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publié par Emmanuelle Nemoz le 14/02/20
Hugh Coltman - La Cordonnerie, Romans-sur-Isère - 05/02/2020

Hugh Coltman n’entre dans aucune case, et c’est bien.

Anglais, mais parisien de longue date, un début de carrière dans le blues avec The Hoax, de la pop-folk sur ses deux premiers albums, des reprises de Nat King Cole sur le troisième (qui lui a valu la Victoire du Jazz "voix de l’année" en 2017), et du jazz sur le dernier en date, Who’s Happy ?, parce qu’attiré par la liberté d’improviser et la variété de sons et textures qui en résulte, Hugh Coltman n’est jamais où on l’attend mais toujours en train d’explorer de nouveaux terrains.

Après deux sessions en 2008 (ici) et 2015 (), nous avions croisé Hugh à l’automne 2019 en guest à la release party de l’album Cinematic de Kyle Eastwood où sa remarquable interprétation de "Gran Torino" n’était pas passée inaperçue (voir notre article).

Sa tournée actuelle, centrée sur Who’s Happy, est habillée d’un esprit vintage façon années 30 grâce au travail sur les lumières, avec notamment un bel effet d’éclairage en "douche" des musiciens au fur et à mesure qu’ils entrent en scène et commencent à jouer "Civvy Street" puis à chaque fois que leur instrument sera prominent (bravo Fred Drichos !).

Outre son batteur-percussionniste fétiche, Raphaël Chassin, et sa fidèle section de cuivres (Frédéric Couderc à la clarinette, Jerry Edwards au trombone et Jérôme Etcheberry à la trompette), Hugh était ce soir entouré de Matthis Pascaud à la guitare et Laurent Coulondre aux claviers (Nord et piano de bastringue), tandis que la "basse" était assurée au soubassophone par Didier Havet, façon brass band de la Nouvelle-Orléans.

Comme à son habitude, et c’est ce qui en fait un performer hors pair, Hugh Coltman se laisse totalement envahir par la musique et entre littéralement en transe à chaque morceau, pour en sortir tout aussi facilement à la dernière note et raconter une anecdote sur le prochain : l’Amérique de Trump ("Sugar Coated Pill"), le premier baiser ("New Park Street"), la transmission (le très acadien "Hand Me Downs"), le père qui s’enfonce dans la sénilité ("All Slips Away").

Les thèmes abordés par Coltman apportent une belle mordernité à ses compositions où se côtoient sons du bayou et de la Nouvelle-Orléans, jungle style tout en accords mineurs façon Cotton Club, rythmes chaloupés ou soul ou encore ballades folk intimistes, qui lui permettent de jouer sur toutes les nuances et inflections qu’il sait donner à sa voix (il est aussi capable, comme il l’a démontré ce soir-là, de tenir une note pendant ce qui semble une éternité).

La reprise de "It’s Your Voodoo Working" de Charles Sheffield met toute la salle en ébullition avec les solos déjantés de Laurent Coulondre (qui était au Cosmojazz Festival 2018 se souviendra également de la version d’anthologie interprétée par Hugh et sa special guest China Moses).

Après un premier rappel, une voix dans le public réclame "Smile", un des morceaux phare de Shadows : Songs of Nat King Cole [1], et Hugh rappelle Laurent Coulondre pour l’accompagner avec Matthis Pascaud dans une version totalement improvisée et toute en émotion dont on se souviendra longtemps.

C’est avec "Little Big Man", la délicate ballade écrite par Coltman pour son fils et interprétée à deux guitares avec Matthis Pascaud, que se termine la soirée, ou plutôt le concert, car Hugh Passera ensuite une bonne heure à papoter avec son public à la sortie de la salle.

Dans aucune case, on vous dit. Et c’est bien.

Notes

[1] Ce morceau, repris par des dizaines d’interprètes de Judy Garland à Janelle Monàe en passant par Michael Jackson, est issu d’un thème écrit par Charlie Chaplin pour son film Les Temps Modernes, sur lequel des paroles ont été ajoutées vingt ans plus tard par John Turner et Geoffrey Parsons

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