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publié par Mélanie Fazi le 06/04/08
This is the kit
- Krülle Bol
Krülle Bol

Banjo

L’histoire a commencé pour nous avec la découverte en 2001 de My place in the dust, splendide album de Morning Star qui nous avait incités à suivre de près le parcours de Jesse D. Vernon. Frustrés de ne jamais le voir sur scène (Morning Star se produisant beaucoup à Bristol mais très peu en France), sauf au sein du groupe de John Parish sur la tournée How animals move, nous nous sommes rattrapés en apprenant plus tard son installation à Paris. C’est à un concert de Morning Star aux Mains d’œuvres que nous avons aperçu pour la première fois Kate Stables, sa crinière frisottée, sa frimousse et son banjo. Nous devions souvent revoir ces deux-là sur les scènes parisiennes lors des mois qui suivirent : ils se produisaient tour à tour sous le nom de Morning Star (le projet de Jesse), This Is The Kit (le projet de Kate), ou Two Wooden Spoons (mélange de leurs répertoires, baptisé d’après l’une des chansons présentes sur Krülle Bol).

Cocon

Entre This Is The Kit et nous, ce ne fut pas le coup de foudre immédiat, plutôt un attachement progressif. Les chansons de Kate Stables ne sont pas de celles qui vous sautent à la figure et vous retournent les tripes : elles s’installent tranquillement et tissent autour de vous un cocon apaisant. Des concerts donnés par Jesse et Kate sous l’un ou l’autre nom, on ressort généralement le sourire aux lèvres. Cette musique-là, sous son apparente mélancolie, diffuse des ondes de bien-être. Kate Stables a sur scène une présence intéressante : très naturelle et un peu loufoque à la fois. Le dépouillement des arrangements met en valeur une jolie voix qui colle parfaitement à la douceur des mélodies.

Alice

Dans notre rapport à sa musique, on se rappelle deux déclics en particulier. D’abord une reprise magnifique du “Alice” de Tom Waits, lors d’un concert de Two Wooden Spoons donné dans un bar parisien. On croyait cette chanson indissociable du timbre rocailleux du bonhomme ; interprétée par Kate Stables, elle dévoilait une émotion insoupçonnée. On ne s’attaque pas à la légère au répertoire de Tom Waits, mais le résultat nous avait impressionnés. Assez pour nous pousser à regarder Kate d’un autre oeil - et surtout à l’écouter d’une autre oreille. Le deuxième déclic est lié à “Greasy goose”, entendue plusieurs fois en concert et dont la beauté fragile nous avait touchés.

Contes scandinaves

Ceux qui ont vu This Is The Kit sur scène reconnaîtront sur cet album une bonne partie du répertoire - dont justement “Greasy goose” et “Two wooden spoons”. On retrouve cet univers déjà familier auquel le passage sur disque donne une profondeur supplémentaire. La production de John Parish (déjà aux manettes de My place in the dust - la boucle est bouclée) contribue à renforcer la cohérence de l’ensemble. On s’émerveille, aux premières notes de “Our socks for evermore”, de la densité qu’y gagnent ces chansons. On reste dans le folk le plus épuré : guitare, banjo, percussions minimalistes, la voix de Kate et les chœurs de Jesse. Mais on devine derrière un univers intrigant. Une naïveté de surface dévoilant une bizarrerie diffuse et jamais appuyée : on s’attarde sur les paroles de “We need our knees”, qui se résument à trois phrases énigmatiques, ou de “Tangled walker”, histoire d’un personnage possédant six têtes et vingt-quatre membres. On se laisse charmer par la poésie de “Birchwood beaker”, peut-être la plus belle chanson de l’album, qui fait naître en nous des images de contes scandinaves (est-ce la neige, les oies ou la référence à Odin ?). Impression renforcée par ce titre énigmatique, Krülle Bol.

Couleurs vives

C’est là que l’album trouve son équilibre : entre la simplicité des mélodies et l’étrange cachet des textes. Si l’ensemble est touchant et charmant, ce décalage, ainsi qu’un aspect résolument terre-à-terre, l’empêchent constamment de sombrer dans la mièvrerie. On songe à la jolie session que nous ont offerte Kate et Jesse, où la présence de leur bébé introduisait un adorable grain de folie. On se rappelle une Kate apaisée, vêtue de couleurs vives au milieu de son salon (sur fond de lessive en train de sécher), qui chantait tranquillement tandis que la petite fille cherchait à s’emparer de sa guitare. Cette image, dans ce qu’elle a d’insolite, illustre bien ce qui fait le charme de cet album. Ça pourrait être classique : ça ne l’est jamais vraiment. On ne peut pas réellement qualifier Krülle Bol de jolie surprise, les concerts nous y ayant préparés ; on parlera donc de belle confirmation.

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publié par le 06/04/08
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- le 03/02/09 à 17:35
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Il y a un nouvelle interview avec Kate Stables sur What’s On The Hi-Fi : www.whatsonthehifi.com