Glacial
Duo suédois constitué de Per Jardsell et Davin Wenngren, et signé par l’honorable maison Resonant (Stafrænn Hákon, Emery Reel, Kepler...), Library Tapes est arrivé sans crier gare avec un premier album envoûtant. Autour d’instruments acoustiques, un piano et une guitare, les deux compères tissent une toile sonore complexe faisant appel aux field recordings, aux nappes de claviers ou de six-cordes déconstruites, pour parvenir à un résultat impressionnant, glacial et magnifique. Les amateurs de Labradford (période album éponyme) devraient y trouver leur compte, mais aussi ceux qui avaient craqué pour le premier EP d’un autre Scandinave, paru l’an dernier sur C.C.O., Porn Sword Tobacco, même si le travail sur la mélodie semble être plus poussé chez Library Tapes, et procure un sentiment d’addiction plus rapide.
Monument sonore
Le groupe n’hésite pas à avoir recours à la répétition des schémas, créant une impression d’immobilisme qui sied parfaitement aux images ralenties des paysages hivernaux que leur musique évoque. En opposition à cette inertie, on trouve chez Library Tapes un fourmillement sonore qui accompagne le minimalisme des mélodies : Broken Piano (pt2) qui ouvre l’album, et l’enchainement sur Leaves Have Left Us, paradoxalement bien plus touffu, renvoit immanquablement au premier Silver Mt. Zion et à son dépouillement. Il y a cette même volonté, qui habitait à l’époque les Québecois, d’ériger un monument sonore avec peu de moyen, sur des bases fragiles. Dans le même ordre d’idée, Cold Leaves For The Violent Ground n’aurait pas dénoté sur le premier album d’Eluvium, pour cette façon d’habiller, ou de noyer, une mélodie dans un épais brouillard musical.
Disque hivernal
Les éléments météorologiques sont d’ailleurs au coeur de Alone In The Bright Lights Of A Shattered Life, dans les titres souvent mais surtout dans les bruits qui parsèment l’album. On devine des pas dans la neige, des gouttes d’eau, le craquement des feuilles mortes, encore plus de signes qui scellent le disque dans un univers austère, en sommeil, dont les soubresauts sonores ne sont que le reflet de la vie qui attend le printemps pour reprendre ses droits. Un disque de saison en somme.
