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publié par Renaud de Foville le 12/07/01
bertrand burgalat - jusqu'au bout de la nuit

a cargo nous avions adoré son premier album, tout d’abord accueilli , il est vrai, avec une certaine méfiance. le patron de tricatel avait-il vraiment quelque chose d’intéressant à mettre sur nos platines... cela fait presque un an maintenant que nous avons constaté que c’était bien plus que cela. rares sont les disques d’électronique française - vous savez la fameuse french touch ! - à réunir autant de qualités que the sssound of mmmusic, une des petites merveilles de l’année dernière, entre humour décalé et superbes mélodies pop - cf chronique. nous étions un peu déçus de ne pas avoir pu le rencontrer pour discuter avec lui de son album. l’interviewer fin mai dans son studio d’enregistrement dans les locaux de tricatel a été un double plaisir... celui de rencontrer quelqu’un d’aussi passionnant que charmant - on aurait bien continuer la conversation tranquillement dans un bar jusqu’au bout de la nuit - mais aussi la satisfaction de faire l’interview un an après la sortie de l’album, ce qui nous a permis d’éviter les questions les plus classiques pour chercher un peu plus loin et découvrir qui se cache derrière tricatel... en rentrant chez moi je me suis aperçu que mon magnéto avait débloqué et que je n’avais que quelques bribes de notre conversation. donc voici de mémoire, les propos de bertrand burgalat... au passage pour tous ceux qui seront à paris en juillet ne ratez surtout pas la journée tricatel au batofar le 15 juillet.

le cargo ! : je pose toujours la même question à chaque début d’interview. ton disque chez moi est rangé, si on prend bertrand comme sur la pochette, entre berlioz et the beta band

bertrand burgalat : ah oui...

le cargo ! : et si on prend burgalat entre rodolphe burger et kate bush... qu’en penses tu ?

bertrand burgalat : déjà je connais mal berlioz, beta band j’ai écouté un petit peu comme rodolphe burger. quand à kate bush... je danse quand même beaucoup moins bien qu’elle. je ne parle même pas de la musique... je ne sais pas trop, qu’en penses tu ?

le cargo ! : avec kate bush il peut y avoir certaines sonorités communes... c’est aussi quelqu’un d’un peu à part dans le monde de la musique...

bertrand burgalat : kate bush ça me va bien... c’est marrant parce que c’est quelqu’un qui a à la fois un potentiel commercial, mais qui est toujours à part dans le commercial. c’est vrai qu’elle fait à peu près ce qu’elle veut...

le cargo ! : et sinon faire de la promo presque un an après la sortie de ton album, c’est pas gonflant ?

bertrand burgalat : cela fera un an fin septembre qu’il est sorti et que je fais de la promo. cela ne me change pas non plus, car quand le disque est sorti cela faisait quand même très longtemps qu’il était prêt. et puis en fait c’est quand même un plaisir. moi j’adore ça, en plus comme j’ai fait l’album dans mon coin et que le but premier était déjà de le faire sortir... savoir que cela intéresse du monde cela fait vraiment plaisir... je suis assez jaloux des personnes qui ont un succès dès le premier album, j’en connais, et qui se plaigne de faire trop de promo... je leur dit qu’il sont fous...

le cargo ! : j’ai trouvé quelques interviews de cette année, j’ai essayé de reprendre dans tes réponses pour essayer de trouver mes réponses.

bertrand burgalat : c’est vrai que je réponds à peu près tout le temps la même chose...

le cargo ! : quand j’ai reçu l’album, j’avais comme beaucoup de monde une image un peu caricaturale de tricatel. j’étais passé à la route du rock l’année d’avant, tout le monde avait des tee-shirts du label...

bertrand burgalat : hehe, on a vendu plus de tee-shirts que de disques...

le cargo ! : cela m’avait marqué de voir que tout le monde s’était jeté sur vos tee-shirts, plus que les autres groupes présents... donc quand j’ai eu le disque et que je t’ai vu en concert avant les calexico je trouvais qu’il y avait un vrai décalage entre le disque, le son sur scène et l’image que l’on peut avoir un peu easy listening.

bertrand burgalat : je pense aussi...

le cargo ! : je trouve le disque plus électro, et en live c’est plus rock...

bertrand burgalat : je trouve très difficile de faire de l’electro sur scène aujourd’hui, c’est quelque chose de très difficile à intégrer aujourd’hui sur scène. comme mon disque je l’ai fait un peu en tâtonnant, je me suis dit que sur scène je vais peut être perdre certaines couleurs par rapport au disque, mais on voulait se servir du fait que sur scène nous sommes vraiment un disque pour faire quelque chose de plus rock, plus improvisé... ce que je perdais sur certaines couleurs je le gagne en énergie. je trouve vraiment que les groupes électroniques sont plus emmerdants sur scène qu’il y 25 ans. c’est toujours le même fond sur scène, et cela ne vaut pas ce que pouvait donner un groupe comme tangerine dream par exemple. je trouve que les concerts d’électroniques n’ont pas avancés, et même que cela à un peu régressé.

le cargo ! : je voulais parler aussi de ton rapport à l’image et donc de celle de tricatel (les pochettes, es clips, l’image que l’on a de toi dans les journaux qui est quand même un peu caricatural). qu’est-ce qui est voulu et qu’est-ce qui est hors de contrôle.

bertrand burgalat : c’est quelque chose, y compris dans notre propre production que l’on a beaucoup de mal à contrôler. je reste persuader que nos premiers disques sont bien meilleurs que nos pochettes par exemple, on commence à avoir des pochettes qui sont proches de notre musiques. c’est vraiment quelque chose de très compliqué, c’est déjà pas facile en musique mais cela devient impossible quand il s’agit de véritablement contrôler son image. je sais le genre de pochette que je voudrais, j’en ai une idée très précise. mais quand j’en parle avec les graphistes je pense que tout ce que je leur dit doit les induire en erreur. je sais que l’image que les gens peuvent avoir de nous, un truc un peu branchés, est assez fausse, mais déjà le malentendu à toujours existé dans le rock, et on ne peut pas passer non plus notre temps à essayer de contrôler notre image. par exemple ce qui me rassure, c’est que la première fois que j’ai entendu le mot kitsch c’est avec kraftwerk, on disait qu’est ce que ces mecs avec leurs costumes ringards... a l’époque il passait vraiment pour des gros ringards... pour revenir au pochette, je pense que les premières que l’on a vraiment réussi , et bizarrement on s’est engueulé à mort avec michel ; c’est celle de houellebecq, je suis très content de la mienne aussi. je pense en tout cas qu’elle ne nous desserve pas. je pense par exemple que la plupart des productions en ce moment sont beaucoup plus passéistes et maniéristes que les nôtres, mais quand on vient d’un truc un peu électronique on peut jouer sur certains clichés. la plupart des pochettes de groupe d’électro sont beaucoup plus kitsch que les nôtres... mais on a pas cette image là, car ils sont souvent qualifiés de pointus ou branchés...

le cargo ! : mais vous, et il y peu de labels techno à part warp par exemple, qui ont d’abord l’image du label avant même celle de l’artiste. tu disais que votre image était un peu fausse aux yeux du publics, mais en même temps elle fait votre renommée...

bertrand burgalat : oui, c’est vrai que le partit pris de départ c’était de se dire chaque projet du label doit servir les autres projets, on fait cela comme une espèce de puzzle, chaque disque... est une « oeuvre » en elle même, sans faire prétentieux, mais doit aussi servir le reste. très vite on a vu aussi les pièges de tout cela... par exemple il y a des gens qui ne prendront pas la peine d’écouter ce qui vient de chez nous car ils n’aiment pas notre image, le label en général et ne chercheront pas à aller plus loin... ce n’est pas le cas d’universal, car même si un mec comme messier m’insupporte...

le cargo ! : sans oublier pascal nègre...

bertrand burgalat : oui c’est vrai... mais chez universal il y a de toutes façons des artistes que j’aime beaucoup et que j’écoute. on va pas jeter tabla town parce qu’ils sont chez universal.

le cargo ! : oui mais messier ou nègre sont des gestionnaires, ils n’ont pas de rapport comme toi à la musique, car tricatel et toi on peut les confondre.

bertrand burgalat : c’est vrai que quand on a un label plus petit...on a peut être la tentation de mettre le label en avant, de jouer un jeu plus collectif sur chaque projet que l’on sort. mais ce n’est pas non plus un truc d’ego.

le cargo ! : en fait vous avez quand même était un peu dépassé par votre image.

bertrand burgalat : oui, c’est vrai. c’est peut être aussi par facilité... au départ en tout cas, car comme on fait des trucs un peu déconcertant les gens ne savent pas toujours par quel bout nous prendre... il leur faut donc des repères, comme le label ou moi... mais cela devient aussi un piège. c’est que cela partait tout cela de certaines intentions, de marquer avec des images fortes pour reconnaître tricatel...

le cargo ! : oui j’ai même lu une interview autour de toi et ton image de dandy...

bertrand burgalat : c’est même allé jusqu’à nova mag qui m’a pris au dépourvu en me demandant quelle était le style de chaussettes de tricatel... j’avais pas grand chose à leur répondre...

le cargo ! : alors que messier lui dans paris match à un certain style de chaussette...

bertrand burgalat : oui c’est vrai.

le cargo ! : mais en même temps si tu te mets à la place des gens, est ce que ce n’est pas normal de voire le coté branché - dont tu te défends - d’un label qui sort houellebeck ou ingrid carven. en préparant l’interview j’ai écrit le terme contradictoire d’élitisme grand public... un peu comme le goncourt.

bertrand burgalat : déjà les choix comme houellebecq ou carven ce sont des choix fait avant leur succès. a l’époque on s’est dit que c’était bien de les faire. par exemple pour carven on savait que c’était très difficile de sortir quelque chose en france pour elle. déjà à l’époque du follie’s pigalle... mais aujourd’hui si elle faisait le tour des grandes maisons de disques on ne la recevrait même pas. c’est quand même une autre planète. pour houellebecq même après avoir vendu 400 000 bouquins on a eu du mal à trouver une licence. on a fait le disque avant son succès, mais même après ses ventes de livres incroyables on a quand même rencontré un patron de major qui ne savait pas du tout qui il était. donc quand on a fait ces choix là on les a fait instantanément, on en pensait ni à l’image, ni au succès... moi j’essaie de me déterminer le plus librement possible, selon mes goûts. alors évidemment je me porterai plus vers certaines choses que vers d’autres... en plus je trouve qu’il y a un vrai élit... je pense que la société française est en train de devenir , en fait qu’elle a toujours été comme la société anglaise, une société de classe avec des fossés très larges, mais à la différence de la société anglaise qu’il l’affiche c’est beaucoup plus discret et larvé en france, mais tout aussi présent. musicalement cela se ressent aussi beaucoup. on ne fait pas notre musique pour les petits blancs bourgeois ou étudiants parisiens, sans non plus être méprisant envers eux, mais on sait que l’on ne touche pas un public de banlieue par exemple. donc que ce qu’écoute les différentes classes ou couches sociales de la population est très différents et ne se mélange pas. c’est aussi une forme de ghetto sociale.

le cargo ! : mais c’est vrai aussi que les médias ont aussi leur part de responsabilité. en ne diffusant qu’une certaine musique, cela ne permet pas à une plus grande population de connaître autre chose. est ce que vous avez pensé ici à comment toucher ce public...

bertrand burgalat : j’aimerai beaucoup faire du r’n’b par exemple. je trouve cela intéressant. d’abord c’est le seul style de musique qui me paraît vraiment moderne. c’est totalement numérique et artificiel, et si je n’aime pas du tout ce type de voix, cela m’impressionne. c’est une production qui oui... m’impressionne. si il y avait un moyen de faire du rap ou du r’n’b proche de nous cela me plairait. le seul problème c’est que l’on ne reçoit pas vraiment ce genre de démos... on reçoit surtout des choses qui vont dans la direction où nous sommes déjà allé, parfois mieux que nous. on aimerait vraiment allé voir d’autres gens, en toucher que nous ne connaissons pas. cela nous intéresse, d’autant plus qu’aujourd’hui personne ne la ramène. c’est pas parce que l’on fait quelque chose dans un genre de musique que c’es bien ou mal. je suis content qu’aujourd’hui il y a un danger de faire une certaine culture... élitiste... je sais pas si c’est le mot.

le cargo ! : mais n’y a t’il pas aussi un problème de prix quand on voit les concerts de madonna ou bjork entre 400 et 900 francs ou les disques à 140 francs, cela permet pas non plus de s’ouvrir à des choses nouvelles. ce n’est pas non plus la seule raison, mais cela n’aide pas...

bertrand burgalat : c’est sûr, même si en franc constant le disque n’est peut être pas si cher ou en tout cas à suivi le cours de la vie, je pense que en france on achète que deux ou trois disques dans l’année. c’est plus des gens comme cabrel qui profitent de ce genre d’achat que les artistes moins connus. on achète quand même moins facilement si on se dit que l’on connaît que deux ou trois morceaux et que le reste n’est peut être pas terrible. c’est un vrai problème en france, en plus tu remarqueras que les artistes qui vendent vraiment, les « valeurs surs » leurs albums sont plus chers.

le cargo ! : mais c’est le contraire de ce que dit nègre, qui pense que le disque est vraiment pas cher, et que le prix n’est en aucun cas un obstacle... mais n’est ce pas aussi un problème qu’il n’y ait pas d’autres moyens de connaître un artiste ou un groupe que d’acheter. a part deux ou trois émissions de radio on n’a pas le temps ou les moyens de découvrir...

bertrand burgalat : honnêtement je n’achète pas vraiment de nouveautés, je préfère aller à emmaüs et prendre un vingtaine de vynils bizarres à 10 balles que ce qui sort. et puis il faut voir aussi que si une partie de la population à vraiment du pognon, il y a une très grande partie qui rame. ce ne sont pas ceux qui ont du pognon qui vont acheter des nouveautés. la musique est rarement leur centre d’intérêt. notre public à tricatel, pas seulement en france, n’est pas un public qui a du fric. ce sont des mecs qui se tiennent très au courant de ce qui sort, des passionnés. mais ce qui est en marge de la grosse production, des majors ne profitent pas de ce prix, ça c’est sûr.

le cargo ! : justement tu disais dans une interview que quand tu as commencé à enregistrer tu étais dans ton coin. et peu à peu avec le développement de tricatel vous avez ouvert votre cercle et rencontré un certain public. tout cela t’a amené une nouvelle pression, celle de ne pas décevoir ce public, leur attente...

bertrand burgalat : oui, c’est vrai...déjà notre premier objectif c’était d’abord de sortir nos premiers disques. c’était déjà assez incroyable. on a vraiment eu du mal à trouver des licences et des distributeurs qui s’y intéressent. alors c’est vrai qu’une victoire qu’on aimerait beaucoup c’est de montrer que cette aventure, que tricatel peut être viable. ce qui n’est pas encore le cas. on aimerait évidemment rencontré le succès, parce qu’au début on nous regardait de loin et puis maintenant que le nom est connu, qu’il y a un certains succès, même si ce n’est pas encore énorme, on nous dit que c’est parce que c’est branché que l’on parle de nous. moi j’aimerai vraiment un succès avec la musique que l’on produit.

le cargo ! : tu parlais de air dans une interview...

bertrand burgalat : air ils ont vraiment réussi un truc incroyable. c’était franchement pas évident, dans un style peut être encore plus extrême que le notre. ils ont vendu un million d’albums... c’est absolument énorme. incroyable. et ils peuvent vendre encore plus avec celui qui sort dans quelques jours !

le cargo ! : dans plusieurs interviews tu parles de ta musique comme une atmosphère triste et nostalgique et tu dis aussi que l’un des points communs des artistes de tricatel c’est de prendre avec légèreté les choses tristes. tu parles aussi assez facilement de ta maladie - le diabète - et de ses conséquences - comme de graves problèmes de vue - d’une manière assez légère et drôle. mais n’y a t’il pas un rapport plus profond - mais en tant que musicien et compositeur - à la maladie ?

bertrand burgalat : je vois plus le diabète comme une conséquence de ma mélancolie que comme une source. même si cela peut renforcer certains états d’esprit d’avoir en permanence trop de sucre ou passe assez dans le corps. c’est vrai que c’est une maladie étrange qui fait du mal à tout le corps, c’est totalement autodestructeur comme maladie, c’est quand même un organe d’immunité qui se retourne contre ton corps et qui le détruit... mais je vois plus cela comme une conséquence d’une certaine attitude mélancolique que comme... mais je comprends mieux pourquoi je suis agnostique ! je suis devenu diabétique à l’age de 12 ans, une nuit où mes parents m’avaient emmené voir godspell. un truc horrible, une sorte de hair à la sauce catho avec dave dans un des rôles, c’était affligeant. le soir même je suis devenu diabétique. une sorte de miracle à l’envers. il faudrait qu’un jour l’eglise reconnaisse cela, les anti-miracles ! le diabète devient quand même de plus en plus dur. beaucoup plus que quand j’avais 15 ou 20 ans. cela me fatigue beaucoup, mais évidemment il faut un peu de distance quand tu en parles, je ne vais pas tout plomber avec cela...

le cargo ! : c’est comme pour les problèmes d’argent autour de tricatel. ce n’est pas franchement drôle, dans le fond, mais tu le présente toujours avec humour et recul dans la forme.

bertrand burgalat : c’est déjà assez étrange d’en parler ce n’est vraiment pas pour le faire d’une manière sinistre. dans ma musique cela se traduit aussi par une certaine atmosphère, une certaine vision des choses et de la vie. cela m’énerve vraiment quand les gens qui nous écoutent, qui écoutent mon album me dise que c’est « cool », « léger » ou « fun »... ce n’est pas vrai, ce n’est pas ça. je dis les choses d’une manière indirecte... je ne me vois pas en parler directement non plus !

le cargo ! : pour finir j’ai lu que les textes de ton album, comme par exemple ceux de katerine, étaient totalement différent des images que tu avais en enregistrant...

bertrand burgalat : oui, bien sûr...

le cargo ! : mais il y a peu d’artistes qui disent cela des textes de leurs chansons, même si c’est vrai...

bertrand burgalat : c’est sa vision à lui, c’est ça qui était intéressant. moi j’avais la musique et les mélodies, lui très librement est partit de ça. je trouvais intéressant de ne pas être ans le trip artiste, je ramène tout à ma petite personne... les images que j’avais en tête j’ai essayé de les exprimer dans la musique. c’est un jeu en même d’avoir quelqu’un comme katerine qui raconte autre chose. ce n’était pas le but que ce texte me corresponde, ce n’est pas important, je n’ai touché à rien, j’ai pris les textes que philippe m’a écrit, sa vision de ma musique. c’est tellement plus intéressant.

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publié par le 12/07/01