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publié par gab le 04/01/08
elliott smith
- new moon
new moon

Comme on le mentionnait fort à-propos il y a quelques jours chez son collègue folkeux de la plus belle espèce et compagnon d’infortune Nick Drake, l’année 2007 s’achève sur un constat d’excellence posthume des plus troublants. C’est peut-être nous mais les fonds de tiroirs ne semblent plus être ce qu’ils étaient. Il n’y a pas si longtemps quand on voulait se faire de l’argent sur le dos des morts, la technique consistait au choix à saupoudrer savamment les compilations annuelles d’un petit inédit de derrière les fagots, ou alors à sortir un énième cd de concert avec toujours les mêmes morceaux dans les mêmes versions, ou enfin à aller racler tous les fonds de bandes sans intérêt pour réunir péniblement douze titres que l’artiste avait en général mis de côté pour de bonnes raisons, quand ce ne sont pas des versions alternatives, démos ou encore inachevées des futures chansons des albums officiels. En résumé, la galette posthume a 99% de chances d’être remisée au grenier dès l’écoute inaugurale et ce sans regrets particuliers.

bandoulière

Tout comme pour l’album de Nick Drake, c’est donc méfiance en bandoulière qu’on se procure le New moon d’Elliott Smith. Et tout comme pour Nick Drake, le soulagement est à la hauteur de la crainte. à vrai dire, l’angoisse était pire dans le cas présent puisqu’on restait sur la déception du précédent album, déjà posthume, dans lequel on n’était jamais vraiment parvenu à rentrer. Et c’est bien connu, plus on avance dans le posthume, plus ça sent l’enclume. Voila, pour toutes ces raisons et sûrement un bon paquet d’autres, c’est tremblants qu’on aborde ce double album composé uniquement de titres d’Elliott Smith datant de ses débuts, d’avant la renommée que lui apporteront le film Will Hunting et Either/or. Et déjà, en quelques mots tout est dit. Ce ne sont pas les chutes d’albums époque « connu », ce ne sont pas la petite dizaine d’instrumentaux et d’ébauches de morceaux, non, ce sont 24 titres achevés (à une ou deux exceptions près, et encore ce n’est pas frappant à l’écoute) qui se sont retrouvés mis à l’écart, comme nous l’explique le livret, plus car écrits et enregistrés dans une période de vaches maigres que pour un quelconque jugement de valeur négatif, notre homme étant simplement passé à d’autres morceaux au moment d’enregistrer ses albums.**

or

Ceci nous amenant à l’autre grande raison de notre réjouissance, ayant toujours préféré la période Either/or (en débordant sur le tout aussi bon XO) à ses derniers albums, la nouvelle d’un double album composé exclusivement de morceaux de cette première époque (entre 1994 et 1997) ne pouvait qu’exciter nos conduits auditifs déjà passablement en émoi. Et au final, pas de révolution certes, mais du bel ouvrage, du beau Elliott Smith comme on aimerait en découvrir plus souvent. Idéalement alignés sur les deux disques, les morceaux touchent comme il faut, comme il savait si bien le faire de ces ballades reconnaissables entre mille par leur jeu de guitare caractéristique et cette voix toujours doublée et si douce. Le premier disque contient les morceaux les plus enlevés (pour de l’Elliott Smith, s’entend, cela reste très relatif) avec notamment un sublime "High times" dont la progression, la montée en intensité force l’admiration. Clairement un de ses morceaux les plus réussis tous albums confondus. Le deuxième cd est quant à lui plus intime, plus vacances en Bretagne, plus vent marin ... on met plus de temps à vraiment rentrer dedans mais une fois qu’on y est on a peu de chances de s’en faire déloger. Il touche profondément tout simplement.

mesure

C’est forcément sur des albums comme celui-ci qu’on mesure pleinement la grande perte qu’est la disparition d’Elliott Smith et ce même si ses derniers albums sont moins transcendants à notre avis. Mais quand on tient quelqu’un capable d’écrire et d’interpréter des chansons aussi bouleversantes, si intimes pour autant de personnes, on peine toujours à le laisser partir. Or avec ce New moon, il part cette fois de la plus belle des façons. Donc s’il vous plait les ayant droits, si vous le voulez bien, restons-en là.




** après relecture soignée du livret, ce n’est pas tout à fait vrai, 7 ou 8 morceaux présents ici ont en fait été écartés de l’album Either/or pour raison de surplus d’enregistrements, notre homme avait 20 morceaux de disponibles pour 12 places et les choix furent visiblement difficiles à faire.

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publié par le 04/01/08