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publié par Mickaël Adamadorassy le 06/02/12
Sherlock Holmes - Guy Ritchie
Guy Ritchie

Dès les premières images, Jeu d’ombres, le cru 2012 du Sherlock Holmes façon Guy Ritchie évoque indéniablement le millésime 2010 du même réalisateur. On ne change pas une équipe qui gagne me direz-vous ? Certes mais alors que l’effet de surprise était pour beaucoup dans la tenue en bouche du premier, il est forcément disqualifié d’office pour le deuxième. Pour le meilleur ou pour le pire ? Et l’auteur de cet article arrêtera t’il les métaphores filées sur le vin alors qu’il n’y connaît rien ? la réponse tout de suite.

botaniste en perte de vitesse cherche franchise

Mais replaçons-nous dans le contexte du premier Sherlock de Guy Ritchie : les cultissimes Snatch et Arnaques, Crimes et Botanique qui avaient fait la réputation du réalisateur étaient déjà loin en 2010 et depuis rien d’aussi enthousiasmant de sa part, à tel point qu’on l’avait un peu oublié le Guy. Alors quand on nous annonce qu’il revient avec un reboot de Sherlock Holmes hum... ce n’est pas vraiment là qu’on l’attendait, à moins d’imaginer un Sherlock Holmes tirant son génie de la consommation de cannabis et autres substances.. et donc on y allait sans grand espoir et pourtant... ça marche !

Et pourquoi est-ce que ça marche ? le miracle tient essentiellement au duo (ou au vieux couple ?) que forment Robert Downey Jr. (Holmes) et Jude Law (Watson), la relecture irrévérencieuse, drôle et musclée qu’ils donnent aux personnages de Conan Doyle. Associé à un scénario très correct, une image bien léchée et une réalisation pêchue typique de Ritchie et quelques gadgets sympathiques tels que la "Holmes Vision" (aka l’effet de caméra qui fige l’action pendant que Holmes analyse la situation et les points faibles des méchants avant de les démolir en un éclair), ça donnait un film très bien mené, jubilatoire parfois et tellement plus intéressant qu’une adaptation au pied de la lettre.

C’est dans les vieux pots

Jeu d’Ombre reprend très exactement la même formule, et pendant un temps ça fonctionne, parce qu’on s’amuse autant que dans le précédent avec le Sherlock excentrique de Robert Downey Jr, mais ce plaisir des retrouvailles s’essoufle vite, le duo Downey-Law a quand même beaucoup perdu de sa fraîcheur et les protestations d’un Watson bientôt marié et soit-disant retraité peinent vraiment à convaincre. On le sent d’ailleurs très passif dans cette aventure-là, une sorte de Murtaugh fatigué, qui nous gratifie régulièrement l’équivalent années 1900 du fameux "I’m gettin too old for this shit" (dans son cas ça serait plutôt "I’m gettin too married for this shit")

La “Holmes Vision” a elle complètement perdu l’attrait de la nouveauté et là où on avait été bluffé dans le premier où elle était l’expression du sens déductif du détective, on aurait plutôt tendant à se demander la valeur ajoutée dans le deuxième où elle sert juste le spectacle... sauf que cet effet est devenu plutôt cliché... heureusement elle n’est pas présente très souvent.

Visite guidée

Malgré ce manque d’inspiration, le film aurait pu encore être d’un bon niveau, pour le Sherlock de Robert, pour la réalisation qui reste du bon côté du "flashy" , le plus souvent, mais reste le vrai gros problème : le scénario ou plus exactement le parti-pris qui consiste à dire que le plan final de Moriarty est tellement compliqué que ce n’est même pas la peine de nous appâter avec du mystère et de l’enquête, en fait le film commence avec Holmes qui a reconstitué la plupart des tenants et des aboutissants de la machination, une énorme pieuvre dont les tentacules s’étendent sur toute l’Europe avec des crimes apparemment sans rapports et une série d’attentats à la bombe visant la France et l’Allemagne qui met les deux nations en ébullition.

Mais on n’attend pas de réflexion de la part du spectateur, il est juste là pour suivre la ballade de Holmes à travers l’Europe pour arrêter Moriarty, on va de scène spectaculaire en péripétie rocambolesque en se laissant porter, c’est un peu la même chose que d’aller d’un point A à un point B en métro, à la fin vous êtes bien au point B du trajet mais de ne pas l’avoir fait à pied, vous ne savez pas vraiment où sont A et B.

Et malheureusement de n’avoir finalement que survoler l’histoire de cette manière, d’y avoir été si peu impliqué, tout cela fait qu’on accueille la conclusion et cet énième exploit de Holmes avec une relative indifférence alors qu’il s’agit quand même de la défaite de Moriarty, le génie criminel, le seul à être capable de rivaliser avec lui (cela dit on peut accorder aux scénaristes que la manière dont Holmes obtient la méthode finale est plutôt bien vue et utilise judicieusement les fameux pouvoirs de déduction de Holmes)

Faire tapisserie

En conclusion, on ne gardera donc de ce Sherlock deuxième du nom que de vagues images d’une scène apocalyptique dans la forêt, et des bruits d’explosion, les attributs d’un divertissement honnête dans lequel surnagera tout au plus le souvenir de Robert Downey Jr déguisé en femme ou en fauteuil. Je ne suis pas convaincu que cela vaille le prix (fort) d’une place de cinéma par contre...

 

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publié par le 06/02/12