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publié par Nikola Kesic le 16/12/04
Girl Next Door - Luke Greenfield
Luke Greenfield

Cycles

Il est intéressant de constater que le cinéma - Américain, dans le cas présent -, fonctionne par cycles voire par décennies et les deux genres que sont la comédie et le film d’horreur en sont les preuves les plus flagrantes. Les années 80 ont vu fleurir des comédies en phase avec la jeunesse américaine, grâce notamment (certains diront essentiellement) à John Hugues qui de 1984 à 1989 fit évoluer les personnages de ses films en les faisant passer de l’adolescence (Breakfast Club, Ferris Bueller) à l’âge adulte (Un ticket pour deux, La vie en plus). Non content de s’être imposé comme référence du teen-movie en appliquant un traitement sérieux et nuancé à un genre qui avait plutôt tendance à cligner lourdement de l’œil au public, il décida en 1991 après un dernier film (la petite arnaqueuse) de mettre un terme à sa carrière de réalisateur, ayant bouclé la boucle et n’ayant plus rien à dire sur le sujet (ou en tout cas, se contentant de le faire désormais en tant que scénariste et producteur). Parallèlement à ça, le film d’horreur connut ses heures de gloires grâce au slasher-movie, en mettant en scène des croque-mitaines venus punir - souvent pour cause d’adultère - la jeunesse américaine (Halloween, Vendredi 13, la série des Freddy).

Nouvelles références

Puis, la tendance changea. Ne parvenant pas à se renouveler et se libérant cinématographiquement parlant d’un certain puritanisme qui laissa libre cours à tous les excès, arrivèrent les nouvelles références (sic) qui permirent d’atteindre des abysses contradictoirement salvateurs (il faut descendre pour rebondir). L’irrévérence innocente des comédies « d’antan » laissèrent la place à la vulgarité assumée et brandie en guise d’étendard par une génération shootée au South Park et autres Dumb & Dumber. La série des American Pie finissait de glorifier cette crétinerie de bon aloi. Quant au 1er degré pourtant appréciable des films d’horreur de l’époque, il fit peu à peu place à un cynisme teinté de moquerie qui atteint son apogée avec la série des Scream, phénomène de société qui pouvait se targuer de faire bouffer la soupe dans laquelle il crachait avec un dédain suffisant. Cet énorme gloubiboulga atteignant les confins de la schizophrénie en confondant les genres dans les parodiques Scary Movie ou encore Sex Academy (au titre original beaucoup plus parlant de Not Another Teen Movie) .

Le vent tourne

Ces derniers temps, on sent que le vent tourne. Le cinéma horrifique retrouve paradoxalement du sang neuf grâce à de nouvelles icones (Jeepers Creepers 1 et 2), mais aussi en remakant des classiques du genre. Massacre à la tronçonneuse, l’Armée des morts (bientôt Amityville) qui loin d’être que de simples copies, proposent une relecture intéressante, certainement moins profonde mais assurément honnête (autant qu’une opération mercantile puisse l’être en tout cas). La comédie quant à elle, retrouve les voies de la comédie familiale sans que cela tourne obligatoirement à la niaiserie confondante, comme le montrent les petites réussites que sont Freaky Friday et 30 ans sinon rien. L’arrivée de Girl next door, ne fait que confirmer cette tendance.

Film initiatique

En plongeant le spectateur dans la situation typiquement fantasmatique de l’adolescent timide confronté à une bombe sexuelle qui va le faire sortir de son carcan, le réalisateur nous livre un petit film initiatique sur l’accomplissement de soi (au sein du film et de sa thématique en tout cas). Le scénario, même s’il est prévisible dans ses grandes lignes, se permet des extravagances savamment ficelées. Et surtout, il évite les écueils de la grossièreté et de l’humour gras avec une toile de fond ( le porno) pourtant propice à bien plus qu’un fourrage de tarte aux pommes. Le casting est à l’image du film ; sexy : Elisha Cuthbert (pourtant à baffer dans la série 24 heures chrono) est mignonne à croquer ; nuancé : Timothy Olyphant campe un personnage ambigu à souhait. ; frais : Emile Hirsch, avec sa bouille à la Leonardo di Caprio et son jeu en retenue est la révélation du film. Et c’est là que réside l’essentiel de la réussite du film, dans la crédibilité des personnages au sein d’un genre qui a tendance à les caricaturer ces dernières années. Une manière de dire que l’on peut s’adresser à la jeunesse (Américaine en particulier) sans pour autant la gaver d’un fast food cinéma et lui éviter ainsi le systématisme d’un MTV sur grand écran.

Sortie France : 29 Décembre 2004

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publié par le 16/12/04