Mon dernier concert de David Gilmour c’était au palais des Congrès en 2002, c’était mon premier en place assise je crois. J’étais un gros noob de ce genre d’évènements et je me suis retrouvé tellement au fond qu’il fallait des jumelles pour espérer voir ce qui se passe sur scène. Plus jamais ça. Alors quand j’ai su que David Gilmour jouait une date unique en France au théâtre antique d’Orange, j’ai fait taire tout bon sens et j’ai pris la place la plus chère possible. Et pendant des mois j’ai pensé à mon tête à tête à venir avec celui que j’appelle parfois, avec une familiarité affectueuse, Dieu.
Avance rapide jusqu’au 17 septembre 2015, me voilà dans ce mythique théâtre avec le monstre sacré et sa dizaine de musiciens, sauf que j’ai mal au cul et que j’aurais bien besoin de jumelles.
Le grand n’importe quoi
Tout avait pourtant si bien commencé... déjà simplement réussir à avoir une place par Internet ça n’a pas été simple... et puis en prenant la meilleure place disponible dans la catégorie la plus chère, un 16ème rang qui sur le papier semblait tout à fait honorable je pensais sincèrement pouvoir apprécier le concert "décemment".
Sauf qu’à partir de mon arrivée sur la place du théâtre à Orange (jolie petite ville tranquille... sauf quand elle est envahie par des milliers de fans de rock) ça a été du grand n’importe quoi : au début on a l’impression d’avoir une file immensément longue qui fait plusieurs fois le tour de de la place qui est plutôt grande. Et en fait non... il y a 4 files très longues et chaque personne à qui on demande nous dit d’attendre à un endroit différent. Des panneaux sont positionnés aux entrées mais impossible de comprendre le rapport avec ce qui est indiqué sur le billet. A la fin on abandonne et on prend une file au pif... on a bien fait, l’organisation a pris tellement de retard que la fouille est devenue sommaire et peu importe la zone marquée sur le billet.
A l’intérieur c’est encore pire : quand les gens sont installés il est quasiment impossible de repérer sa place seul, les marches des allées sont raides et parfois défoncées. Un mec de la sécurité à bout nous gueule dessus, peu importe qu’on ait payé plus ou moins cher, il nous dit de nous placer où on peut. Pas moyen mec. Je passe derrière discrètement pour tenter l’allée suivante. Je monte. 5ème rang, c’est déjà haut, à 10 on est bien loin de la scène et je me dis que c’est pas possible.... une placeuse me confirme que 16 c’est bien plus haut encore.
Loin des yeux
Enfin me voilà installé, à côté d’un couple de soixante-huitards qui fument de l’herbe et sont venus avec leur fille, trentenaire que je trouvais plutôt sympa et mignone jusqu’à que le concert commence et qu’elle se mette à alterner hurlements et commentaires plein de sens du genre "ouh c’est bon ça" ou encore "c’est ma chanson". Devant une femme filme le concert en entier avec son reflex, sur l’écran on voit que son image est complètement crâmée et que ça va être irregardable mais son endurance est remarquable, j’espère juste qu’elle en a profité quand même du concert dans le petit écran....
Près du coeur
Et Puis le soleil se couche sur Orange et commence une belle nuit d’été, fraîche juste comme il faut, je me penche en avant pour gagner quelques centimètres pyschologiques pour mieux voir et moins ressentir la présence de mes voisins, Gilmour entame le concert avec des titres de Rattle That Lock, 5 AM pas extraordinaire en soi, mais on est juste ému d’être là, d’entendre cette guitare qu’on adore en live et d’avoir l’image avec. Certes on aurait aimé être plus près mais on voit quand même distinctement les musiciens et ce qu’ils font et surtout le cadre du théâtre antique se prête infiniment mieux à cette grand messe qu’un palais des Congrès. Rattle That Lock, la chanson, qui est une bonne chanson en faiot si en tant que français on oublie c’est d’abord ce fameux doum dam doum de la SNCF qui vous annonce que votre train est en retard et que vous allez galérer.
Et puis arrive Wish you were here, entendue des milliers de fois, la ballade où tout le monde chante et pourtant là encore ça touche au coeur parce que c’est notre wish you were here ce soir et là on est happé quasiment jusqu’à la fin du concert, qui se déroulera en deux parties, mélangeant systématiquement des titres de Gilmour et des classiques de Pink Floyd. Evidemment on préfère High Hopes ou Us And Them mais la petite troupe de musiciens réussit à faire vivre les deux répertoires sans que l’excitation retombe sur le non-Floyd.
Sur un nuage
Sur la durée, on ne peut pas dire non plus qu’on soit lésés, le concert se déroule en deux mi-temps bien remplies puis en rappel « Comfortably Numb », l’apothéose du concert, où cerise sur le gâteau la partie la plus jeune du public envahit le carré VIP et le devant de la scène, on suit le mouvement et on a la chance d’être au premier rang à quelques mètres à peine de David Gilmour pendant qu’il exécute le solo mythique qui clôture le morceau.
Et là on est au comble du bohneur, on est sur un petit nuage dont on ne redescendra pas avant le lendemain en reprenant le train pour retrouver le monde normal.