ou la coupe du monde supporteur
Une coupe du monde supporteur, ce n’est pas si loin d’une coupe du monde joueurs, ça se gagne sur la longueur …
Prenez, par exemple, les matchs de préparation. Il faut rôder l’équipe, faire tourner les effectifs, vous êtes sélectionné pour regarder France-Mexique, sur le banc pour France-Danemark, du coup vous avez la gniak pour France-Chine et vous exultez lorsque Cissé se prend les pieds dans le gazon. La jouissance est longue et bruyante ("alalalala putain, regarde moi ça, ça doit faire maaaaaallll ! … putaaaaaaiiiiinnnn !") mais laisse un petit goût amer quand votre partenaire télé en redemande (15e ralenti sous un angle différent de la jambe qui se plie puis se déplie à mi-chemin entre le genou et la cheville, soit pas vraiment au bon endroit) et que vous êtes complètement vidé. Enfin bon, vous sortez indemne de cette phase de préparation, c’est bien là l’essentiel, vous êtes prêts pour le "real thing".
Mais avant de s’engager à froid comme ça dans un tel marathon (3 matchs par jour, claquage garanti) il faut gérer sans encombres les quelques jours de haute tension qui précèdent l’événement et pour ça rien de tel que d’intensives séances d’entraînement afin de faire monter l’équipe en puissance. Le staff technique s’affaire donc : installation du PC, lancement de Fifa 2002 (pour les incroyables commentaires d’Olivier Rouyer), sélection de l’équipe du Tadjikistan et roulez jeunesse … n’oubliez pas de soigner le goal average (prononcez goal "à vérage"), c’est bon pour le moral.
Et puis ça y est, c’est parti pour un mois, vous proposez au cargo de couvrir l’événement pour avoir des places gratuites devant votre téléviseur (on est comme ça au cargo) et vous piochez dans la liste des matchs à disposition. Ensuite c’est tout pareil qu’avec les albums, il y en a pour tous les goûts ! On retrouve bien sûr les grosses pointures qu’on attend avec impatience et qui ne nous déçoivent jamais (genre Brésil ou Radiohead). Des équipes qui même dans un match moyen réussissent toujours à glisser quelques perles (ce but magistral de Kakà). Sont présentes aussi les grosses pointures qu’on suit historiquement mais qu’on sait ne plus être vraiment au top et dont le jeu se ramollit franchement (la France ou l’Angleterre, Placebo et ses petites recettes). On sait que le match sera moche mais on le regarde quand même en espérant une petite étincelle, sait-on jamais … Plus nombreuses sont les équipes de milieu de tableau dans lesquelles on place nos espoirs et qui risquent le plus de nous décevoir (euh … en foot finalement il n’y en a pas tant que ça et en musique il y en a beaucoup trop donc on passe …). N’oublions pas non plus les équipes dont on n’a rien à faire mais qu’on regarde quand même sans trop savoir pourquoi (le match Pays-bas-Serbie, franchement … Evanescence et son goth-o-lament ?). Le pire étant qu’on y trouve des choses intéressantes et qu’on y prend presque du plaisir. Toujours présents dans les grandes occasions, on a les ennemis héréditaires au jeu froid et sans âme (l’Allemagne évidemment tout comme Dire Straits hélas). Ennemis pour lesquels il faudra nous attacher "à la" Orange mécanique, les yeux exhorbités, pour qu’on daigne écouter/regarder la chose. Enfin, last but not least, on découvre les petits poucets, les indépendants (les vrais), quidams atterris là un peu par hasard et qui nous emballent méchamment par leur fraîcheur et l’espoir de les voir réaliser des exploits impossibles (les Trinité & Tobago ou Australie, les Perth, Bishop et autres petits groupes chroniqués ici même). Pour eux, le cœur bat fort, on s’emporte aussi, tout en sachant que leurs chances de passer sont quasiment nulles.
Tout ça pour dire quoi déjà ? Ah oui, une coupe du monde supporteur ça se gagne sur la longueur … Et à part des brésiliens aguerris (on en côtoie au boulot), il y a peu de chances que vous puissiez tenir les 8 matchs du week-end sans faiblir. Il faut donc s’économiser (répétez après moi). Et il faut surtout économiser votre entourage, préserver votre couple, en un mot gérer le temps, les matchs, l’envie. C’est pas rien … c’est même un boulot à plein temps.
Hier soir, donc, Allemagne-Pologne (match rugueux en perspective), l’occasion rêvée de faire une pause footballistique, de recharger les batteries, de souffler un peu, de regarder un petit dvd avec votre moitié par exemple … mais attention ! La vie fourmille de pièges en tous genres qui vous guettent ici ou là, tapis dans l’ombre. Le plus classique se présentant lorsque vous éteignez le lecteur dvd et que la télé repasse en mode foot (Tf1 ou M6) toute seule (la saloperie !). Des images de pelouse et de bonzommes en sueur vous assaillent violemment et viennent titiller vos sens qui n’en demandent pas tant. Là il faut être fort, garçon, tu peux y arriver (un œil sur le score discrètement, 0-0), tu vas y arriver … schplok.
Tu as appuyé sur l’interrupteur. Incroyable ! La guérison est proche (ne nous emballons pas), on retente l’expérience ce soir ?
C’est quoi comme match ? Suède-Paraguay … Allez c’est faisable …
C’était Goob en direct d’on ne sait trop où … pour le cargo !
Et pendant ce temps là, l’Australie est toujours en tête du groupe F, yay !
tssss tssss !!