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publié par Renaud de Foville le 25/05/02
piano magic - nous aurions dû arriver hier

quelques jours avant la sortie de son quatrième album, writers without homes, piano magic était à paris pour un unique concert en france. après trois années de collaboration, l’espagnol miguel marin a décidé de poursuivre un projet solo, laissant glen johnson, leader du groupe et fondateur du label tugboat, alasdair steer et le français jérôme tcherneyan partir sur les routes d’europe, rejoints à l’occasion de leur tournée par james topham et paul tornbohm. nouveau cas de figure qui n’effraie en rien ce groupe à géométrie variable, comme ses membres se sont plu à nous l’expliquer ce soir là...

le cargo ! : comment vous sentez-vous aujourd’hui ?

alasdair : nous sommes tous un peu fatigués car nous arrivons juste d’italie. notre van est tombé en panne au milieu de nulle part et nous avons dû prendre le train finalement. le trajet a duré huit heures, nous avons passé la nuit dans le train. enfin, le principal est que nous soyons bien arrivés. mais notre van et notre matériel sont restés coincés dans un trou paumé en italie. jérôme : tout le matériel est resté bloqué là-bas, dans un village en pleine montagne. nous étions bloqués dans un bar. nous aurions dû arriver hier. la journée promo a dû être annulée. nous avions la totale, les inrocks, magic, rock and folk... nous avons dû demander la location de matériel en catastrophe et décaler la presse, donc nous ferons tout demain.

le cargo ! : vous manque-t-il du matériel pour jouer ce soir ?

jérôme : ma batterie est restée en italie. l’ampli d’alasdair également. nous n’avons pu prendre que les guitares. il a fallu improviser. dans ce village, ils n’ont même pas pu nous dépanner, il n’y avait même pas de voiture de location. nous avons dû faire venir un taxi qui était à une heure de là où nous nous trouvions et nous avons dû aller prendre le train à turin.

le cargo ! : dans quel état êtes-vous juste avant de jouer ?

glen : plutôt bien. alasdair : nous sommes impatients de jouer.

le cargo ! : avez-vous quand même eu le temps de faire les balances avec le nouveau matériel ?

alasdair : oui, nous sommes arrivés à neuf heures ce matin, donc nous avons eu beaucoup de temps. nous devions avoir une journée promo et tout a été annulé. demain la journée sera chargée par contre. nous rentrerons en grande-bretagne samedi ou dimanche.

le cargo ! : allez-vous en profiter pour faire quelques visites ?

glen : non, je ne pense pas. je connais très bien paris. ma petite amie est parisienne justement. je viens ici une dizaine de fois par an.

le cargo ! : connaissiez-vous la guinguette pirate ?

glen : oui, je suis déjà venu deux ou trois fois et je connais nicolas, le programmateur. j’aime beaucoup l’endroit, comme le batofar. ce sont deux salles très particulières. a londres, il n’y a pas vraiment d’endroit comme ceux-là. il y a bien quelques bateaux, mais ils sont réservés aux clubs du troisième âge !

le cargo ! : comment s’est passée votre tournée jusqu’à aujourd’hui ?

glen : ces deux dernières semaines, nous avons joué aux pays-bas, en belgique, en allemagne et en italie. certains concerts ont été très réussis. je pense que nous avons bien joué, parfois devant à peine 20 personnes, parfois devant une centaine. nous avons eu l’occasion de jouer dans des salles vraiment somptueuses comme à pérouse, où il y avait des fresques sur les murs. l’atmosphère pouvait rappeler celle des églises, sous des voûtes très élevées. c’est ce que nous recherchons.

le cargo ! : comment vous êtes-vous sentis face à seulement 20 personnes ?

glen : c’était également agréable car les gens étaient attentifs et ont semblé apprécier. d’une manière générale, ils se sont montrés très polis. nous avons joué là où personne n’avait encore dû jouer avant, dans des villages qu’on ne doit même pas pouvoir situer sur une carte !

le cargo ! : comment cela se fait-il ?

jérôme : en fait, le trajet était parfois long entre deux dates, donc nous en avons fait une entre deux, en cours de chemin.

le cargo ! : dans quel pays vous sentez-vous le mieux pour jouer ?

glen : en espagne. nous avons déjà joué là-bas plusieurs fois et chaque fois l’accueil est meilleur. les espagnols aiment notre musique et y sont très réceptifs. ils ne font pas semblant, ce n’est pas une mode, ils n’aiment pas parce qu’on dit que c’est bien comme en angleterre. ils aiment simplement parce que notre musique leur plaît. nous vendons bien en espagne. nous avons pu jouer dans des salles extraordinaires là-bas. jérôme : cette année, nous jouerons dans un festival à malaga. l’an dernier, nous avons fait benicassim, c’était vraiment très bien, il y avait mogwai, ça reste un excellent souvenir.

le cargo ! : pensez-vous que cet accueil est dû au fait que vous comptiez un membre espagnol (miguel marin) ?

glen : au départ, je pense que nous avons joué en espagne venait du fait que miguel avait envie de retourner au pays, donc oui, dans une certaine mesure, il y est pour quelque chose. alasdair : mais nous étions également demandés en espagne. même, certains ne savaient pas que miguel était espagnol et lui parlaient en anglais. il n’était pas forcément très connu. glen : c’est vrai qu’au fond, miguel avait très envie d’aller jouer dans son pays, de parler sa langue, c’est d’ailleurs en partie pour cela qu’il a quitté le groupe.

le cargo ! : glen est-ce que ta petite amie (angèle david-guillou) va chanter ce soir ?

glen : non, pas ce soir. en fait, elle a enregistré un titre avec nous qui est sorti sur un label espagnol "i came to your party dressed like a shadow". elle chante aussi avec mathieu malon pour laudanum. elle a vraiment une très belle voix. parallèlement, elle vient d’enregistrer avec ginger ale un groupe français signé sur virgin.

le cargo ! : qui chantera ce soir alors ?

glen : moi avec ma voix toute plate...

le cargo ! : pas de voix féminine alors ?

glen : non. nous n’avons pas la même formation en studio et sur disque que sur la scène. il y a tellement de participants à nos albums qu’on ne peut pas emmener avec nous en tournée ! donc en général, je prends le chant.

le cargo ! : justement, comment parvenez-vous à faire le joint entre les titres en studio et le live ?

glen : nous faisons une sorte de compromis. nous n’aimons pas reproduire à l’identique ce que nous enregistrons. nous cherchons à nous en départir sur scène. nous aimons que les titres n’aient rien à voir, qu’il y ait vraiment un groupe de studio et un groupe de scène. beaucoup de groupes se contentent d’être fidèles à leurs disques sur scène. nous trouvons ça plutôt ennuyeux.

le cargo ! : avez-vous une préférence entre la scène et le studio ?

alasdair : c’est tellement différent. c’est vraiment impossible de dire ce que nous préférons. il ne peut pas y avoir de préférence. a mon avis, rien ne peut apporter ce que procure le plaisir de jouer en public, ce grand frisson, mais l’enregistrement des compos est un passage obligatoire et très important. c’est vraiment impossible d’établir une hiérarchie. glen : j’aime bien avoir le produit final dans mes mains, constater que le travail a été fait et bien fait. en même temps, j’adore être sur scène, dans ces endroits que je décrivais. j’aime voir la réaction du public.

le cargo ! : quand vous enregistrez, avez-vous avant le passage en studio une idée précise de ce que donnera l’album au final ?

glen : pas du tout. nous commençons à enregistrer seulement avec une vague idée de ce que nous allons faire et j’aime bien qu’il en soit ainsi. nous amenons tout le matériel puis nous décidons d’enregistrer pendant quelques jours, mais nous n’avons aucune idée du résultat. pour artist’s rifles, nous avons apporté tous les instruments possibles et imaginables, nous avons enregistré en 4 jours puis mixé le 5e. ainsi nous ne savions absolument pas ce que nous allions obtenir le dernier jour. c’était très intéressant et motivant.

le cargo ! : combien de disques avez-vous déjà sorti ? il semble que votre site en recense près d’une vingtaine !

glen : nous n’avons que quatre albums et nous avons fait une bande originale de film. nous avons aussi sorti des titres sur le label de san fransisco darla. en fait, c’était plus un single, mais ils le vendent en tant qu’album car ça leur permet de le vendre plus cher ! nos albums sont popular mechanics, low birth weight, artist’s rifles et writers without homes.

le cargo ! : en 2001, vous avez également sorti la compilation seasonally affective.

glen : ah oui, c’est vrai ! jérôme : cette compil est vraiment très bien car elle regroupe les anciens 45 tours, les inédits, les introuvables... il faut vraiment l’avoir ! vinita de rocket girl a vraiment fait du bon boulot, elle a tout repressé. vraiment, cette compilation vaut le coup !

le cargo ! : comment considérez-vous aujourd’hui la bande originale du film bigas luna, son de mar ?

glen : c’était vraiment un exercice difficile à mon sens. travailler sur des plages de 30 secondes, ça n’est pas très facile. il faut aussi travailler conjointement avec le metteur en scène, c’est un exercice difficile. nous avons l’habitude de jouer ce que nous voulons, comme nous l’entendons. mais lorsque vous travaillez sur une bande originale de film, tellement d’autres personnes sont impliquées, le metteur en scène, l’ingénieur du son etc. le disque que nous avons enregistré est à mes yeux parfait, il correspond également à ce que nous avions projeté. mais lorsque nous avons revu le film avec nos extraits, cela sonnait vraiment différent. c’est un peu un détournement du travail accompli.

le cargo ! : avez-vous été déçus ?

glen : pour ma part, oui. jérôme : surtout lorsqu’on a travaillé sur des séquences plus longues et qu’à l’arrivée elles ont été recoupées ou accélérées.

le cargo ! : cette expérience a-t-elle changé votre approche de la musique ou votre façon d’écrire ?

glen & jérôme : pas du tout.

le cargo ! : vous dites avoir enregistré quatre albums, vous ne considérez donc pas cette bof comme un album à part entière ?

glen : exactement, ce n’est pas vraiment un album à mon sens. pour créer un album, il faut à mon avis avoir une intention, un projet personnel. là, nous avons travaillé sur une musique de film en quatre jours. ca n’a ni la longueur d’un album, ni celle d’un single. a cette époque nous étions sur le point d’entrer en studio pour un nouvel album et puis nous avons été contactés pour bigas luna. nous n’avions aucun projet de faire une bof, c’était plutôt un projet parallèle, qui ne s’inscrit pas véritablement dans le parcours de piano magic. mais bon, nous avons été bien payés, nous sommes millionnaires maintenant et vous vous trouvez sur mon bateau actuellement (rires).

le cargo ! : son de mar s’est-il mieux vendu que vos autres albums ?

glen : non, pas vraiment. le problème est qu’il n’a pas été distribué dans beaucoup de pays. on le trouve surtout dans les pays hispanophones. nous avons vu le film 400.000 fois, lecture, retour-arrière, pause, lecture, retour arrière... jérôme : en tous cas je suis fier d’avoir fait un disque que ma mère écoute ! je connais même des gens qui l’ont offert à leurs parents pour noël !

le cargo ! : au bout du compte, cette expérience a-t-elle été enrichissante ? accepteriez-vous un nouveau travail de ce type ?

glen : oui, dans un certain sens, ça a été enrichissant. surtout du point de vue gastronomique ! l’équipe du film nous a emmenés dans de très bons restaurants ! mais sinon, non, je ne pense pas que je recommencerais. nous avons vécu une expérience intéressante, mais ça s’arrête là. ce type de projet ne nous correspond pas vraiment.

le cargo ! : comment est le nouvel album ? avez-vous pris du recul après la bande originale de bigas luna ?

glen : piano magic est en constante évolution, le travail sur la bande originale du film n’a rien changé à cela. l’album n’est ni plus ni moins formaté que les autres, nous n’avons pas l’ambition de faire du starsailor et consors. cela ne nous intéresse pas !! l’album est dans la continuité de ce que nous avons fait « ca n’est pas du piano magic tout en étant résolument inscrit dans la lignée de ce que nous faisons » ! piano magic fonctionne un peu comme un satellite ou un carrousel si vous voulez. beaucoup de monde gravite autour d’un centre, moi (rires !), ce qui est très enrichissant et indispensable. l’album est très riche en collaborations comme les précédents. nous avons joué avec paul andersen de tram, john grant des czars, robert johnson de life without buildings...

le cargo ! : le titre writers without homes a-t-il pour but de vous décrire ?

alasdair : oui dans une certaine mesure, nous sommes un groupe sans identité de lieu, entre jérôme qui est français, miguel qui est espagnol... nous n’avons pas vraiment de chez nous.

le cargo ! : qu’écoutez-vous de beau en ce moment ?

glen : dans notre van, nous aimons bien passer du blonde redhead, du black heart procession, du aphex twin, du fennesz...

le cargo ! : a ce propos avez-vous déjà eu l’occasion de le voir « live » ?

glen : non malheureusement, mais à mon avis il devrait donner des cours à starsailor et compagnie ! il devrait leur apprendre à se servir d’un ordinateur portable ! j’aimerais écouter plus de groupes comme aphex twin et fennesz que comme starsailor ou muse... mais bien sûr, je n’ai rien contre eux...

cargo ! : avez-vous quelque chose à ajouter

 ?

jérôme : etes-vous allés sur le nouveau site de piano magic ? (www.pianomagic.co.uk) il y aura peut être bientôt des extraits vidéo. d’ailleurs nous allons certainement sortir un dvd. il y a déjà des remix prêts du nouvel album pour la sortie en vynil.

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publié par le 25/05/02