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publié par octane le 07/11/01
Paria - Nicolas Klotz
Nicolas Klotz

intelligentsia

premier jour de cette première semaine pour le film de nicolas klotz, quatre cinémas seulement dans la capitale pour un film qui a pourtant nécessité plusieurs années de boulot, pourtant sponsorisé par l’intelligentsia inrocks/arte/libé et plébiscité par télérama. le ticket est à 7 euros 49 ici au g. italiens. 19h10, seules 25 personnes ont fait le déplacement. on s’y attendait mais on espérait quand même le contraire : un film sur les sdf n’intéresse pas grand monde. ou bien peut-être intéresserait-il des gens qui n’ont pas les moyens de le voir. ou tout simplement qui n’ont pas l’information. c’est pour cela que l’on souhaite en parler ici. ce n’est pas pour critiquer, émettre un jugement quelconque. cette fiction d’un genre nouveau en dit plus que 30 ans de cinéma hollywoodien et quinze de cinéma d’auteur français réunis, on se contentera donc d’aller le voir (voire le revoir), et d’encaisser.

à la frontière

il s’agit avec paria d’affronter, si on le peut, la vérité. celle qui fait mal. difficile d’éviter le cliché si on veut donner une idée de la force de ce neuvième film d’un auteur atypique (la nuit bengali, la nuit sacrée, un ange en danger). la vérité qui implique de tourner en vidéo numérique car on rentre vraiment dans leur monde et qu’il s’agit de se faire discret. la vérité qui suppose de tourner avec pas mal de non professionnels, ce qui donne au film son cachet original à la frontière du documentaire. il faut dire que derrière il y a un vrai travail journalistique, mais aussi un travail d’adaptation et de réflexion que retrace le site officiel du film. si fiction et réalité sont indéniablement "mixées" tout au long de ces deux heures, il s’agit pourtant bien de cinéma, et des deux aspects c’est bien la fiction qui est la plus forte, qui oblige le spectateur à entrer dans ce monde inconnu et hostile.

profils symptomatiques

on commence par vivre en temps réels le changement de millénaire à bord d’un bus de ramassage à destination de nanterre-douche. mais passé ce premier quart d’heure où le spectateur pourrait commencer à prendre ses distances avec le sujet, car étranger, un long flash back raconte les dernières 48 heures des deux héros, aux profils symptomatiques : l’un est aux portes de cet autre monde, dans lequel il est poussé par le hasard et la malchance (cyril troley, la trouvaille), le second a passé la ligne noire depuis longtemps mais on sent qu’il n’est pas très loin de la sortie (gérald thomassin, le petit criminel de doillon). puis la réalité rattrape la fiction, si on peut dire ça, et d’ailleurs on ne vous en dira pas plus, le but n’est pas de se substituer à l’auteur. seulement de vous donner envie d’aller à sa rencontre, et de préférence rapidement, parce que le film ne devrait pas traîner sur les grands écrans. ce film est donc captivant, on l’aura compris, à pas mal d’égard. ce qu’il a notamment de radicalement positif est de mettre en lumière deux situations de passage, d’ouverture entre les deux mondes : comment on en ressort (ça c’est la touche optimiste, qui permet - ce n’est pas innocent - au spectateur de ressortir en se disant que c’est bon, à ce train-là, il n’y aura plus de sdf avant la fin de l’année), et parallèlement comment on y entre... ce rapprochement, cinématographique à souhait, aurait pu entraver la dimension réaliste du film. ce n’est pas le cas, et on le doit sans doute en grande partie aux acteurs. a tous les acteurs.

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publié par le 07/11/01