Comme Dee Dee Bridgewater, Marcus Miller est un habitué de Jazz à Vienne, où il se sent comme chez lui, ce qu’il exprime avec enthousiasme entre deux morceaux dans son excellent français, pour le plus grand bonheur du public venu en masse.

Pour sa dixième participation au festival, le théâtre antique est en effet plein à craquer et dès les premières notes de "Detroit" on est transporté dans le monde groovy du bassiste au chapeau noir, dont la virtuosité n’a d’égal que les talents de compositeur (faut-il rappeler que Marcus s’est fait connaître en composant l’iconique album Tutu pour Miles Davis en 1986).

Accompagné de Xavier Gordon aux claviers et Anwar Marshall à la batterie, et flanqué des excellents Russel Gunn à la trompette et Donald Hayes au saxophone, Marcus prend le temps d’explorer chaque morceau, d’en approfondir les thèmes, les changements de couleur et de rythme, et construit un set autour de personnalités qui l’ont touché de près (Miles Davis, Jaco Pastorius, Stevie Wonder), sans oublier évidemment ses propres compositions ("Untamed", "February").

Et puis il y a "Goree (Go-ray)", le titre poignant que lui a inspiré son voyage au Sénégal et la visite du plus grand centre de commerce d’esclaves de la côte africaine, pour lequel il troque la basse électrique contre la clarinette basse : moment de grâce absolue.

Marcus fait ensuite monter sur scène la jeune et brillante saxophoniste londonienne d’origine nigériane Camilla George, qu’il a repérée quelques jours plus tôt au Niort Jazz Festival et qui jouera plus tard dans la soirée au Club de Minuit, pour un "Tutu" percutant où les dialogues entre saxophones, trompette et basse fusent dans un crescendo jubilatoire.

En rappel, le "Come Together" des Beatles permet à Marcus d’associer le public survolté à sa musique qui, une fois de plus, laisse à la fois admiratif et euphorique.