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publié par benoît le 21/09/10
Junip - On aime bien se balancer sur deux accords

A en juger par la foule timide venue ce 18 septembre voir Junip à Stockholm, bien peu réalisent encore, même en Suède, qu’il s’agit là du groupe de José Gonzalèz, farouche garçon de Göteborg devenu indie-famous après sa reprise de Heartbeats. Un groupe pourtant formé au siècle dernier, bien avant le succès solo de son leader, et qui sort enfin un premier album. Rencontre dans la loge de Strand, sans doute la salle la plus pointue de la capitale suédoise.

Salut, vous n’êtes que tous les deux ?

José Gonzalèz (guitare, voix) : Oui, Elias [le batteur] fuit les interviews.

La tournée se passe bien ?

Tobias Winterkorn (claviers) : Oui, on était à Malmö hier, ensuite on file en Allemagne.

Ça vient d’où, ce nom de Junip ?

José : C’est Elias qui l’a trouvé. En fait ça ne veut rien dire. Le mot le plus proche est juniper, l’arbre duquel on extrait le gingembre. Et puis ça sonne bien. Voilà, c’est tout.

Vous vous êtes formés il y a douze ans, qu’est-ce qui vous a pris autant de temps pour arriver à un album ?

José : ah, c’est une longue histoire, que je peux essayer de résumer... On s’est formé en 1998, on a sorti un maxi de quatre titres. On avait d’autres chansons pour un album, que l’on n’a finalement pas enregistré. Et puis j’ai commencé à tourner en solo, Elias est devenu étudiant et Tobias, prof. Deuxième essai en 2005, nouvel EP, et puis je suis reparti en tournée. Et nous voilà aujourd’hui !

Donc les chansons de cet album sont assez anciennes ?

Tobias : non non, pas du tout, tout est nouveau. On a commencé à enregistrer en 2008, à partir de choses nouvelles. Et tant mieux, parce que nos anciennes chansons n’étaient pas terribles...

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Tobias Winterkorn, José Gonzalèz, Elias Araya

Comment vous travaillez ? Qui compose ?

José : En fait on répète tous ensemble, et on se met à improviser à partir de rien, juste un beat par exemple... on commence à faire du bruit, jusqu’à obtenir un truc qui sonne bien. Alors on finit par se regarder et on se dit « ouais, c’est pas mal ça. On va peut-être l’enregistrer. » Voilà à peu près comment ça se passe.

Tobias : On enregistre en numérique mais ensuite on transfère sur un quatre pistes analogique, ça donne une chaleur inimitable, et on aime la compression naturelle de la bande magnétique. De toute façon notre ingé son ne travaille que comme ça !

Tu m’as l’air assez intéressé par le son, Tobias...

Tobias : Oui, en fait j’essaye de produire des sons intéressants pour cacher mon manque de technique ! [rires] J’ai un bon vieux Fender Rhodes, et puis quelques synthés vintage, comme un Moog Prodigy, et un vieux clavier italien qui ne sonne pas terrible mais qui a un look d’enfer. Le tout connecté à un ensemble de pédales d’effet.

Et pour les textes, comment ça se passe ? Qui s’y colle ?

Tobias : Les textes, c’est le seul truc qu’on ne fait pas ensemble. C’est l’affaire de José.

José : Oui, j’écris à partir des morceaux terminés. Les sujets sont assez variés. Je me laisse porter par le feeling, j’essaye de trouver des mots qui collent à la musique. Des mots au hasard, des métaphores...

C’est difficile d’écrire en anglais ?

José : en fait, j’écrivais en anglais quand j’ai commencé la musique, à 14 ans. Les mots ne me viennent pas facilement, et ce quelle que soit la langue - c’est pareil en suédois ou en espagnol. Même si le suédois est ma langue natale, et l’espagnol ma deuxième langue, j’ai l’impression que j’ai plus de vocabulaire en anglais ! C’est à force de regarder des films américains, on en est abreuvé ici en Suède. Mais quelle que soit la langue dans laquelle on s’exprime, le tout est d’avoir quelque chose à dire.

Vous vous sentez connectés à la culture suédoise ?

José : peut-être davantage avec mon travail solo, certaines personnes disent que c’est typiquement scandinave, cette mélancolie. Ce qui est étrange, parce que mon inspiration principale vient d’Amérique latine, de gens comme Caetano Veloso ! Mais je ne pense pas que notre musique soit typiquement scandinave. Il y a peu de chances pour qu’elle évoque la Scandinavie à quelqu’un qui ne saurait pas d’où on vient.

Tobias : moi je me sens quand même influencé par la musique suédoise des années 60, comme Bo Hansson par exemple, ou le rock progressif des années 70, à la fois suédois et britannique. Je peux mentionner Silverbullit. En fait, Junip est un peu une version light de Silverbullit, avec des chansons plus douces ! Et j’écoute aussi beaucoup de jazz.

Beaucoup de vos chansons délaissent la structure traditionnelle couplet-refrain pour un canevas plus répétitif

José : C’est vrai. Ça vient de notre façon de travailler. On aime bien se balancer sur deux accords, et puis basculer sur un troisième. ça donne un côté répétitif auquel on est assez accro. Ça nous met en transe, c’est différent d’une chanson pop de deux minutes trente - même si on aime bien ça aussi.

- Propos recueillis à Stockholm le 18 septembre 2010 -

>> L’album Fields sur Spotify

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publié par le 21/09/10