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publié par benoît le 18/11/09
Thus Owls - On a fait un brainstorming de studio !

Ces hiboux-là nichent haut, au froid. Dans des contrées coutumières d’une pop colorée et hospitalière. Pendant qu’ils migrent vers la France pour une poignée de concerts*, remontons au contraire les alizés et le calendrier : nous voilà en octobre dans leur nid stockholmois. Il y a là Erika Alexandersson, la patronne, fraîchement mariée au canadien Simon Angell, l’astucieux guitariste de Patrick Watson, et la pianiste Cecilia Persson. Entretien (et petit cours de suédois) autour d’un fika, la traditionnelle pause-café locale.

Erika Alexandersson : Bienvenue chez Simon et moi ! Nous sommes dans le quartier de Södermalm, c’est l’une des onze îles... non treize... ou quatorze... enfin peu importe, l’une des nombreuses îles qui composent Stockholm. à l’origine c’était un quartier de travailleurs pauvres, mais aujourd’hui on y trouve la plupart des salles de concert et les gens du milieu culturel.

ça a commencé quand, Thus:Owls ?

Erika : Il y a presque cinq ans, au moment où je me suis installée à Stockholm pour la première fois. J’ai commencé à rencontrer plein de gens, dont Ola Hultgren et Martin Höper - les deux personnes qui ne sont pas là aujourd’hui, en fait. Simon est arrivé il y a deux ans, et je crois que c’est à ce moment-là que nous avons décidé d’enregistrer un disque.

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simon, erika, cecilia

Comment vous êtes-vous rencontrés tous les deux ?

Il y a plusieurs années, quand je tournais comme choriste avec Loney, Dear, on a eu deux semaines d’itinéraire commun avec Patrick Watson... ensuite, ca a été un peu un puzzle.

Simon Angell : ...et deux ans plus tard, je m’installais à Stockholm !

Erika, tu faisais déjà ta propre musique ?

Oui, c’est ce que j’ai presque toujours fait. Avec le bassiste Josef Kallerdahl dans Josef & Erika, et dans un duo d’impro, The Moth, avec le batteur-bidouilleur Martin Öhman.

Comment est venu ce nom de Thus:Owls ?

Simon : c’est juste que ça a de la gueule quand on l’écrit !

Erika : Oui... en fait c’est pas évident de choisir un nom... j’ai trouvé que c’était assez neutre, ça n’évoque rien de particulier, à part les hiboux... j’aime bien les hiboux :) Et puis j’aime bien ces deux mots ensemble, ça ne représente rien de musical, ça ne nous connecte pas à un style en particulier. ça reste ouvert et chacun est libre de l’associer à ce qu’il veut.

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simon, erika, cecilia

Quelle est la différence avec vos projets parallèles, à chacun ?

Cecilia Persson : Le truc spécial avec ce groupe c’est que c’est très... hm... finurlig. Ah, je bloque sur le mot suédois...

erika : ..."imaginaire" ?

cecilia : Non, disons plutôt... bon attends, il faut que je trouve ce mot !

erika : tiens, prends le dictionnaire.

cecilia : Oui, je vais regarder. Ce que je veux dire c’est que c’est super agréable de jouer dans ce groupe parce que, même si la musique est assez produite et arrangée, on se sent libre de la faire vivre en live. Et ça c’est plutôt rare et précieux. J’aime tous les petits bouts qui la composent, certains ingrédients paraissent bizarres mais quand le mélange est fait, ça donne quelque chose de vraiment unique.

...

...il faut que je trouve ce mot parce que ça explique vraiment ce que je veux dire !

Erika : Simon, tu connais ce mot ? ;-)

Simon : Non, mon suédois est encore trop faible ! Mais c’est vrai qu’on a trouvé un bon équilibre entre les parties composées et les instants où l’on peut improviser, sortir du cadre. On se connaît tous bien donc c’est facile de se sentir à l’aise sur scène. On peut aller assez loin. (forçant sur son accent québécois) J’pênse ça mârche supèr biên !

On ressent aussi ça à l’écoute du disque ; ça sonne comme un vrai "album de groupe", enregistré live, tous ensemble dans la même pièce

Cecilia : Oui, c’est quelque chose de très important. Quand j’écoute le disque, je reconnais vraiment mon jeu. Erika y tient, nous devons jouer comme nous le sentons, même si c’est elle qui compose. C’est essentiel si on veut être un bon groupe.

Simon : absolument. As-tu trouvé le mot que tu cherchais ?

cecilia : Oui ! Le dictionnaire dit "astucieux" (clever, ndla) mais je suis pas tout à fait d’accord ! (rires)

Comment se déroule le processus de création entre vous ?

Erika : J’écris toutes les chansons mais Simon ajoute parfois quelques parties, que nous arrangeons ensemble. Cet album a réellement été conçu en studio. J’avais des structures de travail, mais tout le monde a apporté des idées nouvelles. On a fait un « brainstorming de studio » en quelque sorte.

Tu composes avec quel instrument ?

Erika : ça dépend. Plusieurs, en fait. C’est le son qui me donne envie de composer. Donc je me lasse assez vite du piano et je me tourne vers un orgue ou une guitare ou autre chose... par exemple j’ai acheté un harmonium indien il y a deux ans, une sorte de petit orgue à pompe. J’aimais bien le son. Mais maintenant j’utilise surtout un ordinateur, quelques micros et j’enregistre des sons, des motifs à partir de différents instruments, et ensuite je fais des collages sonores. Puis je garde ce qui me plaît, ce qui me paraît intéressant pour ce que j’ai écrit. Je ne suis vraiment à l’aise sur aucun instrument, pas assez pour être vraiment libre comme interprète, mais j’aime bien composer comme ça.

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simon, erika, cecilia

Toi Simon, tu as tout un attirail pour ta guitare...

Ouais, j’ai ben trop d’pédales... mon kit que j’emmène avec moi partout. Il y a par exemple ce truc que j’ai trouvé à Göteborg, une sorte de modulateur. Y’en a probablement qu’un dans le monde, et il est là ! Y’a un capteur de lumière, et quand on le couvre il est supposé couper le son, mais là il est un peu cassé. mais du coup j’aime bien le son que ça fait. J’ai aucune idée de comment ça marche à l’intérieur, mais j’aime bien le son ! ça me permet de jouer sur le pitch. c’est pas très précis mais c’est intéressant. Sur toute une chanson ça serait lourd, mais placé au bon endroit c’est parfait !

Et puis j’ai un sac de "gogosses". des gogosses, en français, c’est des p’tits machins, des trucs quoi... achetés dans des quincailleries ou des "boutiques d’enfant". Y’a une brosse à dent... une brosse métallique pour faire la vaisselle... des baguettes chinoises...

je vois un archet aussi...

Ouais, mais c’est old school ça déjà ! En fait j’utilise différentes "affaires" quand ça me plait, pour le fun ! J’adore les pièces d’improvisation pour guitare écrites par John Zorn pour Bucketheads, c’est là que j’ai pris l’idée d’utiliser plein "d’affaires", mais plus dans un contexte pop, pas nécessairement avant-garde. Pis ça marche, j’pênse !

entretien et photos : Benoît Derrier

à Stockholm, le 13 octobre 2009

* Thus:Owls à Paris en première partie de Patrick Watson le 18 novembre à la Cigale, puis au Scopitone le 20, sous l’aile des amis de la Blogothèque.

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publié par le 18/11/09