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publié par gab le 08/12/10
This is the kit
- Wriggle out the restless
Wriggle out the restless

« Nous avons la lune, nous avons la lune » scande This is the kit, tel un manifeste, pour clore son nouvel album Wriggle out the restless. Et à vrai dire, il ne nous viendrait même pas à l’idée de la leur contester tant elle semble leur revenir de droit. Car s’il est un groupe qui n’a pas la lune dans sa poche c’est bien This is the kit. Il faut pourtant savoir que la lune ne se décerne pas si facilement, les critères de certification sont drastiques et effraieraient d’emblée le moindre groupe normalement constitué. Mais, Kate nous l’a redémontré récemment à la librairie Monte en l’air, il est possible de rester aérien et magistral couverte de poussière blanche et en grosses chaussettes vertes, This is the kit n’est pas un groupe comme les autres. La preuve par trois, revalidons ensemble l’alunissage kittien.

1. le dosage

Vous vous en doutez, la première chose qu’on regarde pour l’homologation lunaire, c’est le chant. Il nous faut un chant aérien, c’est évident, mais contrairement à ce qu’on pourrait penser, pas trop non plus. La plupart des apprentis luniens ont tendance à en faire trop dans ce domaine avec des tonnes d’effets en tous genres. Or, comme dans tous les domaines, il s’agit avant tout d’une question de dosage. Et la recette kittienne est très claire à ce niveau là : un chant doux et précis en toutes circonstances, même sur les morceaux les plus relevés. Un chant qui vous enveloppe, vous contient, vous porte ; avec une pincée de ou-ous à droite à gauche, pour bien assaisonner (attention point trop n’en faut). Faites mariner pendant une bonne demi-heure et le tour est joué.

2. les ingrédients

Maintenant c’est bien beau d’avoir un chant aux petits oignons mais un plat n’est véritablement réussi qu’à l’introduction du dernier ingrédient, et si vous placez votre chant dans n’importe quoi, vous perdez la lune (demandez à Apollo 13). Une fois encore le lunion en herbe aura tendance à alourdir la béchamel avec de bonnes vieilles nappes de synthé pour faire genre. Grossière erreur. Nos kittons, eux, optent en toute subtilité pour leurs arpèges de guitare si caractéristiques (déjà à l’honneur sur leur premier album Krülle bol), le tout agrémenté de quelques ajouts toujours bien sentis d’accordéon, batterie, violon, instruments à vent et même scie musicale en concert. Ils marquent en outre des points en œuvrant fortement pour la réhabilitation de l’instrument (à forme) lunaire par excellence : le banjo ! Sachant que Kate se bat aussi en concert pour la réintroduction dans son milieu musical naturel de l’appeau (honteusement détourné de ses attributions originelles par des bipèdes à pétoire), on constate que This is the kit prend même de l’avance sur les futures réglementations lunaires internationales. Du jamais vu.

3. le cahier des charges

Mais il ne suffit pas de se montrer bon élève pour obtenir son certificat, encore faut-il remplir un strict cahier des charges de 20% de morceaux de décollage, 50% de chansons d’apesanteur spatiale et 30% de titres d’alunissage. C’est restrictif et administratif, on en convient, mais il faut bien légiférer. On oubliait presque, fusée sur le gâteau (et hors-catégorie), le morceau dédié à sa magnificence en chef, dame Lune elle-même. Et là encore, vous l’aurez deviné, This is the kit remplit les conditions à la virgule près. Au décollage, pour lancer l’auditeur dans la stratosphère, recueillant une adhésion aussi automatique qu’immédiate, "See here" et sa guitare électrisée, légèrement saturée, son refrain qui s’empile par couches successives tel un mille-feuille sonore délectable, et surtout "Spinney", tubesque avec sa rythmique de guitare dévastatrice et son refrain entêtant. Une fois libéré de l’attraction terrestre vient l’apesanteur spatiale et à l’image du chant contenant dont on parlait plus haut, ces morceaux vous enveloppent, vous absorbent et ouvrent vos chacras comme personne. Que ce soit "Waterproof" et ses cuivres lui donnant une petite coloration jazzy, la berceuse non conventionnelle et banjenvoûtante "Trick you", la ritournelle fragile "The turnip", le limpide "White ash cut" ou encore l’émouvant "Sleeping bag" (touchante simplicité d’une déclaration à son conjoint, si difficile à réaliser sans tomber dedans), ces morceaux constituent le cœur et l’âme de cet album à la douceur conquérante. Survient enfin l’alunissage, moins violent que le décollage, plus volontaire que l’apesanteur, plus étrange surtout alors qu’on s’apprête à se poser sur l’astre tant désiré. On y retrouve donc des morceaux plus atypiques, "Sometimes the sea", sa basse et ses guitares électriques lui conférant un flottement d’action au ralenti, "Easy pickings", son violon à la limite de la justesse, et "Earthquakes", les tensions de l’alunissage plus palpables, entre léthargie et éveil, répétitions et réactions, élation et possible déception.

clameur

Et voila comment en dix morceaux on atteint la lune, avec une aisance déconcertante, sans le moindre signe d’essoufflement, sans même un petit incident de parcours. Nos héros n’oublient pas non plus, une fois l’odyssée achevée, de célébrer leur mentor et leur exploit d’un "Moon" retentissant, le plus délicat des chants de vestiaire jamais croisé ici bas. La clameur monte, ils ont la lune, ils ont la lune ! Le voyage les a grandis et nous dans leur sillon avec. Oui, les preuves sont là, ils ont la lune de leur côté et nous, avec This is the kit du notre, on entretient plus que jamais l’espoir secret de les y rejoindre à notre tour.

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publié par le 08/12/10