accueil > photos > concerts > Chastity Belt

publié par Mickaël Adamadorassy le 17/06/24
Chastity Belt - La Flèche d'Or - 05/06/2024

On a découvert Chastity Belt assez récemment, grâce au titre "Chemtrails", tiré de leur dernier album, Live Laugh Love (un titre - jeu de mots qui rappellera quelques souvenirs de cours d’anglais à certains). Et "coup de bol" le groupe passe justement à la Flèche d’Or en ce début juin 2024.

Pour ceux qui lèvent un sourcil mi-nostalgique, mi-curieux à l’évocation ce haut lieu du rock indé et de la scène française des années 2000-2010, non la Flèche d’Or n’a pas exactement réouvert, elle est gérée par des associations, qui y organisent des évènements dont quelques rares concerts (en consultant l’agenda celui-ci est le seul présent). Ceci explique peut-être le seul point noir de la soirée qu’on va évacuer tout de suite : il a fallu toute la première partie + quelques morceaux de Chastity Belt pour que l’ingé son arrive à faire quelque chose pour la grosse caisse qui sature dans la sono. Si ce genre de son, en moins moche, est recherché dans la musique électronique, c’est juste très désagréable pour le rock et ça vous casse un peu l’immersion. Si la personne derrière les faders n’est pas pro et/ou travaille sur un matériel qui n’a pas du être changé/révisé depuis la fin des concerts vers 2015, on peut comprendre sinon...

Mais revenons à nos moutons ou plutôt à nos brebis : en effet, c’est un quatuor rock classique, 2 guitares-basse-batterie mais en majorité féminin qui se présente sur scène avec au centre Julia Shapiro, principale compositrice du groupe mais on découvre qu’en fait tous les membres du groupe ont leur(s) chanson(s) où elle assure la voix lead, y compris la batteuse Gretchen Grimm, remplacée à ce moment là par Julia, qui est très à l’aise derrière les futs et a l’air aussi un peu peu plus détendue. Si elle est au centre de la scène la majeure partie du temps, elle a souvent le visage un peu caché sous une longue chevelure bouclée blonde et elle chante de toute façon les yeux fermés le plus souvent, avec quelque regards et quelques sourires pour ses "co-équipières". Et pour le public aussi : on sent une forme de timidité, de réserve mais une volonté de quand même surpasser un peu ça. Finalement c’est Annie Truscott à la basse qui assume ce rôle de "front person" * entre les morceaux pour remercier le public (plutôt nombreux pour un groupe pas très connu encore dans un début juin blindé en concerts) et lui adresser quelques mots.

Mais peu importe si les quatres membres de Chastity Belt ne sont pas des bêtes de scènes, elles ont toutes de la présence et dégagent quelque chose de chaleureux et de très amical, une mention spéciale à Gretchen et son t-shirt "Kiss me ’till the cows come home" avec une sympathique meuh-meuh qui a des traces de baiser sur le museau (’till the cows come home est une expression qui veut dire "très très longtemps"). Elles ne jouent pas non plus du rock énervé ou du punk mais du rock indé avec deux guitares Fender qui se mélangent à merveille pour construire des mélodies poignantes, des riffs inventifs ou simplement appuyer un chant très travaillé.

Comme sur disque la musique de Chastity Belt nécessite d’infuser un peu, le concert qui commence avec "Hollow" et "Laugh" du dernier album met un peu de temps à trouver sa vitesse de croisière mais très vite on est complètement immergé dans l’univers du groupe, on goûte toutes les subtilités du jeu des deux guitares, on apprécie le jeu de Gretchen, pas axé sur la puissance mais sur une très bonne compréhension des compositions, avec des breaks, des accents qui appuient parfaitement le chant ou viennent marquer les différentes parties. Sur Chemtrails, on réalise à quel point le roulement de toms évite au morceau malgré une mélodie formidable de sonner comme la ballade mélancolique ultra-prévisible. Comment ce motif rythmique est ensuite repris par le charley, mais pas systématiquement.

C’est quelque chose de récurrent dans la musique du groupe, sur "Tethered", un des titres les plus rocks du disque, on retrouve ces motifs de batterie sophistiqués appuyés par un riff de guitare hypnotique et une belle montée en puissance. Et c’est ce qu’on veut dire par "infuser" : les chansons ne sont pas "démonstratives", elles racontent des histoires avec des couches instrumentales savamment construites, il faut prendre le temps, avoir l’oreille attentive... si on veut être analytique, on peut juste se laisser par le côté toujours très mélodique des titres, juste après ce presque inquiétant "Tethered" vient "It’s cool" et son petit gimmick de guitare qui apporte quelque chose de positif, entrainant, comme le soleil qui revient après un court orage d’été, qui a laissé un peu son électricité dans l’air.

Ce n’était pas gagné d’avance le lendemain d’un concert intense, puissant de Mannequin Pussy avec sa chanteuse charismatique qui ne dédaigne les gueulantes métalleuses mais en un peu plus d’une heure de concert très focalisé sur le dernier album, Chastity Belt nous a ravis, donnant autant de plaisir avec 0 pyrotechnie et 100% de chansons bien écrites et bien jouées, avec quatre musicien(ne)s qui si ielles ne sont pas extraverties savent quand même envoyer le gros son quand c’est le moment et faire vivre leurs compositions en live dans une ambiance tranquille et chaleureuse.

P.-S.

* : Annie utilise le pronom "they/them" en anglais, nous essayons dans cet article de respecter ce choix au mieux, nous estimons que la langue le permet sans l’écriture inclusive en général, sauf pour "iel" qui nous parait être un bon compromis en terme de lisibilité et de respect du choix des individus à définir leur (non)genre. On peut se demander si ielles ou iels ne nous ramènent pas au même problème, si on considère que le masculin l’emporte. Comme iel n’est pas encore un usage codifié, nous estimons qu’il peut bénéficier d’une règle plus moderne et qui a plus de sens : on a choisi ielles parce qu’il y a une majorité de femmes dans le groupe

Partager :