau que le batteur Dylan Nadon, juste devant la Jaguar Baritone noire qui est devenue l’instrument "signature" d’Emma, puis un grand milieu de scène vide, jusqu’à l’avant où... hum... Emma a en fait un set de pédales assez conséquents mais elle n’a pas le "syndrome des claquettes" : ses changements de sons correspondent surtout aux alternances calme/orage dans la musique.

A ses côtés, à droite et à la guitare aussi, souvent parcourue au bottleneck, Evan Patterson, qui est aussi son mari. Sa deuxième guitare est précieuse pour obtenir le son électrique qu’on adore chez Emma : la guitare baritone peut utiliser une distorsion énorme dans les graves mais ce n’est pas non plus brouillon car il y a toujours une deuxième ligne arpégée ou lead qui reste très lisible dans le mix (la sublime "DarkHorse" en est une belle illustration). A gauche Todd Cook à la basse, sobre et précis, et peut-être un poil trop discret, tout en cheveux longs et barbe qui fait partie aussi de Jay Jayle avec Evan.

Une configuration rock classique donc c’est tout ce dont il y a besoin de transposer en live les chansons sombres et intenses d’Emma, leur atmosphères très lynchiennes. Un groupe solide capable de s’effacer pour laisser toute sa place à la voix poignante et aux guitares aériennes puis de créer un mur du son massif ; de créer l’attente comme d’appuyer l’urgence, de faire monter la sauce comme sur le poignant "Fever Dreams" qui commence le concert (et le dernier album). C’est vieux comme le rock, : les guitares en son clair qui égrènent des arpèges cristallin, juste habillés de reverb, la voix sur le fil et tout un coup l’explosion, la guitare baritone qui se pare d’une chape de distorsion énorme, appuyée , canalisée par le reste du groupe. Et le cycle recommence, encore et encore en vagues successives du plus en plus fortes. C’est la même recette imparable avec "Control", qui nous évoque toujours le premier A Perfect Circle.

Mais cette déclinaison "Full Band" d’Emma Ruth Rundle est loin de n’avoir que cette corde très grunge à son arc. On apprécie aussi les longues plages instrumentales distillées au cours du concert, qui permettent de s’apercevoir que le batteur malheureusement un peu caché dans le fond est plutôt très talentueux.

Et Emma donc... tout en noir, de longs cheveux bouclés qui viennent souvent cacher une partie de son visage. Entre les morceaux, on la sent un peu timide, elle distillera quelques phrases tout au long du concert mais ce n’est pas le genre à raconter les chansons ou sa vie, par contre elle est totalement investie dans sa musique. Cela transparaît dans son visage, ses geste mais aussi sa posture : même quand elle chante, elle n’est pas juste "posée" devant le pied de micro. Elle a une intensité, une sincérité évidente qui la rende captivante. A tel point que malgré tout le plaisir qu’on a pris avec les morceaux en formation complète, c’est peut-être finalement le dernier morceau, en rappel, où elle sera toute seule avec sa guitare électrique qu’on a préféré

Le concert n’est pas très long , 5 ou 6 chansons du dernier album et autant du précédent mais par son intensité, parce que chacune de ces chansons nous aura fait triper, headbanger, on n’est pas déçu, bien au contraire, Emma Ruth Rundle a été magnifique ce soir.

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