accueil > photos > concerts > Bunbury

publié par Juanlu Fajardo, Natalia Algaba le 14/12/18
Bunbury - L'Élysée-Montmartre, Paris - 12/12/2018

Peu connu du public français, Enrique Bunbury est une énorme rock star dans le monde hispanique et le public qui est venu le voir à l’Élysée Montmartre est un public fidèle et dévoué, souvent la quarantaine ou la cinquantaine, originaire de pays comme le Mexique ou l’Espagne. Beaucoup d’entre eux ont même sorti pour l’occasion leurs vieux t-shirts collector Héroes del Silencio.

Accompagné de son groupe, Los Santos Inocentes, Bunbury monte sur scène au rythme psychédélique de « Supongo », titre de son dernier album Expectativas, sorti en 2017, qu’il présente à travers le monde depuis plus d’an dans son Ex-Tour 17-18. Vêtu d’un costume 3 pièces noir avec le X de Expectativas marqué au dos, des bottes de cow-boy texan et de ray-bans, il prend d’une main le micro, décoré d’un X également et s’approprie la scène en ouvrant grand les bras. Accroché au micro, il commence à se dandiner, faisant hurler le public. Ses trente ans de carrière et la maîtrise de ses gestes sont visibles dès son arrivée ; rien n’est laissé au hasard.

Le concert débute comme son dernier album par « La ceremonia de la confusión ». Los Santos Inocentes ont un son impeccable, avec Ramon Gacías à la batterie, Quino Béjar aux la percussion, Robert Castellanos à la basse et Álvaro Suite à la guitare comme colonne vertébrale de la bande. Enrique prend la parole en anglais pour nous annoncer un concert qui va parcourir ses trente ans de carrière, où de vieilles chansons de son époque comme leader de Héroes del Silencio viendront s’entremêler aux titres d’Expectativas qu’il vient nous présenter en live. Il s’excuse de ne pas parler en français et même si le public lui hurle qu’il peut parler en espagnol, il explique que, par respect de ceux qui ne parlent pas l’espagnol, il parlera en anglais. Ils enchaînent ensuite avec « la actitud correcta » où le saxophone de Santi del Campo et le clavier de « Rebe » prennent le dessus.

Comme annoncé, après 4 chansons d’Expectativas, un jeu de lumières vertes annonce l’arrivée des classiques : « el anzuelo » de son album El viaje a ninguna parte (2004), avec un excellent Jordi Mena à la guitare. Une fois le titre fini, les lumières s’éteignent et le public crie son nom : « Enrique, Enrique… ». Il les remercie et enlève sa veste, montrant ses fins bras tatoués où l’on devine un tatouage de sa période HdS au-dessus d’un tatouage dédié à Bowie. Les guitares électriques annoncent alors le son rock psychédélique de « Despierta », titre de 2013, avec un excellent solo de guitare de Jordi Mena. Bunbury bouge comme un boxeur et s’approprie la scène allant sans cesse à la rencontre de son public à droite et à gauche. Le public chante, il connaît tous les titres, les anciens comme les nouveaux, et Bunbury leur tend le micro en les invitant à chanter « ahora ustedes ».

Le moment est venu pour Bunbury de prendre sa guitare acoustique Gibson pour interpréter des titres rock de son album Hellville de Luxe (2008), « El hombre delgado que no flaqueará jamás » et « Hay muy poca gente ». Son guitariste Álvaro Suite s’approche de lui et on sent une grande complicité entre eux. Le bassiste Robert Castellanos et Jordi Mena s’approchent également. Ils sont tous les quatre devant, face au public, un instant parfaitement orchestré et visuellement sublime. Le public s’éclate, eux aussi. La nuit est magique.

Pour ceux qui, comme moi, ont connu Bunbury depuis l’enfance et ont grandi avec ses chansons, l’annonce des deux titres suivant, deux chansons de 1987, dit-il, fait pleurer de joie. C’est le moment de revenir aux origines, à son album El mar no cesa (1988), aux chansons qu’il n’avait plus chantées depuis les concerts de 2007 où Héroes del Silencio s’étaient reformés exceptionnellement. Il chante le single qui leur a fait connaître un énorme succès en Espagne « Héroe de leyenda » suivi de « El mar no cesa », qui fait monter l’ambiance de la salle qui chante et danse dans une sorte d’euphorie collective.

Le concert continue avec le son frontalier de sa période mexicaine avec « Que tengas suertecita » et « el extranjero ». Jorge « Rebe » sort l’accordéon, Jordi Mena prend le banjo et Álvaro Suite laisse sa Telecaster pour prendre l’acoustique. C’est un moment extraordinaire. Le public chante aussi fort qu’il le peut « ni patria ni fronteras ». N’oublions pas qu’une bonne partie des spectateurs n’est pas né en France, il peut s’approprier les paroles de la chanson comme un hymne.

Bunbury n’a pas menti, il nous emporte avec lui dans ce voyage à travers ses trente ans de carrière et on est ravi d’entendre « Apuesta por el rock and roll », reprise du groupe Más Birras faite par Héroes del Silencio avant de nous submerger dans la mélodie du saxo et du clavier de « Sí », de l’album Flamingos (2002). La fille à côté de moi pleure, quand je vous dis que c’était un concert pour les fans… Après chaque chanson elle hurle : « Grande ! Eres grande ».

Mais la grande surprise était à venir lors de l’ annonce de la dernière chanson : un classique de HdS « Maldito Duende » de l’album Senderos de Traición (1990), un des moments les plus forts du concert. Bunbury descend et va se pencher vers le public qui est heureux de pouvoir toucher son idole, dans une sorte d’hystérie collective.

Ils s’en vont, tandis que le public ne cesse de crier « ¡otra ! ¡otra ! ¡otra ! ». Très vite ils reviennent pour les premiers rappels, Bunbury portant une écharpe blanche autour du cou. Il parle enfin en espagnol : « ¿A qué hemos venido aquí ? » lance-t-il, « ¡¡¡A cantar !!!!! » avant de poursuivre avec « la chispa adecuada » du dernier album de HdS Avalancha (1995) et « Lady Blue » de Flamingos (2002). Ils partent à nouveau mais un deuxième rappel à la demande du public qui crie son nom et tape des pieds sur le sol de l’Elysée Montmartre aura lieu. « Vamos a abrir de par en par el cabaret » annonce-t-il, ce qui veut dire que la salle va devenir un petit cabaret ambulant au son de l’album Pequeño (1999) et de son titre « De mayor ». Enfin, pour dire au revoir et finir le concert, il se met à genoux et commence à chanter « Al final ». Il présente encore les membre de Los Santos Inoncentes qui s’avancent pour remercier le public et saluer comme au théâtre.

« Conciertazo » disent les gens en sortant : c’était un « concert de malades ». Émouvant, mémorable, presque 2 heures de pur bonheur. Bien sûr on aurait aimé plus et plus encore, bien sûr il y a des chansons qui nous ont manqué, mais c’était un excellent résumé de la carrière d’un grand artiste espagnol, de ce jeune garçon qui était sorti de sa Saragosse natale pour conquérir le monde du rock et qui n’a jamais eu peur de changer de style, de se renouveler ou de renoncer à ses racines. Bunbury était énorme, formidable et que dire de Los Santos Inocentes ? j’exagère à peine si je dis que c’est un des meilleurs groupe de rock espagnol, doué d’un professionnalisme et d’un charisme remarquable.

Partager :