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publié par Mickaël Adamadorassy le 01/11/22
MaMa Festival 2022 - Jour 1

C’est en train de devenir une tradition pour nous, comme le Route du Rock ou Rock en Seine : arpenter pendant 3 jours le XVIIIème arrondissement de Paris et son vivier de salles de concert pour le "MaMa Music Festival & Convention 2022" ou plus affectueusement juste le MaMa. Un évènement qui concentre pendant trois jours presque tout le milieu de la musique français et beaucoup d’internationaux. Représentants de gros et petits labels, promos, tourneurs, producteurs, presse, chacun avec son petit badge autour du cou, se retrouvent pour des conférences (dont une "surprise" avec Orelsan cette année mais le nombre de participants était limité et c’est parti bien sûr en quelques minutes) , du "speed dating" musical , des showcases et tous les soirs une programmation de concerts qui mélangent projets tout frais , ovnis musicaux mais aussi des artistes plus confirmés voir des "next big things" qui vont casser la baraque dans un avenir plus ou moins proche. L’année dernière ce titre revenait sans contexte à Structures, qui avait donné un concert de très haut vol à la machine du Moulin Rouge mais tarde depuis pour diverses raisons à capitaliser (mais on y croit toujours fort)... mais donc en résumé si un concert au MaMa ne fait pas une carrière, le festival peut quand même donner un sérieux coup de pouce à celle-ci.

Pour ce premier jour de l’édition 2022, la programmation est plutôt rock et avec trois ou quatre concerts en simultané, il y a eu des choix déchirants à faire, surtout que cette année on avait décidé de faire un peu moins de concerts mais de les vivre plutôt en entier, ce qui implique qu’au lieu de voir 15 minutes de 7 à 8 groupes et passer finalement beaucoup de temps à naviguer entre les concerts, on allait plutôt en voir 4 et en profiter à fond. C’était en tout cas l’idée et "à fond" voir "a fond a fond a fond" résumerait plutôt bien la soirée qui commence pour nous vers 19h30 au NO.PI

Hoorsees

le quoi ????, dites-vous. Le NO.PI ou, North Pigalle, apparemment c’est un truc que des gens branchés disent, géographiquement c’est plutôt à l’ouest, sur la place de Clichy, un lieu tout neuf à la décoration plutôt chaleureuse qui évoque le Central Perk de Friends. On est en sous-sol mais la scène est plutôt grande, au milieu d’une pièce encore plus grande à l’acoustique correcte, ce n’est pas du tout le même feeling qu’une Boule Noire par exemple, moins rock’n’roll mais ça reste de très bonnes conditions pour jouer pour un groupe et on espère que les lieux seront souvent ouverts aux concerts indés, mais si sûr avec le côté "premium" du lieu qui fait plutôt boite que bar. Avec leur esthétique indie et leurs influences pop, le lieu va plutôt bien aux Hoorsees qui font partie des "locaux de l’étape" dans la prog, le chanteur nous confiera même que sa mère habitue juste à côté. Mais apparemment elle n’est pas venue au concert et c’est dommage pour elle car le quatuor parisien nous a offert un set indie rock plein de bonne humeur et d’énergie. On a aussi l’impression que depuis le .FRM, le groupe a pas mal gagné en assurance et en présence scénique.

Hoorsees possède en plus une série de titres imparables, "Weekend at Bernie", "Jansport", "Blue Pants" qui aident manifestement à gagner l’adhésion d’un public qui grossit au fur et à mesure des quarante-cinq minutes du concert, de moments très pop et très mélodiques et de phases plus énergiques et saturées, avec ,chose plus rare au Mama, peu de gens qui ne reste qu’une ou deux chansons. On peut se dire aussi que comme le groupe parisien c’est essentiellement son public qui est là mais il y a quand même un bon mélange de gens avec et sans badge pro.

Animal Triste

Pas le temps de s’attarder après le set de Hoorsees, on doit retourner à la Boule Noire pour Animal Triste et il faut se presser car si on aime beaucoup la Boule Noire, il faut dire qu’on ne voit quand même pas super bien quand on est au fond... Et Animal Triste c’est une grosse claque dans la figure qui se savoure encore mieux si on est au premier rang pour se la prendre. Cela fait trois fois qu’on voit ce "super-groupe" normand où on retrouve Helmut de La Maison Tellier au chant mais en anglais dans le texte et autour de lieu trois guitares électriques qui envoient du lourd : celles de Raoul Tellier, David Faisques (aka Darko ) et Sébastien Miel et une section rythmique avec Cédric Kerbache à la basse et un batteur est qui est loin d’être inconnu : Mathieu Pigné est désormais aussi derrière les futs pour la Maison Tellier.

Evacuons direct la question qui semble tout naturelle avec trois membres d’un même groupe sur scène dont le frontman, Animal Triste ça ne sonnerait pas un comme la Maison Tellier ? Eh bien pas du tout ! Là où La Maison Tellier puise aussi dans la chanson française, offre une variété d’atmosphères et d’approches stylitiques très variées, est marquée aussi par la présence de la trompette de Frédéric Aubin, Animal Triste est résolument rock, très très rock, sombre, explosif et fiévreux. Un concert d’eux c’est une alternance entre pénombre où on ne devine que les silhouettes des musiciens et flashes de lumière qui les noie dans un blanc aveuglant, un long tunnel dans le noir éclairé "stroboscopiquement" façon Lynch, un accélérateur à particules musical où s’enchaine non-stop les déflagrations, les collisions, un chaos contrôlé, piloté par Helmut Tellier qui est tout aussi captivant et convaincant en anglais. L’expérience se vit d’une traite et vous laisse légèrement ahuri, tandis que l’adrénaline et l’euphorie retombe. Le nom est chouette mais quand même trompeur : Animal Triste est une des choses plus excitantes et réjouissantes que vous pouvez sur une scène en France en ce moment. Et leurs disques ne sont pas en reste alors si ce n’est pas déjà fait, on ne peut que vous recommander de vous y intéresser !

Arka’n Asrafokor

Un groupe de métal africain, voilà le genre de propositions qui nous rendent curieux et nous font apprécier le MaMa et les nombreuses prises de risque de sa programmation par rapport à un festival "classique". Encore tout chamboulé d’Animal Triste, cette fois-ci on se dirige tranquillement vers la Machine du Moulin Rouge et le groupe a déjà entamé son premier titre alors qu’on s’enfonce dans le sous-sol de cette salle parisienne, haut-lieu du metal et du rock live quand elle s’appellait encore La Loco. Sur scène il sont cinq : guitare- basse-batterie qui jouent un metal puissant mais plutôt classique à un volume tellement élevé que le guitariste est obligé de demander qu’on place son ampli juste à côté de lui pour qu’il puisse s’entendre, cachant du même coup un batteur qu’on ne verra pas. Il y a aussi un chanteur dans un style un peu "fusion", il ne rappe pas vraiment mais il a un flow et un style qui font plus metal "moderne" (enfin la fusion c’était dans les années 90...) et surtout un percussionniste qui vient amener des sonorités de musique africaine dans le giron du groupe.

On aurait aimé que la contribution de la musique africaine soit un peu plus importante que cela, au final le mélange oscille entre 80% et 90% de metal classique mais quand même que ce soit la chaleur de la voix du guitariste quand il est pas en mode scream, les fameuses percussions ou les "gimmicks" de la fusions, Arka’n se révèle quand même attachant et capable de garder notre attention de morceau en morceau alors qu’on est habituellement pas très fan de metal surtout d’inspiration "old school" ( double pédale, solo en tapping), c’est donc déjà une belle performance qu’ils arrivent à nous faire rester devant la scène. Le reste du public lui adhère sans réserve, danse avec le groupe dans les premiers rangs, écoutent attentivement un peu plus loin, avec assez peu de gens qui ont le "look" metal, le pari semble donc réussi pour ce groupe à la formule certes moins originale que ce qu’on imaginait mais clairement détonant par rapport à ce qu’on a l’habitude d’entendre dans le genre.

The Pyschotic Monks

C’est aussi à la Machine que s’achève pour nous ce premier jour du MaMa 2022, avec donc moins de concerts que d’habitude mais ça a été un régal de bout en bout et on est monté progressivement en intensité. C’est avec les Psychotic Monks qu’on a choisir de finir la soirée, troisième groupe français du jour et pas vraiment une prise de risque pour nous : cela fait quatre ans qu’on les a découvert à Rock en Seine et depuis on est au moins trois ou quatre matelots à vous en avoir fait les louanges en live. Sur disque, le groupe se fait un peu attendre après un deuxième album sortie en 2019 (certes le covid me direz-vous...) Le groupe est aussi un des rares frenchies à voir eu l’honneur de figurer dans les sessions KEXP et il semble donc s’exporter avec succès, ce qui n’est pas évident pour le rock français et encore plus sa composante indé, même si les formations de qualité ne manquent pas bien sûr.

La dernière fois que Le Cargo ! a croisé la route des Psychotic Monks c’était en juillet dernier à Petit Bain, les mots de Renaud résument très bien l’expérience qu’on a vécue à la Machine, qui elle-même fait écho aux autres concerts d’eux qu’on a vécus. Ils sont toujours quatre , aligné sur la même ligne sur le devant de la scène, la batterie au centre, entourés de machines, synthés, pédaliers, ce qui donne un côté un peu laboratoire expérimental à la scène. Chaque musicien a un look très différent : le batteur pourrait sembler sortir d’un groupe de metal viking mais il a un t-shirt avec une licorne dessus et des paillettes sur le visage , le claviériste-bassiste est en pantalon-chemise avec un petit veston, à droite un des deux guitaristes, Arthrur avec un look androgyne/goth, à gauche l’autre guitariste, Clément a un côté plus glam à la "Bowie".

Aucun d’entre eux n’est le "leader" du groupe : si en 2018, on avait l’impression que Arthur pouvait assumer ce rôle, la musique de Psychotic Monks et leur prestation scénique a évolué depuis vers une forme encore plus radicale, où ils sont quatre à assumer tout à tour le chant lead avec tous quelque chose de for,t de touchant dans la voix. Toute forme de "chanson" au sens classique du terme a disparu depuis longtemps pour laisser la place à de longues progressions musicales où l’on ne cherche plus un ordre, une narration couplet-refrain mais où on se laisse porter pas les sensations, malaxer, écraser par les les vagues puissantes qui alternent avec des paysages désolées, des brouillards inquiétants des sonorités plus industrielles, où on ne sait plus qui est guitare ou clavier.

Animal Triste avait déjà mis la barre très haut mais on doit dire que dans un genre qui n’est pas non plus le même, Psychotic Monks, sans que ce soit une surprise en plus, nous a encore plus retourné, nous a donné pendant tout un concert cette impression d’être complètement ailleurs, de vivre quelque chose d’exceptionnel, de vraiment différent. On attend maintenant de voir comment le groupe va réussir à faire tenir ce qui relève d’une expérience mystique dans un album, ça ne va pas être une mince affaire mais il ne leur manque peut être plus que ça pour passer au stade d’après.

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