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publié par Sfar le 19/03/07
The Road To Guantanamo - Michael Winterbottom
Michael Winterbottom

Plus aucune excuse

Il y a tout juste un an Michael Winterbottom obtenait l’Ours d’Argent du meilleur réalisateur pour The Road To Guantanamo : un film essentiel pour comprendre la réorganisation du monde qui a suivi les évènements historiques de l’automne 2001. Lors de sa sortie très peu de salles françaises l’ont hélas projeté. Et moi-même, c’est dans un cinéma d’art et d’essai bruxellois que j’ai reçu ce film comme une énorme claque. Le DVD vient enfin d’être édité alors plus personne n’aura d’excuses pour ne pas avoir encore vu ce témoignage effarant d’une horreur vraie et malheureusement toujours d’actualité.

Le monde dans lequel on vit

Lorsque le 9 septembre 2001 le Commandant Massoud fut assassiné, nous étions nombreux à pressentir que le monde allait radicalement changer... Même si nous ne n’imaginions pas que cela atteindrait l’atrocité que furent les attentats du 11 septembre 2001 et tout ce qui en a découlé. C’est en se replaçant dans ce contexte : celui de la guerre contre le terrorisme, celui de la revanche, de la vengeance d’un peuple terriblement meurtri par un des évènements les plus horribles qu’il eut à subir, que l’on peut tenter de comprendre comment le gouvernement américain en est arrivé à imaginer des « Guantanamo » et traquer sans relâche les responsables, les coupables quitte à entraîner de très nombreux innocents dans une terrible descente aux enfers.

Les « Trois de Tipton »

« En septembre 2001, quatre amis, Ruhel, Asif, Shafiq et Monir partent de Tipton, en Angleterre, pour assister à un mariage au Pakistan et prendre quelques jours de vacances. Seuls trois d’entre d’eux en reviendront... deux ans et demi plus tard. » Lorsque Michael Winterbottom entend parler de cette histoire, il part rencontrer les trois garçons. Il est d’abord fasciné par le fait que ces trois hommes étaient encore adolescents lors des faits, le plus âgé ayant à peine 20 ans. Il se rend compte qu’il est face à trois jeunes hommes tout à fait normaux, qui ne sont absolument pas des passionnés de guerre, de religion ou encore de politique mais trois personnes simples et inoffensives. Trois jeunes garçons qui venaient de vivre l’enfer pendant plus de deux ans dans la terrible prison de Guantanamo Bay à Cuba et non pas de dangereux terroristes fou furieux comme le gouvernement de Georges W. Bush aimerait le faire croire au monde entier. Filmé avec un budget plus que restreint, interprété par des apprentis acteurs, et tourné dans des conditions particulièrement difficiles en Afghanistan, au Pakistan et en Iran, le film mèle les témoignages des vrais protagonistes, des documents d’archive avec notamment des passages édifiants de discours de Georges W. Bush et des reconstitutions. Il était primordial pour le réalisateur que les trois jeunes hommes interviennent lors du film pour témoigner des moments clés de leur aventure. De même Winterbottom a voulu comme pour Welcome to Sarajevo insérer des images d’actualités afin que le spectateur puisse se souvenir des faits historiques et resituer les évènements dans ce contexte international bien difficile de septembre 2001 et des années qui ont suivi.

Un road movie qui tourne mal

C’est une histoire tellement simple et qui a si mal tourné qu’elle en est encore plus effrayante. Arrivés au Pakistan pour assister au mariage de l’un d’eux, les quatre garçons en profitent pour faire un peu de tourisme. Puis ils se retrouvent dans une mosquée, toujours au Pakistan. L’imam demande alors à l’assistance d’aider les Afghans, la mosquée organise le transport des personnes volontaires. Le lendemain, ils prennent un car... Ils vont alors se retrouver au mauvais endroit au mauvais moment. C’est ainsi qu’il seront capturés par erreur en Afghanistan avec des talibans et emmenés à Guantanamo comme partisans soupçonnés d’Oussama Ben Laden. Durant toute cette première partie du film on profite de paysages superbes d’Asie centrale, on voit la richesse de certaines villes qui s’oppose à la pauvreté, la souffrance et la misère qui règnent dans les villages de la campagne désertique. On partage un peu du quotidien de ces régions qui depuis des décennies sont tellement tourmentées.

This is your final destination

C’est à l’arrivée à Guantanamo que l’on sombre dans l’insoutenable. Le quotidien des prisonniers y est terrible, parqués dans des cages métalliques, portant des combinaisons oranges, des masques dignes de muselières et subissant les humiliations d’usage liées à leur origine et tout le reste. Il ne s’agit pas pour Michaël Winterbottom de nous asséner un « torturer c’est pas bien » qui serait beaucoup trop simpliste. Le réalisateur arrive à démontrer, sans trop tomber dans le parti pris, l’extrême ridicule de la position américaine. Leurs méthodes ne sont d’aucune efficacité, la violence des tortures ne fait qu’empirer parce que les services d’enquête ne parviennent à rien prouver .... parce que tout simplement il n’y rien à prouver. Et plutôt que de reconnaître ces méprises plus qu’évidentes en ce qui concerne les trois anglais, les accusateurs ne cessent de s’enfoncer dans l’aberration et les non sens. Les méthodes employées sont autant inhumaines que grotesques. On sourirait presque de ces scènes où l’on enferme le prisonnier dans une petite salle, en le torturant avec des morceaux de Eminem passés à fond. Et c’est donc 50 ans plus tard, que dans d’autres conditions, avec d’autres populations et dans d’autres lieux, on rejoue les plus mauvaises scènes qui furent vécues au temps de l’holocauste. Fort heureusement ces trois hommes (car on n’a jamais su ce que le quatrième garçon est devenu) arrivent à faire prouver leur innocence. Ils sont libérés, accueillis en héros dans leur pays et repartent enfin fêter le mariage de leur ami au Pakistan. Ils resteront meurtris à jamais de cette aventure et veulent aujourd’hui par ce film pouvoir témoigner pour raconter.

Ces gens ont le mal en eux

Mais que retiendra-t-on de tout cela ? Il restera des gros plans sur Georges W. Bush nous assurant que « ces gens là font le mal » et qu’« ils ne partagent pas les mêmes valeurs que nous ». On apprend aussi que les américains respectent les conventions de Genève .... « for the most part » ! Tout est dit. Parce qu’en fait Guantanamo est un vide juridique, qui n’est régi ni par le droit de l’homme des Etats-Unis (la base étant située à Cuba), ni par le droit international des droits de l’Homme. Les personnes incarcérées là-bas n’ont même pas le statut de prisonniers de guerre mais celui tout nouveau de « combattants ennemis ». Et les flous s’accumulent que ce soit pour les recours auxquels pourraient avoir droit ces prisonnier que pour les traitements qui leur sont infligés. En effet, la non ratification de certains traités par les Etats-Unis leur permet de ne pas être poursuivis pour « torture » et « traitements cruels, inhumains ou dégradants ».

Sur les 700 à 800 prisonniers passés par Guantanamo, seuls 10 ont été inculpés (aucun pour crime), mais n’ont pas encore été jugés de façon régulière... Début 2007 il y a encore 400 personnes détenues à Guantanamo.

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publié par le 19/03/07
Derniers commentaires
- le 06/04/07 à 13:19
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asalut comment ca va alo rs tu connai qui moi cesmilano 2006 alors je peus me voir le fillm