projecteur
au début j’avais pensé à commencer ma chronique avec quelque chose du genre : « on se connaît maintenant depuis longtemps, alors je peux vous faire une confidence... », puis je racontais comment à la première écoute de cago j’avais été déçu par ce nouvel album des dead man ray... mais heureusement je me suis vite aperçu, dans un de mes rares moments de lucidité, combien ce début faussement familier était véritablement grotesque - bon faudrait pas que je relise toutes les chroniques qui n’ont pas été écrites dans ces rares moments de lucidité ! il faut aussi avouer que l’envie d’écrire quelques bafouilles fatalement hilarantes autour de la similitude entre le titre du nouveau dead man ray et le nom du fabuleux site que vous consultez en ce moment même m’a plus qu’effleurée. des petites choses du genre : « ils ont été obligés de retirer le r de cargo par peur du procès » mais là encore.... alors que dire, que dire de ce cago qui m’avait effectivement déçu à la première écoute car apparu comme assez fade... dire, à tous ceux qui ont eu la même impression que moi, que l’on peut très certainement trouver un médecin qui nous fera un prix de groupe et que si on s’y met tous ensemble on aura une petite chance de sortir... en remettant quand même cago sur la platine, ne voulant croire qu’un album des dead man ray puisse se ranger aussi vite dans un placard, je me suis retrouvé aussitôt happé. tout ce que je n’avais pas ressentit ou compris à la première écoute se révéla, presque miraculeusement ( !), dès le premier morceau, "landslide". le piège se referme et l’album se glisse en vous, s’insinue et se pose délicatement pour se nicher tout au fond de nous. en écoutant cago, on se dit qu’à la fin, après la dernière note, on pourrait presque entendre le bruit d’un projecteur 35mm.
cinéma
les dead man ray vous emmènent dans leur univers. c’est une banalité que l’on utilise souvent et pourtant, en lisant et relisant cette chronique, je me disais que rien ne leur correspondait mieux. un univers de sons, d’images, de sensations, où se mêlent la pop, le rock, le cinéma et bien d’autres choses encore. car il n’y a pas de frontière pour les dead man ray et daan stuiven en tête. quand nous l’avions rencontré pour cargo il nous disait : « la musique est une façon de travailler très proche de l’image et du graphisme. on peut utiliser une couleur ou une police de caractère comme un son, sur dead man ray on construit nos morceaux d’une façon très proche du travail d’un graphiste. c’est une façon de voir les choses comme un tout, un ensemble. mais cela se fait de plus en plus, aussi parce que c’est de plus en plus facile techniquement. aujourd’hui tu fais tout sur le même ordinateur, l’enregistrement du disque, la pochette et même le montage de ton clip... ». daan s’est d’ailleurs replongé dans son travail premier, le graphisme pour réaliser le superbe package de cago (et c’est sûrement lui qui a aussi travaillé sur le très beau site du groupe).
albini
en même temps, cette fois ci les dead man ray ont quand même mis steve albini derrière leur ordinateur (en fait steve albini travaille plutôt en analogique qu’en numérique, ce qui explique pas mal de choses...) et encore une fois on doit s’incliner bien bas devant le travail hallucinant de monsieur albini. mais tout le monde n’a pas un steve albini chez soi ! pour trap le précédent album des dead man ray on pouvait lire dans la chronique du cargo : « on peut écouter cet album en boucle, il est si riche, si profond que l’on y découvre de nouvelles idées tout en se laissant avoir à chaque nouvelle écoute par les rythmes captivants (...) ». ce qui est toujours vrai aujourd’hui pour trap est aussi d’actualité avec cago. et si il y a un secret à percer, à mettre à jour chez les dead man ray, c’est peut être celui là. comment après des dizaines, des centaines d’écoutes de "crossfades" ou de "short term investments" on reste charmé par la classe incroyable de cet album, envoûté et parfois ému par ces guitares magnifiques, par cette voix aussi douce que mélancolique... oui les mélodies sont imparables et c’est vrai les arrangements sont souvent géniaux (un peu moins barrés que sur trap, quoi que quand on écoute "blue wolswagen 10 :10 am", on peut se demander) et personne ne contredira le fait que ces 4 mecs n’utilisent pas vraiment leurs instruments comme on peut l’apprendre dans les écoles de musique. mais tout cela ne constitue pas une réponse en soi. y a-t-il besoin de réponses, y a t’il vraiment à se poser la question. les dead man ray sont aussi généreux qu’ouverts sur le monde, cela ne fait aucun doute. leur univers extrêmement ciné génique ("things that will happen again" en tête) nous devient familier dès les premières notes, on s’y sent bien. ils composent dans leur coin en toute discrétion (trop d’ailleurs car dans un monde meilleur il devrait être en tête de tous les hit parade) des albums qui resteront pour longtemps parmi ceux qui nous donnent envie de continuer à faire vivre ce cargo. mais tout cela ne sont que quelques remarques glissées dans le coin de la toile, tout cela reste bien peu par rapport à un album comme cago, par rapport à ce qu’il nous apporte, à ce qu’il nous fait vivre.