Ce jeudi 6 novembre, le peuple de l’arbre étend ses ramifications à la Sirène. Toujours nimbé d’un anonymat mis en œuvre vestimentairement par des têtes de buissons et des affublements camouflages-feuillages, le quatuor londonien s’installe au milieu d’une jungle de synthés, à l’orée de laquelle se distingue une batterie, seul élément organique du set-up. Plus de guitare, ni de basse : fini les instruments à manches mais toujours des pieds de micro en branches.
L’ambiance forestière est accentuée par un éclairage vert qui inonde la scène et se voit hachuré par le faisceau des lampes frontales et la réflexion des gilets de sécurité fluo qu’arborent les membres du groupe. À l’arrière plan, est tendue une bannière avec les mots "Hard Times Furious Dancing", titre du déchaîné dernier album studio et profession de foi épicurienne. Face aux troubles de l’époque, un seul remède : la danse, la transe. On va rapidement y succomber : la horde débute, toute électronique dehors, par l’ancestral et électrisant "Jonny Guitar Calling Gosta Berlin". Visuellement et musicalement, Snapped Ankles, c’est l’alliance des extrêmes : minimalisme et maximalisme, Suicide et KLF, politique et hédonisme, tribalisme et science-fiction.

On est rapidement aspiré dans ce tunnel végétalisé post-apocalyptique qui débouche sur une clairière où tout le monde danse frénétiquement autour d’un totem de baffles et s’adonne à un rite païen sous le patronage de ces étranges gourous, mi-créatures mythiques scandinaves, mi-cookie monsters futuristes. D’ailleurs le chanteur Paddy Austin multiplie les prêches et les exhortations. Sa voix enrobée de reverb annonce les titres suivants : un très bon enchaînement "摆烂 Bai Lan" et "Rhythm Is Our Business", lors duquel il descend gesticuler au milieu de la foule, son synthé sur la tête. Plus tard, alors qu’une certaine fatigue auditive commence à poindre, il cassera judicieusement le rythme – pour mieux le relancer après – en nous invitant à quitter la forêt pour rejoindre la plage : des parties du public doivent alors se répondre, certaines faisant le bruit des vagues, d’autres le cri des mouettes alors que ceux du milieu aboient comme des chiens errants... Bref, au milieu de ce primitivisme électronique post-kraut un peu systématique, il se passe toujours quelque chose d’interactif et de marrant.
Après l’obsédant et génial "Raoul", la tyrannie des basslines, des oscillations analogiques et des rythmes motorik s’impose à nouveau pour un final possédé : "I Want My Minutes Back" et "Smart World". Ce dernier pilonnage en règle parachève notre rite de passage : nos chevilles sont douloureuses, nos feuilles correctement arrosées, nous voilà membres à part entière de la tribu de la forêt.
Un extrait de leur récent album live Dancing In Transit (Live 2025) :
Les photos de Renaud à la Route du Rock 2022
Merci à l’équipe de La Sirène.






