Le retour. Une
sorte de de réapparition inespérée. Reprendre là où tout s’était
arrêté, comme si de rien n’était. La dernière fois, c’était en
2006. Une sortie discrète, sans bruit, sans fureur. Une sorte de
mise en léthargie sans promesse de réveil mais sans aigreur.
Et puis les
liens se retissent, la bande se reforme. Les envies reprennent. Les
années de silence n’ont pas été gaspillées. D’autres projets.
D’autres moments de vie. Un tunnel avec ses joies, ses douleurs. Et
une bonne dose d’ennui. Et le désir de revenir.
Sleater –
kinney nous avait laissé peu après 2005 et son magnifique The
Woods. Il était évoqué ici, la dernière fois, en 2006. Un
disque bruyant, rageur, habité. Mais aussi léché. La faute à
l’infréquentable David Fridmann qui avait
lissé en bonne partie l’énergie et troublé le charme de plusieurs
morceaux. Avec le recul, et après le tunnel, cet album reste quand
même l’une des meilleures réalisations de la décennie passée. Des
bois dans lesquels il fait bon s’égarer souvent.
Entre temps,
les filles de Sleater – Kinney ont fait
des étincelles chacune de leur côté. En 2011, Carrie brownstein
et Janet Weiss dans Wild Flag
avec notamment Mary Timony. Un superbe album éponyme. Janet
Weiss dans Quasi, mais avec des albums inégaux pour ce
qui reste un groupe récréatif. Corin Tucker dans The
Corin Tucker Band avec particulièrement Kill My
Blues en 2012, un des grands disques de cette année. Les chemins se faisant, la distance se creusant,
le retour semblait hors de portée.
En 2015,
Sleater – Kinney revient avec No Cities To Love
sur Sub Pop. Elles ont repris leur producteur historique,
John Goodmanson, déjà responsable du brûlant Dig Me Out
en 1997. Quelques morceaux apéritifs fin 2014 pour jauger.
Appâtant.
L’ensemble est
plutôt bon. Très bon par moment. La production est moins sujette à
reproche. Ça reste un peu propet. Un son plus trouble, plus rauque
relèverait si bien leur fougue et les élans puissants de ces voix.
Les compositions sont globalement réussies ("Surface Envy",
"Bury Our Friends"). Il y a quand même quelques plans
faciles (les riffs de "Price Tag"). Des passages un peu
quelconques voire rasoirs ("No Cities To Love"). Peu de
morceaux attrape-coeurs – no anthems ? - comme sur The Woods.
Mais un album entraînant. Une sorte de retour aux sources, au socle fondamental de Sleater – Kinney. Un besoin de se retrouver,
de se rassurer.
Seul le
dernier titre surprend, "Fade". Au point qu’il aurait du
servir d’introduction et poser les bases d’un disque merveilleux et
déroutant. Mais c’est sûrement juste par anticipation et envie du
jalon suivant. No Cities To Love est juste un disque classique
de Sleater - Kinney, c’est déjà pas mal.