Il y avait beaucoup d’émotion sur scène comme dans le public pour cette soirée en hommage à Pagan Poetry, le projet musical de Nathalie Réaux qui est décédée d’un cancer en 2020, alors qu’elle travaillait sur son premier album. Sur le Cargo !, on a un paquet de beaux souvenirs de Nathalie, de sa musique bien sûr, mais aussi de sa gentillesse et de sa bonne humeur communicative, de sa générosité, aussi : cette voix magnifique elle la mettait souvent au service des autres : vous avez pu la voir dans Uncovered Queens of The Stone Age, sur scène avecKatel ou encore Miossec.
Début 2022, sous la supervision de son Samuel Léger, le compagnon de Nathalie (qu’on a pu croiser à la basse dans 49 Swimming Pools) sort l’EP L’autre Rive live avec trois titres totalement inédits, que vous pouvez trouver sous la forme d’un album vinyle posthume, réuni avec le premier EP de Pagan Poetry. Pour la sortie a lieu un concert-hommage avec les musiciennes et amies de Nathalie qui l’ont accompagnée sur ce projet à la salle Jean-Carmet d’Allonnes (dans la Sarthe dont était originaire Nathalie). On n’a pas eu la chance d’y assister mais heureusement on a eu droit à la session de rattrapage aux Trois Baudets, grâce à David Fargier organisateur des soirées Vent D’Orage, à l’association This is Pagan Poetry et bien sûr à tous les musiciennes impliquées : Karen Lano (voix et percussions) , Skye (voix et percusssions) et Claire Joseph (claviers, voix, percussions) aka Pur-Sang, Sarah Amsellem (chant et clavier), Christelle Lassort (violon) et Chloé Girodon (violoncelle) qui font aussi les choeurs. Et Marie Lesnik, collaboratrice de longue date de Nathalie, qui a assuré la direction artistique de ce projet de live. C’est aussi elle qui ouvre la soirée en tant que chanteuse et si on connaissait son violon et ses chœurs, c’est une très belle voix qu’on découvre sur le devant de la scène pour une fois ( et on se dit qu’il ne faut pas qu’elle en reste là).
Musicalement on retrouve la beauté du mélange d’orchestrations classiques et de textures électro, la dynamique des percussions, les atmosphères enveloppantes, le côté parfois théâtral voir mystique, tout ce qui faisait l’identité du projet de même que l’éclairage volontiers "mystérieux", privilégiant pénombre, contrejours et "auras" autour des musiciennes. Pour le chant, il est donc partagé entre cinq chanteuses : Marie, Karen, Skye, Claire et Sarah : on les a toutes eu en session, elles ont toute de très belles voix et on se régale de leurs prestations et de leur complicité , du début jusqu’à la fin, que ce soit quand elles interprètent les compos de Nathalie ou les reprises qu’elle aimait jouer ("I Follow Rivers" de Lykke Li ou "Unravel" de Björk). Les moments de pure beauté tissés par les cordes, de jubilation, de transe portées par les voix et le jeu de scène se succèdent, et que ce soit parmi les musiciennes ou chez les spectateurs où on retrouve la mère de Nathalie, de nombreux musiciens et des fans, on voit de temps en temps les yeux qui deviennent un peu humides, une larme vite essuyée mais surtout beaucoup de sourires et de joie à voir revivre sur scène la musique de Pagan Poetry, de la célébrer comme elle était elle-même une célébration de la vie, de l’idée qu’il y avait quelque chose de magique dans le monde qui nous entoure.