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publié par Mickaël Adamadorassy le 05/11/16
Pitchfork Music Festival Paris 2016 - 29/10/2016

Troisième et dernière journée de l’édition 2016 du Pitchfork Music Festival Paris, pour l’instant surtout marquée par les prestations de Nick Murphy et Bat For Lashes. Aujourd’hui on attentd beaucoup de Warpaint, l’autre groupe qui rendait pour nous cette édition absolument immanquable. Mais ce n’est pas pour tout de suite et d’ici là la programmation de ce samedi s’annonce comme très éclectique... (Galerie d’images en fin d’article comme d’habitude)

Bonzai

Il y a ce grand classique de la rupture (en tout cas dans les séries américaines), « Ce n’est pas toi, c’est moi ». Et Bonzai c’est tout à fait ça. Nos chemins n’étaient pas vraiment faits pour se croiser. Alors pour l’amour du Pitchfork Music Festival, on a essayé, mais le naturel reprend vite le dessus. Franchement Bonzai tu n’as rien fait de mal, ton électro/dance typique de ce qu’aime bien Pitchfork (le site), tu la fais sincèrement mieux que pas mal d’autres chanteuses dans ton genre, qu’on a vu à Pitchfork l’année d’avant sûrement. Mais voilà on est pas ricains, nous on a eu l’eurodance, pour le meilleur et pour le pire, et y a un truc qui passe pas avec la version outre-atlantique de ce qui se danse sur un rythme boum boum boum. Mais ne crois pas que c’est ta faute, tu te donnes bien sur scène, de temps à autre, y a vraiment de l’idée dans les sons et surtout le public, ton public avait l’air ravi. Non mais bon tu vois quoi...comme je disais ce n’est pas toi, c’est moi...

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Whitney

De Whitney , duo indie-pop formé par Julien Ehrlich (chant/batterie) et de Max Kakacek à la guitare qui se transforme en quintet en live, on retiendra surtout les jolies lignes mélodiques du second sur sa Telecaster. Julien lui nous a agacé dès les premières minutes, que ce soit dans l’attitude ou la voix. Avec lui Whitney c’est de la mollesse fleur bleue un peu pénible mais heureusement les cuivres et la guitare de Kakacek (non on ne fera pas de blague lourde sur ce patronyme) rattrapent souvent le tout pour en faire une mollesse assez.. glorieuse... On comprend alors pourquoi on peut trouver Whitney très cool plutôt que très agaçant. Malheureusement pour nous le second sentiment finit quand même par l’emporter et c’est dommage : si on remplaçait la voix ça serait déjà beaucoup plus intéressant. Pour le côté fleur bleue et les nanananas là malheureusement on va rien pouvoir faire, on imagine que leur balancer quelques baffes soulageraient mais hé il faut de tout pour faire un monde...

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Shame

Les londoniens de Shame sont jeunes... ils les présentent comme les meilleurs représentants du renouveau Punk.. nous n’iront pas jusque là, parce que même si le chanteur est très sympathique et très investi dans son rôle de mauvais garçon mais pas trop à l’anglaise, il reste braillard sans être vraiment puissant et quand il ne pousse pas, il n’a pas une voix inoubliable. Les paroles sont à la frontière entre la bonne catchphrase qui reste en tête et la philosophie de comptoir. Voilà pour les critiques, plutôt secondaires, car globalement le groupe joue bien, assure le spectacle et se montre même intéressant quand il exhibe d’autres influences que le punk. On est pas sûr d’y revenir sur disque ou en live mais Shame n’a pas usurpé sa réputation de bon groupe de scène. On verra comment ils évoluent, le renouveau du punk anglais c’est un peu un marronnier de la presse rock et les chouchous du jour ont tendance à tomber vite dans l’oubli, ce qu’on ne leur souhaite pas bien sûr.

Minor Victories

On n’est pas fan de Slowdive, de Mogwai ou d’ Editors, les formations dont sont issues les membes de Minor Victories. On n’est pas convaincu non plus que dans un "super groupe", la qualité du collectif soit forcément supérieur ou égale à la somme des individualités réunies. Mais dans le cas de Minor Victories, ça marche du feu de dieu. Les musiciens ont réussi à concilier beauté délicate, avec des arrangement de cordes omniprésents et la voix fragile et émouvante de Rachel Boswell) (Slowdive) et guitares bien crades fournies par Stuart Braithwaite de Mogwai, le tout appuyé par un basse/batterie très efficace qui offre une assise massive, dans l’esprit sombre et cold-wave d’Editors.

C’est justement leur guitariste Justin Lockey qui est à l’origine du projet. Il a réalisé les premières démos en solo tout en imaginant une voix féminine qui viendrait se poser dessus et comme il a le même manager que Rachel il lui a proposé une collaboration sans trop y croire. Elle a aimé, ils ont commencé à travailler dessus et le projet s’est étoffé progressivement, les musiciens enregistrant à distance et envoyant leurs parties à Justin. C’est lui qui va intégrer ces différentes collaborations, ces différentes visions artistiques et en faire un tout cohérent et l’album qui porte juste le nom du projet est donc en premier lieu sa réussite.

Pour nous, c’est tout simplement un des meilleurs disques de l’année, pour sa relecture moderne de la dream-pop et du shoegaze, pour les ambiances sombres, pour la beauté poignante des cordes mais aussi parce qu’il sait surprendre, par exemple avec un étonnant duo entre Rachel et Mark Kozelek (Sun Kil Moon), on y abandonne le temps d’un morceau l’électricité et le son XXL pour une ballade triste sur les occasions manquées, où les deux racontent chacun un bout de l’histoire.

Sur scène, le "supergroupe" donne une impression de cohésion et arrive à bien retranscrire le son massif du disque. Quand on sait dont certains membres ne s’étaient pas rencontrés avant de répéter pour préparer la tournée, c’est déjà assez remarquable. Sur les vidéos qui traînent sur Youtube, on peut voir un groupe beaucoup moins au point, avec une Rachel qui chante régulièrement un peu faux. Au Pitchfork, le mix n’est pas toujours parfait, la prestation vocale encore un peu fragile techniquement mais on a la chance de les voir avec pas mal de dates déjà au compteur et tout le monde est au point. Minor Victories fait son marché dans plein de genre différents et parvient à vous insuffler le spleen de la dream-pop, vous imbiber de la noirceur de ses ambiances coldwave avant de vous libérer et de vous emmener vers le climax avec des cordes superbes qui s’élancent au dessus du mur de guitares saturées typique du shoegaze et tout ça avec un son résolument moderne.

Warpaint

Warpaint est un de nos groupes préférés depuis qu’on a découvert leur album homonyme en 2013. On aime ce quatuor féminin qui joue collectif, où il n’y a pas un leader et des accompagnateurs mais quatre personnalités qui s’accordent et se complètent, dans Warpaint le basse-batterie sophistiqué de Jenny Lee et Stella est aussi important le duo de chanteuses que forment Emily et Theresa. L’inventivité et la qualité du jeu qu’elles savent combiner aux atmosphères et aux émotions. Leur dernier album Heads Up poursuit dans cette voie, en incorporant plus d’éléments électroniques, en renouvelant leur approche collective de l’écriture. Il est plus difficile d’accès que le précédent, la séduction opère moins facilement sur le plan affectif, à part le single New Song il n’y a pas vraiment de single, mais si on prend le temps de le digérer ce disque est quand même une proposition musicale intéressante, ce n’est pas le carton pour cette fois mais ça montre la capacité du groupe à se renouveler et on se disait qu’en live ces morceaux allaient vivre et s’améliorer.

A ce stade de la tournée, le groupe n’en est pas encore à changer les titres mais plutôt à fixer les versions lives, qui tiennent déjà bien la route. Et surtout les musiciennes ont l’air d’être à l’aise sur scène et en observant les regards et les sourires qu’elles échangent, on a l’impression qu’elles prennent du plaisir sur la scène du Pitchfork, Theresa en particulier qu’on connaissait un peu plus réservée que Emily a beaucoup gagné en assurance. Sans être du genre à vous fixer droit dans les yeux comme Emily, sans autant de gestuelle, mais on la sent quand même beaucoup plus en confiance.

Tout cela se voit mais s’entend aussi, le son comme la prestation de Warpaint sont quasiment irréprochables. Pour les nouvelles chansons, c’est l’occasion de rentrer un peu mieux dedans, de les redécouvrir car on a finalement pas tant écouté l’album que ça. Pour les anciennes, on prend son pied, c’est notre petit nuage musical du jour ou plutôt nos petits nuages avec des versions live de « Love is to Die », « Disco//Very » ou « Keep it Healthy » qui sont autant de moments de pur bohneur.

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Abra

le RnB de Abra est plutôt intéressant dans son côté très dépouillé, juste un peu de boite à rythme, une instrumentation discrète et quelques samples vocaux, tout est fait pour qu’on se focalise sur la voix et celle-ci est vraiment pas mal du tout, tout comme l’écriture. Sur scène, elle est toute seule avec ce qui est donc plus ou moins un playback, pas évident de faire vivre ça, il faut vraiment se donner à fond et elle le fait bien... mais finalement un peu trop, alors que la musique est plutôt sobre, elle en fait beaucoup et ça casse l’immersion, on a l’impression de voir une énième chanteuse de arenbi médiocre alors qu’en fermant les yeux ce n’est pas le cas. Ce qu’on aurait pu faire nous direz-vous, ouais sauf que sous ce joli vernis, la base musicale reste du RnB et on a du mal avec ce genre musical.

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M.I.A.

Il semblerait que pour la majorité des gens, M.I.A. était la tête d’affiche de Pitchfork. En tout cas, aucun autre concert n’aura eu la même densité de public face à la scène, le même enthousiasme massif dans les premiers rangs, au diapason avec un show XXL qui ressemble effectivement à une façon plutôt grandiose de conclure un festival. Mais plutôt que "grandiose" on opterait plutôt pour le terme "grandiloquent", pour le décor de prison, le show light, les danseuses et la combinaison orange fluo de M.I.A. (si vous ne suivez pas Orange is the New Black c’est la couleur des uniformes des nouveaux détenus dans les prisons américaines).

Sur les premiers titres, cette grosse machine bien huilée fonctionne bien, le visuel est efficace, le son massif vous enveloppe, les grosses basses vous traversent le corps. La chanteuse dégage quelque chose de vraiment sympathique, pas d’egotrip ou de caprices de diva, elle a en fait beaucoup de charisme, surtout pour quelqu’un qui est sappé dans un "sac" orange trop grand pour elle complété par des platform shoes improbables. On connaissait un peu sur disque et on poursuit la découverte, en ayant cette idée que M.I.A. c’est du r’n’b/hip-hop "alternatif", qui n’a pas les travers sexistes ou les gimmicks qui pourrissent l’image de ce genre musical parce que c’est une femme et une "activiste", parce qu’on est au pitchfork après tout.

Et plus le temps passe, et plus on se dit qu’en fait non, que ce soit dans les sons, dans l’attitude scénique, M.I.A. ce n’est pas très différent du hip-hop "normal", pas franchement ironique ou second-degré non plus. Mais bon on doit être le seul extra-terrestre à la ronde à s’embarrasser de ces considérations car autour de nous le public est extatique et profite de son samedi soir en mode dancefloor.

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