C’est la 20ème de Rock en Seine cette année et c’est une belle idée que le festival a eu de programmer quelques-uns des artistes de la première édition dont PJ Harvey , que nous découvrions donc sur scène en 2003 dans une (très) petite robe blanche , et sa Gibson Firebird VII en main, un concert mémorable, (très) rock à une époque ou les albums de PJ l’étaient aussi. 21 ans plus tard on est toujours aussi admiratif de la discographie de l’artiste et de sa capacité à proposer des disques toujours différents mais on avait fait l’impasse sur un Olympia l’année dernière de toute façon très vite soldout . Son passage à Rock en Seine était donc une belle occasion de se rattraper, notre dernière avec l’artiste remontant à 2017 au même endroit.
La formation qui accompagne PJ est cette fois-ci beaucoup plus réduite que le presque "big band" de 2017. Commençons par les plus fidèles : John Parish à la guitare et aux claviers et Jean-Marc Butty à la batterie, ils sont de la plupart des tournées et des albums depuis un bon moment. Complétés par Giovanni Ferrario à la guitare et aux claviers, qui fait partie de la "famille" depuis un moment : il a joué sur A Woman A Man Walked By et tourné avec PJ en 2008-2009 et James Johnston au violon et aux claviers qui lui non plus n’est pas un nouveau collaborateur.
Chacun a une tenue conçue spécialement pour la tournée : celle de Jean-Marc Butty fait un peu kimono dans la coupe, Johnston a une chemise très ample d’inspiration... "médiévale" on va dire, il a aussi la tête qui penche d’un côté et une expression de profonde mélancolie assez étrange. Ferrario c’est plutôt le regard qui vous cloue sur place si vous le croisez, avec Parish ils sont en commun le pantalon-chemise, plus classique mais on sent que les couleurs ne sont pas choisies au hasard. PJ porte elle une robe blanche sur laquelle tous les membres du groupe ont dessiné.
Sur scène on trouve un bric à brac de mobilier ancien en bois , une table et des chaises utilisées par les musiciens quand ils ne jouent pas , une sorte de petit banc sur lequel PJ s’assiéra quelques instants, un meuble de chevet. En fond de scène, des projections sur écran géant qui restent assez basique : la même image qui selon les couleurs et les interprétations est un mur dont la peinture se décolle, un sol zébré de coulées de lave, un ciel d’orage ou un décor infernal. Malheureusement le concert se déroule alors qu’il fait encore complètement jour et on y perd un peu par rapport au rendu qu’on a pu voir sur d’autres dates de la tournée.
A supposer qu’on se concentre sur le décor comme on le fait a posteriori ici, on peut vous assurer qu’à partir du moment où PJ Harvey entre en scène, on ne voit plus qu’elle et de tous les concerts qu’on a vu d’elle, c’est celui où elle fait le plus le show. Sans guitare sur une première moitié du concert consacrée aux deux derniers albums, elle se déplace d’un bout à l’autre de la scène en adoptant de nombreuse postures très théâtrales, les bras brandis, le corps arc-bouté, des poses "statuesques" avec les mains qui cachent les yeux. Elle sourit, elle a les yeux grands ouverts le plus souvent et n’hésite à pas à aller chercher les regards du public. Ce n’est pas nouveau que les concerts de PJ Harvey aient un côté théâtral, scénarisé mais que le public soit un participant, que le jeu de scène soit autant projeté "en face" ça c’est plutôt nouveau pour nous et cela humanise, adoucit tout de suite une musique qui par certains aspects peut paraitre austère, sombre sur les titres de Let England Shake)
Après cette première partie de concert consacré uniquement aux albums récents, (mais sans rien tiré de The Hope Six Demolition Project, peut-être compliqué à rendre sans les cuivres ?), PJ revisite une bonne partie de sa discographie avec de quoi satisfaire largement les fans des "vieux albums" : un "Dress" bien nerveux, "Man-Size" et "50-feet queenie" intenses, peut-être pas aussi chaotique que dans d’autres formations live mais très rock quand même, pour notre plus grand bonheur, la sublime "Angelene" toujours aussi émouvante et "transportante" et bien sûr en final de festival celles qu’une bonne partie du public (nous y compris) attendaient : "Down by the water" avec son énorme son de basse (une des choses qu’on ne pourra pas reprocher à la sono de Rock en Seine c’est de donner du grave à foison) et " To bring you my love" qui clot en beauté le concert et donne toujours le frisson peu importe le nombre de fois qu’on l’a entendu
Vous l’avez compris, on est plus à l’aise avec les "vieux" PJ que le répertoire récent mais on a aimé chaque seconde de cette prestation, y compris les titres de "I Inside The Old Year Dying" que PJ incarne totalement avec un jeu de scène qui vous embarque sans problème dans cet univers qui nous était moins familier et qui finalement n’est pas si différent du reste, quand on enlève les choix de production de chaque disque et que tout est joué par un groupe live qui comme à chaque fois est composé de très très bons musiciens. De là où on était, le son était aussi un des meilleurs du festival pour la grande scène, de même que le concert sera un des meilleurs voir le meilleur du festival pour nous.