au sommet
les deux derniers concerts de placebo à paris, au bataclan et au zénith, semblent constituer la fin d’une étape, d’une aventure. profitons de cette revue de concerts pour faire un bilan de ces deux dernières années. septembre 1997 : placebo joue en première partie de u2 au parc des princes et à l’espace grammont à montpellier. ces deux concerts sont historiques : ce sont probablement les deux dernières fois que placebo fait une première partie, mais surtout c’est la dernière fois que placebo est en position de faiblesse et a encore quelque chose à prouver, avec un brian molko impressionné par la foule, baissant les yeux et s’excusant d’être un peu mal à l’aise. le placebo qu’on retrouve un an plus tard dans son nouvel album, without you i’m nothing et sur scène, au bataclan, n’est plus le même. entre temps, les derniers réticents ont étés convaincus par "pure morning" et le groupe est devenu l’objectif majeur de sa maison de disques, virgin. mais ce que le groupe a perdu en spontanéité, en fougue, en énergie, il l’a compensé par sa maturité nouvelle, sa progression impressionnante sur le plan de l’écriture et de la production. après une black session le 27 octobre qui ne restera pas dans les annales, on retrouve le groupe le 30 novembre au bataclan pour un concert-événement, complet depuis plus d’un mois. la première partie est assurée par sloy, qui fait une prestation honnête. dès l’arrivée de placebo sur scène, le public se déchaîne. le concert démarre très fort, très vite, dans une ambiance survoltée. le groupe est au sommet de son art, et met en l’espace de 6 chansons infernales le public ko debout. brian, en grande forme, parle régulièrement au public, en français bien sûr.
apothéose
ils laissent ensuite le temps au public de retrouver ses esprits avec des chansons plus calmes - " without you i’m nothing " et "my sweet prince" - avant de repartir de plus belle avec "every you every me" et "bruise pristine". c’est d’ailleurs ces chansons rapides et bruyantes, marque de fabrique du groupe, qui feront l’unanimité ce soir, au détriment des ballades, qui malgré leur qualité, ont plus tendance à faire retomber l’ambiance, et qui semblent réduites dans l’esprit du public à des moments de calme avant la tempête. les rappels commencent par "pure morning", qui a cartonné partout dans le monde et qui est parfaitement représentative du nouveau son de placebo, plus travaillé, plus maîtrisé. suit un dernier moment de répit avec la version au piano de "teenage angst" avant l’apothéose, le monumental "evil dildo" pendant lequel stefan - en magnifique robe de soirée noire - et brian se jettent chacun leur tour dans la foule avant, pour brian, les yeux exorbités, de fracasser la guitare de stefan contre la scène du bataclan. on ressort de ce concert comblés, lessivés, mais en même temps, on se rend compte que placebo est à un nouveau tournant de sa carrière, déjà, et que la prochaine fois ils n’auront peut-être ni l’envie ni le besoin d’en faire autant.
test
le groupe s’envole ensuite pour les états-unis et une mini-tournée mouvementée - pourrait-il en être autrement- au cours de laquelle ils reviennent régulièrement lors des interviews sur le concert du bataclan, qui devient leur concert-référence. brian n’en revient toujours pas d’avoir cassé pour la première fois une guitare sur scène. puis placebo revient pour une tournée européenne au cours de laquelle ils repassent par nulle part ailleurs - interview de brian plus "you don’t care about us" en live - le 4 février, et font un crochet par les studios de oui fm où ils jouent "teenage angst" et une très belle version acoustique et lente de "every you every me". mais le vrai test, c’est le concert du zénith, le 18 février, une fois encore complet. c’est la première fois que placebo remplit seul une salle aussi grande. on peut s’attendre au meilleur comme au pire, on se demande comment va se comporter ce groupe devenu énorme. dès le début du concert, on sent qu’il manque quelque chose d’indescriptible.
magie
les chansons sont les mêmes qu’au bataclan, mais il n’y a pas cette ambiance, cette émotion, cette magie qui avaient rendu le concert du bataclan si spécial. "il y a tellement d’émotion ce soir, je ne sais pas quoi dire", déclare pourtant brian molko. mais l’émotion dont il parle, c’est celle d’avoir rempli le zénith, d’être devenu un groupe majeur, et non pas l’émotion d’un grand concert de rock. les chansons s’enchaînent les unes après les autres et à la moitié du concert, on reste toujours sur notre faim. la deuxième moitié du concert où les chansons plus calmes prédominent est beaucoup plus intéressante. le groupe est plus concentré, a retrouvé ses esprits après tant… d’émotion ! les versions de "lady of the flowers", "my sweet prince" ou "teenage angst" sont très réussies, et l’ambiance, plus calme qu’au bataclan, permet de les apprécier pleinement.
par la musique
on a même droit à deux "premières" : "ask for answers", extraite de without you i’m nothing et jouée pour la première fois en concert, est magnifique - brian est à la basse pour cette chanson - et "holocaust", une reprise de alex chilton - c’est la première fois qu’ils font une reprise en concert hormis les brit awards quelques jours plus tôt ; il faut savoir que mister molko venait de déclarer qu’ils ne feraient jamais de reprises en concert - une très belle ballade mélancolique et désabusée, avec stefan au piano. le groupe termine, bien sûr, par "evil dildo", qui, une nouvelle fois, met le public en transe. stefan est debout sur l’estrade de la batterie, dos au public, et brian comme d’habitude le nez dans les amplis, l’énorme son balaie le zénith, et là, enfin, on sent qu’il se passe quelque chose, on retrouve le placebo intriguant et captivant des deux dernières années. revenons un peu en arrière : avant de jouer "ask for answers", brian déclare au public : "vous avez vraiment de la chance ce soir. c’est la première fois qu’on joue cette chanson". oui, placebo a bien changé. espérons qu’ils digèrent rapidement leur succès actuel et qu’après un passage aux eurockéennes cet été, ils redeviennent un groupe plus préoccupé par la musique que par son image et son statut.