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publié par Sfar le 14/10/07
Radiohead
- In Rainbows
In Rainbows

Des précurseurs au grand cœur ?

Coup marketing ou véritable envie de donner un grand coup de pied dans une industrie musicale en crise, de faire évoluer le système et de l’adapter à ce qu’est devenue la réalité des relations musique-économie-internet ?

Lorsque Radiohead a annoncé la possibilité de pouvoir télécharger son album In Rainbows au prix souhaité par l’acheteur à peine quelques jours avant sa mise en ligne, personne ne semblait trop y croire ou n’arrivait à comprendre la véritable raison d’une telle démarche. Effervescences, bruissements dans les forums et webzines planétaires pour soit s’émerveiller de l’intelligence du geste soit crier au complot commercial d’une telle démarche.

Jonny Greenwood expliqua alors au magazine Rolling Stone que la vocation de la démarche de Radiohead était d’inciter les gens à réfléchir à la valeur de la musique et au rôle qu’elle joue dans leur vie.

Dans les premiers jours de mise en ligne près d’un tiers de personnes n’ont préféré rien versé pour télécharger l’album, le prix moyen acquitté étant en gros de 6 €. Les vrais amateurs du groupe préférant quant à eux débourser 40 livres pour le futur coffret qui contiendra In Rainbows version CD et vinyles ainsi qu’un second CD avec huit nouvelles chansons supplémentaires et des photographies numériques.

Depuis, une forme de polémique ne cesse d’alimenter les pages culturelles ou économiques : on parle de stratégie commerciale, d’arnaque concernant la qualité du format de compression des fichiers musicaux jugée insuffisante pour apprécier à sa digne valeur la subtilité des morceaux de Radiohead.

Mais il faut rester honnête, Radiohead n’avait pas besoin d’un tel coup médiatique pour faire parler d’eux et susciter l’envie d’acheter ou de se procurer leur nouvel album. Le groupe possède une telle aura que la moindre de leurs actions suscite de suite l’effervescence. L’attente était belle et bien là et coup internet ou pas l’engouement aurait existé évidemment.

On peut voir dans cette démarche une manière de faire la nique à l’omni-puissance jusqu’ici détenue par les grands labels et maisons de disques. D’ailleurs cet épisode Radiohead n’est pas anodin. Il s’inscrit dans la lignée d’une révolte des artistes de tout horizon qui s’est traduite dès cet été par les récents coups de gueule de Trent Reznor incitant le public à aller voler les albums de NIN sur le net plutôt que des les acheter légalement. Déjà de nombreux autres groupes prévoient eux aussi une diffusion de leurs prochaines productions dans les mêmes conditions que In Raibows.

Une nouvelle ère d’accès à la musique s’est sans doute ouverte mais le principal de tout cela reste , pour citer le leader de Radiohead : « Espérons que vous prenez du plaisir à écouter le téléchargement d’In rainbows. C’est un soulagement pour nous qu’il soit enfin sorti. Ca a été deux semaines folles »

Et l’album dans tout ça ?

On aurait pu croire que ce buzz et l’originalité de diffusion de In Rainbows pouvaient servir à masquer la médiocrité d’un album raté, qu’il pouvait s’agir d’une manière un peu tordue d’écouler un disque dont on ne savait pas trop si le retours seraient bons. Et bien NON ! Et c’est là que le coup est encore plus énorme : In Raibows n’est pas un sous album servant à tester une nouvelle forme de diffusion musicale mais c’est un véritable album de Radiohead avec tout ce que cela implique.

Les 10 morceaux ne sont pas tout à fait inédits puisque le groupe les jouent déjà depuis quelques temps en concert et que des versions live de ces titres circulent aisément ça et là depuis plusieurs mois (années même pour certains). In Rainbows débute de manière fort sympathique par le jouissif “15 Step” : la rythmique a un petit côté world-music. Sur ce rythme entrainant, on entend parfois des déformations étranges de la voix de Thom Yorke, des sons bizarroïdes mélés à des cris d’enfants joyeux. Ce “15 step” c’est un peu Thom Yorke au pays des teletubbies.

Avec “Bodysnatchers” on passe à un morceau beaucoup plus rock , des guitares nerveuses, un titre qui prouve que lorsqu’ils le veulent Radiohead peuvent faire dans le très bon et l’énergique qui réveille ,surtout sur la fin , tout en ensorcellant l’auditeur par les vocalismes si particulier d’un Yorke complètement possédé par son morceau.

“Nude” fait parti de ces morceaux de Radiohead avec lesquels ont peut avoir du mal à accrocher. Alors oui c’est vrai, c’est joli, doux et la voix est belle... C’est une balade que le groupe trimballe depuis des années et dont il existe différentes versions. Beaucoup vont trouver ce morceau magnifique et d’autres le classeront dans du Radiohead d’ambiance.

“Weird Fishes/Arpeggi” reste un peu dans la même lignée que le morceau précédent, disons qu’on est là dans une phase plus cool du disque : on écoute, on entre dans une zénitude absolue. C’est presque dommage que ce morceau ne se réveille vraiment qu’à une minute de la fin, dans une montée en puissance et une tension exceptionnelle. En fait, ce morceau prend toute sa dimension lors de son interprétation en concert.

C’est avec “All I need” que l’on tient l’un des titres les plus marquants de l’album. Sa rythmique lourde avec une ligne de basse tendue tout en tension, et un chant grave en font un morceau très mélancolique dont la noirceur et la beauté sont transcendées dans un final vraiment superbe.

“Faust Arp” et “House Of Cards” ont peu plus de mal à convaincre ceux qui aiment moins le côté éthéré de Radiohead : violons, mélodies un peu trop sages...Il y a trop de réverbérations sur le second morceau ; ce qui n’apporte pas grand-chose et accentue le côté un peu soporifique du morceau. Disons que pour les adeptes de musiques douces un peu new age c’est parfait.

Fort heureusement Thom Yorke et sa bande ont eu la bonne idée d’intercaler l’excellent “Rocktonner” entre les deux morceaux précédents, histoire de ne pas complètement ramollir l’auditeur. Alors on reprend ici un peu les mêmes rythmiques ethniques que sur “15 step”, et on part là dans une sorte de balade agréable agrémentée de ruptures de rythme avec quelques envolées lyriques bien plus belles sur album que dans les versions live entendues ça et là. Ce morceau aurait pu rejoindre le trio (quatuor même) des morceaux mollasons de l’album mais l’originalité de sa construction le rend fort intéressant.

“Jigsaw Falling Into Place” est une pure merveille, il mèle à la fois le côté obscur de radiohead, tout en gardant une mélodie et rythmique très entrainante. La voix de Thom Yorke, beaucoup plus basse, rend le morceau vraiment intense, rappelant quelques anciens très bon morceaux du groupe dont l’excellentissime “2+2=5”

L’album s’achève sur un morceau déjà devenu référence : “Videotape”. Déjà lorsque Thom Yorke l’interprète en live au piano ce morceau sort du lot, le genre de morceau que seul radiohead peut produire où se mèlent une mélodie tout en finesse et pourtant si puissante et une interprétation d’une mélancolie terrible.

Au final cet album de Radiohead n’est ni moins bon ni meilleur que les précédents. Il ne marquera pas une révolution ou un tournant dans la carrière du groupe. Il sera absolument nécessaire aux personnes dingues de Thom Yorke et son groupe. Pour les autres il ne changera pas leur vision de Radiohead . In Rainbows leur permettra de découvrir quelques très bons morceaux nous prouvant encore une fois que ce groupe a su garder cette audace et ingéniosité musicales qui le caractérisent depuis tant d’années.

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publié par le 14/10/07
Derniers commentaires
matoutoune - le 30/10/07 à 20:15
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un album super puissant, il prend aux tripes......je dis à tout le monde de le télécharger, une pure merveille........