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publié par Céline Non le 26/09/19
Awir Leon - "Cet album c'est que du brut, un collage de ces deux dernières années"

Trois ans après son premier album Giants aux teintes électro-soul, Awir Leon est de retour avec Man Zoo qui sort demain. On vous avait déjà parlé de cet artiste à plusieurs casquettes pour son clip "Choir". Ce dernier avait piqué notre curiosité, après un premier album plutôt électronique il revenait avec un groupe jouant en live. Résultat nous sommes partis à sa rencontre pour parler de sa musique et de ce nouvel album.

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Ma première question est simple, pourquoi Awir Leon ?

A la base mon nom de scène c’était Léon, qui est mon deuxième prénom. Le prénom de mon grand père. J’ai pris ce nom là quand il est décédé, je voulais m’appeler Léon.
Et Awir c’est un nom gallois que j’aime bien, il veut dire Ciel/Air. Et quand j’ai découvert ce mot, j’ai adoré sa sonorité, et je me suis dit voilà c’est mon nom.

Tu as commencé comme danseur professionnel, comment es-tu passé de la danse à la production de musique ?

Il y a toujours eu les deux. Je faisais même de la musique avant de danser. Quand j’étais petit j’ai toujours fait de la musique à la maison, avec mon frère et avec mes soeurs. Ado, encore plus, j’ai eu plusieurs groupes avec mon frère. En fait j’ai commencé la danse super tard, j’avais 16 ans mais deux ans après j’ai trouvé du taf dans une compagnie et donc je suis parti en tournée. Et j’ai kiffé et je suis resté dans la danse pendant dix ans, mais j’ai toujours fait de la musique à la maison, entre deux. Et vers 2012-13, mon message musicale a commencé à se préciser. J’ai commencé à vraiment avoir un truc à dire et à avoir envie de le dire donc j’ai commencé à vraiment le développer. Jusqu’à ce que j’ai vraiment envie de ne développer que ça et que j’arrête de danser professionnellement. Parce que je danse toujours. Ça s’est inversé en fait, maintenant je fais la musique professionnellement et je danse à côté. Mais il y a toujours eu la musique et à partir de mes 16 ans, il y a toujours eu les deux ensemble.

On est donc pas à l’abri que tu retournes à la danse ?

Mais pas du tout ! Pas du tout à l’abri ! Au contraire, ça fait trois ans que j’ai arrêté et là ça me manque, ça me manque de ouf. Ça va revenir en force à un moment.

Pour ton dernier clip "Feather", on te voit juste danser, était-ce dû à ce manque ?

Non, je sais pas. J’aime bien danser. En vrai je danse tout le temps. A la base le dernier clip, c’était juste une vidéo où on était en vacances et ma copine m’a filmé en train de danser. Après j’ai mis des effets chelou dessus, je me suis dit "ah c’est rigolo avec ce morceau, ça marche super bien".

D’ailleurs sur ce morceau featuring improbable, Damien Rice. Il n’a fait pas fait beaucoup de nouveaux sons depuis un moment (même s’il tourne en ce moment) alors comment ça s’est fait ?

Ça s’est fait l’année dernière. J’ai fait parti du People Festival à Berlin, qui est organisé par Justin Vernon de Bon Iver et les frères de The National. C’est une semaine de résidence avec plein de monde dans un hôtel à Berlin. Il y avait tout le monde, Feist, Damien Rice, etc. Pendant cette semaine, on s’est vraiment appréciés avec Damien. Donc on a fini par faire de la musique ensemble et je lui ai fait écouter ce morceau. Et il a bien aimé. Il a enregistré des chœurs, et puis voilà. Tout simplement. Et j’adore ce que sa voix amène au morceau.

C’est vrai qu’avoir sympa Damien Rice en choeur, c’est pas mal.

Pour moi c’était marrant aussi, parce que c’est Damien Rice !

Les premiers clips que tu as diffusé pour la sortie de Man Zoo sont "Rain" et "Choir", des versions live "Ensemble", acoustiques. Tu avais une envie d’aller vers quelque chose de plus vrai après Giants, qui était très électronique ? De vrais instruments, de vrais sons ...

Plus humain en tout cas, carrément. La différence entre les deux projets vient vraiment de la façon dont ils ont été fait. Giants, c’était presque un projet secret... jusqu’à ce qu’il existe. C’était vraiment le truc que je faisais quand j’étais tout seul chez moi, j’ai fait l’album entier tout seul, à part le petit feat avec Floyd Shakim sur "So Late So Soon", sinon tout le reste de l’album c’est que moi. C’est particulier comme process, que moi avec les machines. Pour Man Zoo, il y a un process complètement différent dans la mesure où j’ai voulu commencer avec le song writing. Ce qui n’est pas du tout le cas de Giants, j’ai fait la prod et j’ai chanté par-dessus. Là je voulais vraiment commencer par le song writing, j’en avais marre de l’ordi. Donc j’ai d’abord passé un an que sur mon piano. J’ai écrit tout l’album en piano-voix et ensuite j’ai enregistré ce piano-voix et de là on a commencé à produire les morceaux, et j’avais pas du tout envie de le faire tout seul. Donc j’ai fait des sessions, beaucoup de sessions avec mon frère qui m’a vachement aidé pour les arrangements. Il a enregistré toutes les basses de l’album, plus des guitares. J’ai beaucoup bossé avec J.Kid, un des trois gars de Unno (NB:groupe dont Awir fait aussi parti), avec Floyd Shakim, j’ai bossé avec les frères, mon crew avec qui je passe ma vie. Et forcément il y a un truc dans l’album qui fait moins le geek tout seul qui bosse ses morceaux jusqu’à 6h du mat’. C’est vachement plus direct, plus joué, plus humain. Et c’est pour ça que j’ai voulu faire les versions live "Ensemble" parce que c’était la façon de les connecter à l’album. Je voulais vraiment montrer que ce n’était plus un projet solo. Ça reste des morceaux écrits par moi, mais l’album sonnerait absolument pas comme ça si tout le monde n’avait pas été impliqué.

J’ai adoré la version ensemble de "Choir".

Mais moi aussi, j’ai kiffé. Si je pouvais jouer comme ça en live je serais heureux. Après ça va, sur scène je kiffe jouer tout seul mais là, ces morceaux là ont beaucoup plus de sens comme ça.

En fait quand j’ai vu ce clip je me suis dit cool, ça vit, c’est vivant, ça tape des mains, ça partage, dynamique qu’on retrouve beaucoup dans ce dernier album.

Je pense que j’avais besoin de ça. Cet esprit là est nécessaire dans l’album. C’est de là que vient la chaleur de l’album. C’est ça que je voulais.

Tu as pensé à comment retranscrire ça sur scène ?

Pour le moment, pour des raisons d’évolution du projet, je pense seulement jouer tout seul. Je joue les morceaux en live comme je jouais sur Giants, c’est-à-dire je chante et joue du clavier. Le reste c’est de la programmation sur des machines qui font les rythmiques et tout ça. Pour le moment c’est comme ça, ça va être kiffant quand même. Une fois qu’il y aura des gens ça sera kiffant. Mais dès que la version en groupe est possible...

D’ailleurs entre la diffusion premier morceau, la sortie de l’album, six mois. C’était pour trouver comment le mettre sur scène ? Faire une sortie à la rentrée ?

C’était un peu pour tout ça. Mais surtout pour prendre le temps. J’avais conscience qu’on reprenait un peu de zéro, le public de Giants, ça faisait longtemps. Donc je voulais juste prendre le temps de sortir les vidéos live tranquillement. Mais il est temps que l’album sorte. Il est prêt depuis février, j’ai écrit le premier morceau en août 2017.

Je t’ai découvert avec Man Zoo. Donc j’ai écouté Giants après Man Zoo. Et c’était vraiment très différent, on y sent les instruments, la présence piano-voix sur tout l’album, j’ai été énormément surprise de ne pas du tout en retrouver sur Giants.

J’avais jamais fait ça, j’avais jamais fait de morceaux en piano-voix. C’est vraiment un truc que j’ai fait quand j’ai commencé à travailler sur Man Zoo, j’aime bien aussi me mettre des challenges dans le process d’écriture. Vu que pour Giants j’ai tout fait sur mon ordi, je me suis dit je commence sans ordi. Et c’était super dur au début. Je savais jouer un peu de piano, mais comme un gars qui joue du synthé, comme un beat maker. Il a vraiment fallu que j’apprenne à jouer du piano, des théories harmoniques pour pouvoir écrire des morceaux complets de cette façon.

J’ai lu que pour dans Man Zoo tu voulais capturer des émotions, que tu étais différents animaux, je t’avouerais que je me suis vraiment demandée mais qu’est ce que ça veut dire ?

J’écris pas ma musique en voulant retranscrire quelque chose. Je me pose et je vois ce qui sort. J’ai toujours fait de la musique comme ça. Cette explication est plutôt venue a posteriori. Mais j’ai écrit Man Zoo dans une période où c’était le bordel, dans ma vie, côté perso, de tous les côtés en fait. Donc je suis passé par plein d’états et en même temps j’écrivais les morceaux de l’album. Il y a donc beaucoup d’états émotionnels différents, c’est un peu ça tous les animaux. Il y a des morceaux où un jour je me sentais comme un lion, des morceaux c’était autre chose.
Cet album c’est vraiment des moments captés. Ce n’est pas des morceaux que j’ai écrit, retravaillés, où on a fini par aller en studio pour ré-enregistrer. C’est vraiment pas ça. Les prises de voix sont les prises du jour où j’ai écrit le morceau, c’est que du brut. C’est un collage de mes deux dernières années.

Tu définirais comment la musique que tu fais ?

C’est pas mon taff, c’est le tien ! Non mais j’ai essayé de répondre à cette question pendant longtemps, et en fait je me suis rendu compte que je m’en fous, dites ce que vous voulez. On m’a tout dit, Soul-Electronica, post RnB, bref c’est de la country, de la post-country !

Pourquoi as-tu choisi de t’installer à Amsterdam ? Pourquoi pas la France ? C’était une scène musicale qui t’attirait plus ? Tu as un regard particulier sur la scène française ?

Pour ma copine. Mais j’adore la ville. J’y suis allée pour la rejoindre, mais en fait j’ai vraiment adoré Amsterdam, cette ville est mortelle. Mais sinon la scène française est super riche, elle défonce. Ne serait-ce que là sur Paname, je connais plus la scène qui gravite autour de Nowadays Records, que ça soit des Sébastien Forrester ou mes potes plus proche Floyd Shakim, il y a vraiment des gars qui font des trucs mortels en France.

C’est quoi les derniers morceaux que tu as kiffés ?

J’ai vraiment adoré le dernier Bon Iver, surtout "i,i" qui est un morceau incroyable. Je suis encore pas mal bloqué sur Anima de Thom Yorke, sur les dernières sorties de Clark aussi, et j’écoute pas mal Novelist en ce moment. Mais en morceaux... Je t’avoue que les trois dernières semaines j’étais en résidence non-stop, j’ai pas écouté de sons !

C’est marrant j’aurai vu un peu de hip-hop ou de soul dans tes écoutes habituelles.

C’est complètement là d’où je viens. C’est marrant, dans la forme ça transparaît plus trop dans ma musique mais je viens de la Soul à la base. Chez moi ça écoutait que de la Motown, de la northern soul, que des trucs comme ça. Ensuite quand je suis devenu ado je suis passé un peu plus à tous les Soulquarians, Erykah Badu, J. Dilla tout ça. De là j’ai branché sur des Flying Lotus, qui m’a ramené à Clarks, puis ça m’a branché sur l’électro et de la pop, et puis des trucs plus folk. Mais j’ai toujours ce sentiment que mon noyau c’est le hip-hop soul.

Et un spectacle de danse à conseiller, perso j’y pense pas, je me suis dit que tu serais de bons conseils.

Il y a un solo danse-théâtre qui est joué par Déborah Moreau, Les chatouilles. Je l’ai vu hier soir, il est incroyable. 1h45 sur scène toute seule, elle joue quatorze personnages, elle joue, elle danse, c’est impressionnant.

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publié par le 26/09/19