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publié par tairanteuh le 24/02/03
dont look back
- drunk in your arms
drunk in your arms

feedback

drunk in your arms est le premier album autoproduit tiré à 1000 exemplaires du quatuor dromois dont look back. brièvement il s’agit de rock plus ou moins instrumental étant donné que sont incorporées à leur musique des parties vocales. difficile de réduire la musique du groupe à quelquechose de plus synthétique et précis pour ces neuf titres qui sont loins d’être uniformes. généralement le propre du premier morceau d’un album est d’en donner le ton et d’accrocher l’auditeur. "hill xxx (evil)" ne remplit pas exactement sa fonction, il renseigne déjà sur l’univers musical du groupe et plonge de manière plutôt abrupte l’auditeur dedans. en effet, les principaux ingrédients se posent : à la suite d’un sample vocal sur une nappe de synthé élégante, les deux guitares se livrent à un exercice très post rock par dessus la batterie. puis la machine s’emballe, les guitares se font plus énergiques, le ryhtme plus soutenu, quelques feedback et le sample qui revient pour former un tissu sonore assez épais qui révèle des influences plus lourdes, grosses guitares et riffs limite teigneux. bref, pas le genre d’ouverture qui met l’auditeur en confiance pour la suite. mais cette première étape ne donne pas un réel aperçu de l’album, elle ne fait que donner une saveur plus ou moins pertinente.

harmonica

le deuxième morceau, "guillaume stern" est déjà plus représentatif : il contient tous les élements agencés avec plus de justesse par rapport à l’univers du groupe : une structure particulière qui s’articule autour d’un jeu rythmique particulièrement inventif : la batterie conduit les mouvements qui prennent place dans les morceaux et la basse se fait plutôt discrete, elle agit exclusivement sur la profondeur sonore. sur cette structure s’appuient les guitares, dont les montées énergiques sont moins lourdes que sur le premier morceau et qui insufflent les mélodies au morceau, les nappes synthétiques qui contribuent aux ambiances si particulières de cet album, et les samples vocaux, utilisés avec grande habileté, qui fixent les ambiances des morceaux. on pénètre véritablement cet album avec une des chansons les plus jouissives de ce début d’année : "sundown song for r.z" et sa lente introduction à l’harmonica, moment de calme après deux morceaux relativement enlevés. la guitare pose finement la mélodie sur la nappe de synthé et le tout s’élève minutieusement avec l’entrée des autres instruments et culmine avec le divin retour de l’harmonica. contrairement aux morceaux précédents, la guitare ne se fait pas rageuse et la montée se fait en douceur.

horloge

ces trois premier morceaux différents de par leur coloration témoignent de la richesse du jeu de dont look back. À l’inverse d’autres formations instrumentales dont le jeu est relativement statique, où les compositions reposent sur des schémas plus ou moins similaires et des sonorités qui reviennent souvent à l’identique, le groupe parvient à varier en gardant un style, une marque spécifique. celle-ci s’affirme par les éléments qui forment le son du groupe : ces ambiances cohérentes font office de fil conducteur pour cet album. après la parenthèse apaisée, "stage diver’s blues" montre un groupe qui redouble d’intensité et prend l’auditeur par suprise. c’est un retour à l’agitation du premier morceau qui se fait brutalement, pour montrer peut-être que dont look back ne fait pas ce à quoi l’auditeur pouvait s’attendre. un choix relativement dangereux car il faut un peu de temps pour se faire à cet enchainement entre le divin "sundown song for r.z." et ce "stage diver’s blues". l’exercice n’en reste pas moins remarquable, l’introduction à la guitare soutenue par un jeu rythmique minimaliste, au départ le battement d’une vieille horloge, est très réussie. le rôle important de la batterie s’affirme pleinement sur ce morceau où elle porte les guitares énervées sur le passage suivant, assure la redescente et s’embarque dans un rythme endiablé ensuite. quelques écoutes sont tout de même nécéssaires pour se familiariser avec ce passage délicat car énergique, jusqu’à ce que, sous le charme de cette rythmique, on adhère totalement à ces enchainements se concluant par un descrescendo qui nous laisse sur le battement de la vieille horloge.

oeil brillant

la transition de ce morceau avec "...and picture of jack" est brillamment réalisée par le rapprochement entre la vieille horloge et la maison qui sent le vieux dont il est question dans le dialogue entre deux hommes qui ouvre un des sommets de cet album : « cette maison qui sent le vieux, tout ça ça fait partie de ma passion / tu n’as plus ton oeil brillant d’autrefois ni ta belle énergie / j’ai viellis... », bruits d’oiseaux et cris festifs d’enfants, tandis que quelques notes de guitaire s’égrainent. la montée se fait lentement, le groupe franchit un pallier sonore avec la fin du dialogue, puis celui-ci reprend curieusement au début, s’interrompt à nouveau pour que la guitare reprenne de plus belle comme pour donner un impact plus fort à cette conversation étrange. le dialogue se poursuit alors sur un sentiment d’impuissance et une volonté d’abandon des deux hommes, volonté sur laquelle la musique prend le dessus avec une énergie croissante. un calme relatif s’installe temporairement, un passage plus mélodique qui ne laisse cependant que peu de place à la conversation, la musique l’emportant sur le dégout de ces deux personnes pour la vie, du moins « ce qu’elle contient de méprisable ». les voix disparaissent sous la masse sonore et n’en ressortent pas tandis que se défait petit à petit l’ensemble, ramenant la sérénité.

muezzin

cette fin évoque une sorte de tempête sonore qui emporterait tout sur son passage avant de s’épuiser en laissant une trainée mélodique des plus réussies. et si l’univers de dont look back s’exprime ici de la plus belle des manière, si on en touche vraisemblablement le coeur, l’album ne se clot pas pour autant. "everything burns" succède à la tempête par des sonorités diluées, floues, vaporeuses aux dessus desquelles les cris distants et festifs d’enfants s’élèvent à nouveau avant d’être rejoints par quelques bruits inquiétants, du moins étranges. deux voix surgissent en même temps que la batterie. il ne s’agit pas d’un dialogue cette fois-ci, une femme et un homme répètent la même chose plus ou moins en même temps, chacun prenant tour à tour le dessus sur l’autre. puis le dialogue s’établit entre l’homme et la femme et le morceau s’arrête. "i can’t tell the ceiling from floor" s’ouvre alors sur un sample de voix masculine (logique...) et une mélodie à la guitare soutenue par une batterie minimaliste démarre peu après, rappellant étrangement le début de "stage diver’s blues". puis le morceau prend des allures très orientales tant par les riffs que ce jeu rythmique qui varie sans cesse (teut le batteur fait des merveilles et précisons que les autres ne font pas défaut) ou encore par cette voix féminine arabisante alors que le son s’amplifie ou l’appel du muezzin qui retentit quelques instants après... le morceau prend un tour hypnotique tandis que la voix féminine prise dans un écho lointain reste en boucle, qu’un craquement de vinyl revient en cadence et que les deux guitares répètent leurs deux phrasés distincts.

juliette lewis

c’est naturellement une voix arabe qui annonce "old n°8 (2:00 am)", morceau lancinant, assez minimaliste comparé aux précédentes pistes, où les notes de guitare se répètent sur une programmation rythmique millimétrée, le clavier et des voix féminines superposées formant le reste de l’espace sonore. "old n°9 (4:00 am)" est amené par un beau son d’orgue sur lequel une guitare douce comme sur le précédent morceau pose la mélodie. le peu d’éléments du début est complété de manière progressive par le reste. encore une structure originale où l’intensité sonore s’amplifie peu à peu jusqu’à une envolée finale digne des premiers morceaux mais qui est brusquement coupée par un cri de juliette lewis, cri auquel succède un bruit étrange, comme quelquechose que l’on brise, écrase par terre... apparemment ce devait être le récepteur qui nous liait au monde de dont look back. un final frustrant comme pour mieux provoquer le désir de réitérer l’excursion dans cet univers agité, sombre, étrange, bancal, instable mais ô combien magnifique.

artwork

drunk in your arms est un premier album troublant à la structure épatante : un ouvrage symétrique dans lequel on rentre aisément que ce soit par cet abrupt premier morceau ou la facilité d’accès de l’ensemble, dans lequel on se promène sans effort du fait de transistions brillantes, et dont on sort tout aussi facilement par cette fin radicale qui nous ramène (trop) vite à la réalité. c’est aussi une traversée qui converge vers une impressionnante tempête sonore qui nous ramène aux bords de cet univers, en empruntant une douce trainée mélodique. enfin on ne saurait bien conclure sans évoquer l’aspect visuel de l’objet qui correspond parfaitement à l’univers de dont look back tel qu’on se le représente par la musique de drunk in your arms. d’une part l’artwork qui orne le digipack témoigne du soin apporté à faire de cette première référence un bel objet sous toutes ses coutures et d’autre part le site web du groupe, dontlookbackmusic.com qui en plus d’être une belle réalisation esthétique, contient tout le matériel nécéssaire pour se familiariser avec le groupe avant l’achat de drunk in your arms (vidéos, mp3, photos, etc.). vu la longueur de cette chronique, vous aurez compris l’importance que je porte à cet album autoproduit et je vous conseille donc sincèrement de vous procurer cet album.

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publié par le 24/02/03
Informations

Sortie : 2003
Label : autoproduction