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publié par Nausica Zaballos le 09/11/05
Broken Flowers - Jim Jarmush
Jim Jarmush

errance mentale

Jim Jarmush n’a pas son pareil pour filmer l’errance mentale et métaphysique de ses personnages, une fuite, des départs reflétés dans des paysages miroirs de l’âme américaine et de ses clivages. La banlieue proprette mais étouffante, les déserts, ouverture sur le monde, terres d’aventures passées et tombeaux de la mémoire défunte.

Dans Broken Flowers, son dernier vrai film depuis la série de saynètes autour du tabac et du petit noir (Coffee and Cigarettes), Jim Jarmush s’attache à décrire la quête obsessionnelle d’un Don Juan d’une cinquante d’années, interprêté par un Bill Murray magistral d’émotion minimaliste. Don Johnston est un séducteur revenu de tout, affublé d’un patronyme et d’un nom dont il aimerait bien se passer (clin d’œil au héros d’une célèbre série- Deux flics à Miami- qui faisait l’apanage du clinquant dans les années 80).

version noir et blanc

Les premières scènes s’ouvrent sur le départ de Shery, dernière copine à franchir la garçonnière de cette pâle copie don juanesque. Shery est interpêtée par Julie Delpy, notre Frenchy exilée aux USA et Jim Jarmush n’a pu s’empêcher de lui donner un prénom prêtant à un jeu de mot aussi subtil que le parallèle réalisé au début du film entre Don Johnston et son illustre prédecesseur- Bill Murray affalé sur son sofa ne quitte des yeux une version en noir et blanc du drame litéraire de sa vie. Comme la vie se contente souvent d’imiter l’art pour combler l’ennui, Don Johnston va retrouver sens à son existence vie en se lançant dans une quête obsessionnelle aux allures d’intrigue de roman noir.

lettre anonyme

Une lettre anonyme lui annonçant qu’il est père d’un adolescent de 18 ans va lui faire remonter la route du passé. Epaulé par son voisin et unique ami, un jeune père éthiopien et heureux qui rêve de se transformer en Sherlock Holmes, Don Johnston part à la recherche du temps perdu et des femmes qui ont jalonné sa carrière de séducteur. Le désir de paternité, absent au début du film et moteur de la rupture entre shéry et Don, devient la raison de vivre permettant au séducteur fatigué d’assouvir son désir d’immortalité et d’éternelle jeunesse.

plus ou moins drôles

Là, le scénario et l’ambiance se gâtent. Suit une sucession de rencontres plus ou moins drôles et tragiques avec les exs de sa vie. Jarmush se livre à une critique acerbe des représentants de la petite bourgeoisie américaine. Cependant, le spectateur a l’impression de contempler une série de copier-coller dont le casting semble le seul véritable intérêt. Rencontre avec une lolita en manque de père et une veuve joyeuse jouée par Sharon Stone, repas gêné avec un ex-hippie devenue l’épouse d’un promoteur immobilier cupide et vulgaire ( la mère de famille de la série Six Feet Under), tentative de reconquête d’une ex-avocate -Jessica Lange- devenue psychologue pour animaux et selon la lecture du spectateur, lesbienne hype et compagne de sa jeune secrétaire.

quelques bonnes surprises

Quid de l’enquête ? Vous le saurez en allant voir le film qui réserve quelques bonnes surprises quant aux indices disséminés ça et là : à la fin de la séance, chacun pensera connaître l’identité de la mère ou d’affabulatrice... Le tour de force de Jim Jarmush, outre les questions que le film pose au sujet de la paternité et des illusions de jeunesse, est d’avoir envisagé une fin ouverte qui permet au spectateur de jouer à son tout l’enquêteur et de compatir à la solitude de cet homme sans racines, sans femme, sans fils, sans passé... Broken Flowers renvoie chacun d’entre nous à ses rêves de jeunesse, au reniement des passions qui guette tout individu accordant plus d’importance aux modes et concepts de l’époque au détriment de la rencontre avec l’autre qui permettra de fonder une famille ou tout au moins de s’enraciner et de continuer à grandir.

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publié par le 09/11/05
Derniers commentaires
lilio - le 23/12/06 à 22:23
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Nous sommes le 23/12/06, il est 22h22, et je viens de me mater un film avec lequel je pensais passer un bon moment. Ras le bol de ces films d’intello qui ne veulent rien dire sauf les crises d’égo de nos "chers" réalisateurs. Stop à la folie cinématographique sous pretexte de vouloir faire mieux. Grande déception.