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publié par vinciane le 14/05/06
le cirque des mirages - âmes d'enfant

samedi 29 avril 2006. quelque part dans la campagne berrichonne. rencontre avec yanowski et fred parker, aka le cirque des mirages, à la sortie de scène.

parker a déjà renfilé sa tenue de ville, écharpe et baskets, tandis que yanowski, veste en velours intemporelle, a gardé ses yeux cernés de noir.

un troisième album en préparation, un projet de comédie musicale cabaret qui mûrit doucement...

vous venez de jouer dans le cadre des escapades du printemps de bourges, dans la halle de séchage de chabrolles. Comment avez-vous géré de jouer en milieu de journée et en plein jour ?

yanowski : nous n’avons pas l’habitude. c’est un peu comme si on projette un film sur un écran sur lequel il y a déjà des dessins. j’ai un peu de mal à imaginer des situations alors qu’il y a plein de regards et beaucoup de gens qui entrent et sortent. c’était un peu difficile de les mettre dans l’ambiance, de les faire entrer dans une certaine magie mais on était assez contents à la fin. vu que nous tournons beaucoup, nous sommes parés à toutes les éventualités. nous chantons depuis très longtemps. nous avons fait les cabarets les plus sordides, les bars où les gens jouent au billard et aux fléchettes... alors quand nous rentrons sur scène, nous prenons le parti d’aller jusqu’au bout et de finalement donner tout ce que nous avons à donner.

comment réagissez-vous lorsque le public ne réagit pas à vos paroles les plus caustiques ?

yanowski : nous avons tout à fait senti cela parce que nous sommes habitués, mais nous continuons. évidemment dans des salles comme le café de la danse il y a comme un corps à corps, une relation fusionnelle avec le public. là, la fusion ne se fait pas tout de suite parce que c’est le milieu de la journée, parce que les gens ont vu plein de spectacles, parce que c’est un public qui a besoin de rentrer dans la situation et parce c’est vraiment très difficile en plein jour.

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parker : nous sommes quand même assez contents, d’autant que nous n’avons pas fait le répertoire entier qui amène au point culminant et qui est assez calculé. nous avons dû couper pour faire 45 minutes au lieu des 80 habituelles. donc évidemment les réactions ne sont pas les mêmes et nous non plus nous ne réagissons pas de la même manière.

yanowski : quand nous sommes arrivés et que nous avons vu la salle complètement ouverte à la lumière, avec une acoustique absolument abominable, nous nous attendions au pire. mais cela n’est pas arrivé !

vous vous décrivez comme des oiseaux de nuit. est-ce pour décrire le fait que vous ne vivez que sous les projecteurs ou que vous vivez en vase clos sans voir votre public, en le sentant simplement ?

yanowski : on fait surtout du cinéma en fait, plus que de la chanson. nous créons des situations. chaque chanson est une histoire et cette histoire s’établit sur un écran de projection noir qui est celui de l’imagination. s’il y a des gens qui passent et si on voit les décors avec écrit derrière « printemps de bourges », c’est très difficile d’amener les gens dans le londres de la fin du siècle ou dans le paris du début du siècle.

dans celle salle inhabituelle, tu as même pu chanter sans micro pendant “le terrible enfant”, on se dit presque que tu n’aurais pas besoin de micro...

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yanowski : oui finalement peut-être ! ça m’est arrivé dans certaines salles de chanter sans micro. En même temps c’est quand même important pour le confort de scène même si en façade ça n’est pas très important. si c’était toujours chanté ça serait simple parce que quand on chante on ne se fatigue pas la voix. par contre, il y a des moments très parlés et parler en portant la voix c’est très difficile. ça se rapproche de temps en temps du théâtre.

Cela vous plairait-il d’intervenir dans des pièces de théâtre ?

yanowski : nous n’avons jamais eu de proposition mais c’est un autre métier. même si ce que nous faisons est théâtral ça n’est pas le même métier. intervenir en tant que « nous » pourquoi pas.... ou alors dans une pièce de brecht, mais il faudrait que je reste chanteur et que fred reste pianiste. je ne suis pas du tout acteur, ce n’est pas du tout le même travail, notamment au niveau de la maîtrise de l’espace.

avez-vous déjà songé à créer un spectacle qui raconte une histoire de bout en bout ?

yanowski : oui ça risque de se faire. une grande comédie musicale de cabaret expressionniste, c’est un projet oui. ça serait un spectacle qui serait présenté comme tel et non comme concert. peut-être avec d’autres personnages, d’autres chanteurs. pas forcément d’autres instruments mais d’autres voix, d’autres visages, inhabituels. pas des visages en papier-mâché « tf1 », formatés pour de la consommation de loisirs, mais des visages avec une expression de la souffrance, de la douleur et de la joie, des visages humains qui ne soient pas enfermés dans le cadre fasciste d’une télé... de l’opéra bouffe à la berthold brecht.

ce n’est pas téméraire en tant qu’artistes de se prendre le risque de se cloisonner un peu de la sorte ?

parker : ce n’est pas en n’allant pas chez tf1 que nous nous cloisonnons ! yanowski : nous ne faisons aucune concession artistique. maintenant, si nous sommes invités sur un plateau de télévision pour chanter, nous faisons notre choix. tant qu’on ne nous demande pas de parler, de jouer au ballon ou de faire une course à la chaussette... nous ne sommes pas contre populariser ou élargir notre public mais nous sommes opposés à élargir notre art et à le rendre populiste. populaire oui, populiste non.

quels sont vos projets dans les semaines et mois à venir ?

parker : nous partons en tournée de dix jours et cinq dates au Canada en novembre. avant cela il y a surtout la cigale en mai, quelques dates éparses en province et le festival d’avignon en juillet au théâtre du roseau à 22h30. yanowski : tous les jours, jusqu’à ce que mort s’ensuive ! cela fait quatre ans que nous faisons le festival, cela nous a ramené énormément de tourneurs et de programmateurs. c’est rare de pouvoir faire une série d’un mois à paris. là c’est vraiment agréable de rencontrer un public, d’aller le cueillir sans l’aide des médias, de sentir une émulation montante autour du cirque des mirages chaque jour. les gens se passent le mot.

avez-vous le temps de continuer à créer ?

yanowski : absolument. nous préparons un troisième album, des chansons de scène.

comment marchent les ventes en ce moment ?

yanowski : pour vendre des disques il faut faire de la télévision ou avoir un parrainage France inter sinon les gens ne connaissent pas. tant que nous n’aurons pas d’ouvertures sur les radios, les télés, c’est clair que ça ne se vendra. c’est un peu décevant parce que nous aimerions bien être un peu plus connus mais ça se fera. je préfère que ça se fasse à long terme et avoir quelque chose de solide plutôt que de faire quelque chose de fulgurant qui dure une année et ensuite d’être pris dans la grande marche du spectaculaire. que l’on nous monte au pinacle pour nous en redescendre aussi vite... aujourd’hui nous ne sommes pas fortunés, mais ça va. le cirque des mirages nous fait vivre depuis deux ans.

comment définissez-vous votre public ?

yanowski : ce sont des personnes qui ont gardé une âme d’enfant. qui ont gardé une envie de rêver, d’imaginer.

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publié par le 14/05/06