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publié par alex le 29/08/01
superheroes - états d'âme

les superheroes ont sorti un des albums les plus étonnants de l’année avec igloo. nous les avions raté lors de leur premier passage à paris, en avril. nous nous sommes rattrapés à l’occasion de cette nouvelle tournée et nous avons interviewé le groupe au grand complet, la veille du concert du café de la danse. on s’est vite rendu compte qu’interviewer les superheroes, c’était en fait interviewer le petit génie du groupe, thomas troelsen, qui ne laisse que très rarement la parole aux autres, et encore, pour la reprendre immédiattement. il ne le fait même pas exprès, on sent qu’il ne peut pas s’empêcher de parler, de défendre son groupe, dans lequel il croît tant. il est naturellement attiré par les micros, les projecteurs, les caméras. les autres musiciens sont pourtant de charmants jeunes gens, mais certains ne parlent qu’un anglais approximatif, ce qui ne les encourage pas à couper le sifflet à leur leader. thomas nous a donc parlé du son superheroes, de ses états d’âme sur l’angleterre, et du prochain album.

le cargo ! : votre musique est unique dans le paysage musical actuel. pourquoi avez-vous décidé d’utiliser tous ces instruments et ces sons des années 80 ?

thomas : tous les instruments que nous utilisons sont des instruments qu’utilisaient les groupes que nous aimons, comme the human league. au dos du livret de l’album, vous pouvez trouver la liste de tous les synthétiseurs que nous utilisons. je trouvais les albums de ces groupes très bons, j’ai donc décidé d’utiliser les même synthés. j’ai été très déçu d’ailleurs quand j’ai eu mon premier synthé analogique : les bords de l’instrument étaient en bois, il y avait tous ces boutons, cela ressemblait à un objet démodé alors que je m’attendais à un instrument du futur. je n’ai pas tout de suite su comment le programmer. la nuit où j’ai découvert qu’on pouvait produire tous ces sons extraordinaires, j’ai découvert le son superheroes en quelque sorte, qui peut d’ailleurs être assez expérimental.

le cargo ! : vous semblez avoir du succès au danemark (leur pays), mais pas dans le reste de l’europe. je ne sais même pas si l’album est sorti en angleterre.

thomas : non, il n’est pas sorti là-bas. tout le monde nous dit de ne rien espérer de ce pays. beaucoup de gens m’ont dit qu’il n’y avait pas de véritable scène rock en angleterre, ou un vrai réseau de groupes. apparemment, ils sont dans une période de « club music » et d’électronica. ce n’est plus à la mode faire du rock là-bas. il faut être dj et scratcher. nous n’avons reçu aucune offre de labels anglais, sûrement parce qu’ils ne pensent pas pouvoir vendre nos disques.

le cargo ! : par contre au danemark, cela se passe très bien, n’est-ce pas ?

thomas : oui, c’est vrai, et dans le reste de la scandinavie aussi.

le cargo ! : vous avez l’air fasciné par les night clubs, les dance floors, les boules de discothèques.

thomas : j’aime beaucoup danser et j’aime le rythme de la musique. le rythme donne à la musique un coté sexy, séduisant.

le cargo ! : qu’est-ce qu’un superhéros pour vous ?

thomas : c’est juste un nom. nous ne nous prenons pas pour des superheroes. peut-être tanja, qui a un jour sauvé un chat dans un arbre !

le cargo ! : votre musique est étonnament optimiste, enjouée, insouciante, on a l’impression que vous vivez dans un monde innocent.

thomas : vous voulez dire naïf ?

le cargo ! : pas exactement, mais vous ne parlez pas des difficultés de la vie. beaucoup de jeunes groupes de rock font des chansons tristes dans les quelles ils expriment leurs frustrations.

thomas : je vois ce que vous voulez dire. mais certaines de nos chansons sont très agressives. elles ne sont pas sombres car nous n’avons pas les même idoles que les autres groupes. nous suivons notre propre voie, et c’est ce dont nous sommes censés être fier, n’est-ce pas ? c’est vrai ce que vous dîtes. je n’écris pas des paroles... la musique peut être sombre par moments. la chanson "calculating" par exemple est désabusée. les autres chansons sont toutes aggressives et joyeuses. si vous venez à un de nos concerts, vous pourrez constater que nous ne pleurons pas vraiment sur scène, nous sommes heureux et même déchainés.

le cargo ! : que pensent vos proches de cette carrière musicale ?

thomas : oh, les parent adorent.

le cargo ! : vous allez bientôt commencer l’enregistrement de votre prochain album, n’est-ce pas ?

thomas : nous avons déjà commencé en fait.

le cargo ! : qu’est-ce que vous pouvez nous en dire pour le moment ? ca va être un grand album évidemment ?

thomas : oui, tous les groupes ont toujours dit que leur nouvel album était meilleur que le précédent, et en fait...

le cargo ! : c’est le cas !

thomas : exactement ! pour la première fois de ma vie, je me met à écrire des paroles qui ont un sens. avec dancing casanova, notre premier album, je m’intéressais plus au son qu’au sens des mots que j’utilisais. mes paroles ont été naïves pour le moment, mais j’écoute maintenant de la country et de la folk music, c’est une bonne source d’inspiration.

le cargo ! : est-ce que cela aura aussi une influence sur la musique elle-même ?

thomas : en fait, quand nous commençons à enregistrer un album, on ne se dit pas : « on va faire tel genre de choses ». j’écris des chansons, on les répète, et on essaye d’en tirer le maximum. cela sonnera comme du superheroes.

le cargo ! : beaucoup des meilleurs groupes de pop viennent de scandinavie. avez-vous un secret ?

thomas : la suède est vraiment la patrie de la musique : c’est je crois le troisième pays exportateur de musique au monde. ils ont beaucoup de musiciens incroyables. ce n’est pas mon truc, mais il y a par exemple cette équipe de producteurs suédois qui produit tous les albums de britney spears et des backstreet boys. je n’aime pas, mais il faut bien reconnaître que les musiciens et les producteurs suédois sont très forts. nous travaillons aussi avec le leader des x-tones, qui a produit notre album, igloo, car nous adorons les albums des x-tones. ils sont très professionnels ces gens-là. il y a aussi beaucoup de choses intéressantes au danemark, mais tous les bons groupes sont sur crunchy frog, notre label. il n’y a pas de scène musicale très développée au danemark. il n’y a qu’une grande ville, copenhague.

le guitariste : il y a une vraie tradition de musique folk et pop en scandinavie, par exemple en suède, mais il n’y a pas de musique blues. c’est vraiment de la musique « blanche ». c’est pour cela qu’il y a tant de bons groupes de pop. la musique scandinave est à l’opposé du blues.

thomas : abba par exemple a fait toutes ces chansons pop incroyables, à la mode disco, mais c’est tout sauf de la musique « noire ». c’est de la musique purement « blanche ». cela n’a rien à voir avec du racisme, évidemment.

le cargo ! : est-ce que vous vous voyez tous dans les superheroes pour un certain temps ?

thomas : je serai probablement trop vieux quand...quand j’aurai 50 ans ou plus, je ne suis pas sûr que je serai toujours capable de faire ce qu’on fait aujourd’hui. ca m’est égal de faire partie des superheroes ou d’un autre groupe du moment que je peux toujours faire ce que fais actuellement. donc oui, c’est un groupe fait pour durer. de toute façon, si je ne faisais plus de musique, je crois que je passerais tout mon temps à en écouter.

le cargo ! : dernière question, beaucoup de gens lorsqu’ils écoutent votre musique pour la première fois trouvent cette musique trop naïve ou adolescente, ou commerciale, leur première impression est négative. est-ce que vous avez été confronté à ce genre de problème ?

thomas : franchement, cela ne nous préoccupe pas plus que cela. vous savez, quand on a commencé à jouer dans notre ville, skive, qui est vraiment une toute petite ville danoise, je ne crois pas que les gens détestaient notre musique, mais ils ne l’aimaient pas vraiment non plus. nous nous amusions beaucoup quand-même, surtout quand on pouvait faire un concert et se retrouver sur une grande scène. c’est la même chose aujourd’hui. on ne fait pas de la musique pour les autres, on la fait pour nous. si les gens l’apprécient et achètent nos disques, c’est un vrai plus, mais à l’arrivée, on fait ça pour nous et personne d’autre.

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publié par le 29/08/01