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publié par Marie Destouet, Renaud de Foville le 01/05/20
Other Lives - "J’adore jouer en live. C’est naturel, car c’est tout ce que je sais faire !"

Bonjour Jesse, nous avons suivi ton parcours avec Other Lives depuis 2008 et nous savons que votre 4e album FOR THEIR LOVE va sortir le 24 avril prochain. Pour avoir eu la chance de l’écouter en avant-première, les 10 titres sont dans la veine des albums précédents, portant la même ADN : une richesse harmonique infinie et une dimension cinématographique unique. On pourrait ne pas être surpris et pourtant ce dernier opus pousse plus loin encore le voyage vers de grandes plaines orchestrales et lumineuses où la voix est toujours et même de plus en plus au cœur. Nous aimerions en savoir davantage sur cette belle histoire, et pour débuter revenons au commencement :

Quand, et de quelle manière, la musique est entrée dans ta vie Jesse ?

Je devais avoir à peu près 11 ou 12 ans et j’étais très sportifs. Je jouais au Foot Ball, Basket Ball, Base Ball et … j’ai une fausse mâchoire, faite de métal… j’ai eu une tumeur à l’âge de 12 ans et je ne pouvais plus faire du sport. J’ai commencé à jouer de la guitare, et cela a changé ma vie pour toujours. Je ne pouvais plus faire de sport et donc la musique est devenu toute ma vie à un très jeune âge. J’ai commencé à jouer dans des groupes à l’âge de 12 ans. C’est tout ce que j’avais dans ma vie, je n’avais pas d’autre but ! Je n’ai jamais pensé retourner au collège, j’ai laissé tomber l’école, car j’ai su que c’était ainsi. Et 25 ans plus tard, je fais toujours la même chose.

Comment as-tu débuté avec OTHER LIVES dans une optique plus professionnelle ? Comment as-tu basculé ? Était-ce naturel pour toi ?

Oui, c’est ce que nous faisions depuis le départ. Nous avons été un groupe pendant 15 ans, avons enregistré des disques, fait des concerts, c’était naturel. Et cela me manque, j’adore jouer en live. C’est naturel, car c’est tout ce que je sais faire !

D’où vient le nom OTHER LIVES ?

Le film appelé The life of Others  est l’un de mes films préférés. C’est un si beau film. Et j’ai adoré le nom du film alors je l’ai en quelque sorte adopté. Il y a quelque chose de large, ouvert et très humain.

On entend beaucoup parler de vos deux derniers albums et un peu moins du premier qui porte le titre éponyme du groupe, pourtant déjà magnifiquement écrit, un titre nous bouleverse plus que les autres (et tu l’as joué hier soir en showcase) : Black Tables. Peux-tu nous parler de ce titre ? Fait-il partie de ta set list actuelle ?

Je n’avais pas joué cette chanson depuis des années et ces derniers temps je me disais qu’elle me manquait. Je pense qu’elle fera partie de mes futurs sets à partir de maintenant. C’est une des premières chansons que j’ai écrites sur ce tout premier album. Je me rappelle la réaction de Vanessa et Phil, mes managers. Ils sont arrivés un jour quand j’étais en train de composer la chanson au piano. J’ai commencé à la leur jouer. Ils m’ont arrêté et m’ont dit : « c’est quoi cette chanson ? ! ».(rires) Oui c’est une belle chanson, très personnelle qui parle d’une amie qui souffrait d’addiction. C’est dédié à elle, c’est « chargé » effectivement, mais je suis heureux qu’elle existe. Elle contient de l’espoir. Parfois vous vous souvenez avoir joué une chanson pendant des nuits… aujourd’hui j’ai le sentiment de lui donner une nouvelle vie.

We wait

Quand tu travailles sur 12 chansons, penses-tu avoir le recul pour savoir laquelle tu vas sortir en premier, en faire un videoclip… ?

Je ne sais pas, je suis trop « près » du projet. Quand j’ai fini mon travail d’enregistrement, je ne suis pas préoccupé par ces décisions. Je ne peux pas émotionnellement passer d’un coup à autre chose. C’est trop précieux pour que je puisse décider de laisser partir la création. Ce devrait être les gens, le public, qui décide.

Si la musique classique (comme celle de Ravel à laquelle nous sommes obligés de penser) était un tableau de Maître, alors celle d’OTHER LIVES en serait un aussi, mais sans cadre autour, et enrichi, pour exprimer cette liberté que l’on ressent à l’écoute. Cette liberté existe-t-elle lors de l’écriture ?

Chaque personne a son truc. Untel court, peint, écoute. Mais pour moi, c’est à cet endroit (dans ma musique) que je suis loin de mon mental, loin de mes pensées, loin de la dépression et de la morosité. C’est comme un enfant qui vit : le temps passe, pas de soucis, pas de pensées, et tu vis seulement. C’est comme une manière de méditer. Être complètement présent, et absent à la fois. Alors oui, c’est le plus haut niveau de joie de ma vie. Avec le vin et le sexe !

Avec toute cette liberté que tu te donnes, comment arrives-tu à structurer ta musique, définir les contours de tes chansons ?

Ça dépend. Parfois une chanson arrive en 5 minutes, et je sais qu’elle est là. D’autres fois, c’est un mystère complet. Généralement, quand je commence à écrire, c’est comme si je devais peindre une photo sans savoir à quoi elle allait ressembler. Je commence par la partie musicale, je ne m’occupe pas des mots en premier. Je trouve une sorte d’arrangement. Parfois c’est un grand mystère, on ne sait pas ce qu’on fait sur le moment mais on continue de chercher pour percer ce mystère. C’est comme un puzzle parfois. Donc voilà pour résumer : dans certains cas, c’est un mystère total, dans d’autres cas, cela arrive instantanément, la mélodie est là, j’entends les harmonies, la basse … j’aimerais que ça se passe tout le temps comme ça mais vous savez, les deux procédés combinés sont beaux en réalité. L’un tient davantage du labeur que de l’amour… Mais il faut faire attention à ne pas trop s’acharner parfois … Il m’est arrivé de travailler sur des chansons et de les laisser tomber parce que j’ai trop travaillé dessus.

Le premier titre de FOR THEIR LOVE se termine de manière très particulière. On entend comme le son d’un vinyle sur une platine. Peux-tu nous en parler ?

On a un vieux Victoria, et on peut le faire tourner au ralenti. On l’a fait avec une des Gymnopédies de Éric Satie, ralentie au tempo de notre chanson. On adore Éric Satie.

On retrouve dans ce nouvel album un apaisement et un côté plus affirmé. Est-ce la continuité du dernier album ou une nouvelle histoire ?

Je ne dirais pas que c’est la dernière histoire, mais c’est un marque-pages. Avec les rituels que je cherchais. Il y a en effet quelque chose d’affirmé dans ce disque. Ce disque est une sorte de retour au commencement. Je savais ce qu’il serait depuis le début. C’était clair pour moi, je savais ce que je voulais faire : les chansons, la manière dont ça allait sonner. Pour le coup, ce n’était pas un mystère. Il y avait une sorte de certitude. Je savais où j’allais et ce que je faisais. Même si je n’avais pas l’idée de ce que j’allais entendre sur le disque jusqu’au dernier moment, bien sûr. C’est merveilleux. Ce n’est donc pas la fin, mais plutôt le commencement de quelque chose de nouveau pour nous.

Le titre de la piste 5 Dead Language se démarque des autres par son arrangement discret laissant toute la place à la voix et à des chœurs célestes. A-t-il une histoire particulière ?

La chanson parle de l’étrangeté de la communication dans le monde moderne. Je fais référence à des langues mortes comme le latin… je trouve vraiment cela étrange la manière dont on communique aujourd’hui, même si je ne la condamne pas. J’ai aussi redécouvert ma voix sur ce titre et sur ce disque. J’ai beaucoup bu et fumé pendant des années. Je chantais des notes très hautes que je ne peux plus chanter. Je chante donc plus bas maintenant et je m’y sens vraiment bien.

Comment travailles-tu les sons ? Seul ? Dans quels lieux ? Avec un ingé son en particulier ? Des musiciens ?

Généralement j’écris la chanson et j’ai une idée de l’arrangement. Le moment où j’appelle le groupe est celui où nous enregistrons. Je fais une démo et j’écris la plupart des arrangements. Ensuite, sur place pendant l’enregistrement, les musiciens précisent leurs parties comme les arrangements de cordes par exemple, à partir de la trame enregistrée sur la démo.

Quelle musique écoutes-tu en ce moment ?

J’ai une playlist appelée Cowboys from Sweeden, et c’est la playlist la plus cool du monde ! Des musiques des années 60, de la french pop, plein de choses, environ 250 chansons, et c’est trop bon.

Thank you Jess !

Un immense merci à Pias et en particulier à Flore. Au Showroom Gibson et en particulier à Juliette et à Sarah pour la traduction de cette interview. Merci à vous tous.

Discographie

  • 2009 Album Other Lives
  • 2011 Album Tamer Animals
  • 2015 Album Rituals
  • 2020 Album For their love

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publié par le 01/05/20