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publié par antoine le 07/12/03
Les Transmusicales de Rennes 2003 - [04/12/2003,05/12/2003,06/12/2003]
Les Transmusicales de Rennes, 2003 — Rennes

A chaud : vendredi 5 décembre, 06:02

bon, n’y allons pas quatre chemins : le compte rendu des concerts sera pour plus tard, voici pour l’instant, une réaction à chaud aux évènements qui se sont déroulés (et se déroulent encore) à rennes, autour du liberté. à l’heure qu’il est, aucune dépêche n’est encore tombée, même si je suppose que vous n’y échapperez pas. impossible de savoir comment les évènements vont se terminer, ni même l’étendue des dégâts/victimes/incarcérations. dans l’après-midi, dans les rues avoisinant le liberté, on sent une tension particulière. quand je sors de l’ubu à 19 heures, une voiture de police est là, surveillant. a priori, le genre de détails insignifiant qu’on oublie aussi vite. mais en fait, c’est ça qui pour moi constitue la fameuse "tension". un peu plus loin, dans les rues autour du liberté, des "vans" (du type les bons vieux "c5" des soundsystem, et autre mobilhomes). et déjà, des crs qui patrouillent, faisant bien sentir leur présence. et des punks (?) bien chauds eux aussi, qui prennent en photo les crs à tout bout de champ, tandis que les "crs ss" volent... ca sent la bière, le shit et la gerbe un peu partout, mais a priori pas plus que lors des précédentes éditions.

joints

la soirée se déroule à peu près normalement. on sent bien que tout le monde est là "pour les bérus" ou presque. de l’espace laissé aux médias et photographes devant la scène, difficile d’imaginer ce qui se passe à l’entrée, et ce n’est que plus tard que j’entends cette rumeur : "tout le monde a pu rentrer, même les gens qui n’avaient pas de places, ils ont forcé le passage, des portes ont été démontées...". pas encore pu vérifié si c’était vrai, mais la présence de quelques punks à chiens, avec leur cannettes de bière bien en verre dans le hall du liberté au moment où je cherche un coin tranquille pour me poser pour les fameux bérus irait bien dans ce sens, puisque j’imagine mal qu’ils aient pu franchir un contrôle de sécu normal. ensuite, arrive "le" concert. musicalement, je reviendrais certainement dessus plus tard. politiquement, perso, grosse déception. trop de slogans trop faciles : "allez-y, fumer vos joints"...

****

énervé, je cherche à rejoindre le liberté haut où joue au même moment métal urbain. là, difficile de savoir d’où ca vient (même si a priori...), une bombe lacrymo envahit les escaliers entre les deux salles. je sors et rejoins l’espace médias : de l’avis général, le concert est en train de virer à la catastrophe. par "conscience professionnelle" (arf), je retourne cependant dans la salle, d’où je vois la fin du concert, s’achevant sur un "salut à toi", si ma mémoire est bonne. puis ce petit mot : "nous pouvons tout changer", explique l’un des bérus, avec ses deux gamins sous le bras pour l’occasion. et puis aussi, tout de suite après : "attention quand vous allez sortir, on est là pour faire la teuf, pas autre chose". mouais. un peu facile, je trouve, après avoir gueulé que les flics sont tous des **** pendant tout le concert. sagement, j’attends l’arrivée de stéphane eicher, espérant une bonne surprise... mais le service d’ordre explique que ça y est, la baston a commencé dehors. jean louis brossart prend la parole sur scène juste avant le début du set de eicher, tandis que le public se retrouve prisonnier à l’intérieur du liberté et du village, le temps que le service de sécu improvise une autre sortie. il explique son choix d’avoir fait venir les bérus, et recommande "de ne pas répondre aux provocations, d’où qu’elles viennent" quand le temps de la sortie sera venu..

chat

je rejoins un balcon donnant sur l’entrée du liberté, et là, c’est le choc (pour moi). une compagnie entière de crs stationne et une trentaine d’entre eux sont avec leur bouclier, en ligne, prêts à charger. en face : des casseurs (appelons un chat un chat) et des gens tout à fait "normaux". je prends quelques photos de ce balcon où se sont massivement regroupés les photographes accrédités, visiblement téméraires mais pas courageux, puisque c’est bien à l’abri du haut de leur balcon qu’ils filment/photographient. je décide de rejoindre la rue, pour essayer de comprendre un peu plus le comment du pourquoi. le service d’ordre ne veut a priori pas me laisser sortir, malgré mon badge "média" ; il faudra user de beaucoup de persuasion pour sortir et me retrouver au beau milieu des "belligérants". nos crs, toujours au nombre d’une trentaine "en armes" et une compagnie entière autour, et de l’autre des casseurs ; il n’y a plus qu’eux. je sors mon appareil photo, mais avant même de pouvoir m’en servir, les crs viennent me voir pour m’interdire formellement de m’en servir. chouette. qu’à celà ne tienne, je décide de m’en servir, en leur montrant ostensiblement mon badge. faudrait voir à pas délirer, non mais oh ! (tout ca pour rien, finalement, la batterie de mon numérique me lâchera quelques secondes après seulement. rhhââ.)

lacrymos

je retourne dans la salle de concert, je suis vaguement pendant 5 minutes un stéphane eicher qui paraît plutôt sympathique, mais ma tête est restée dehors. je rejoins le balcon du début, d’où la vue est toujours imprenable. les choses s’énervent sérieusement : des vitrines sont cassées, les bouteilles en verre et les pavés volent sur les forces de l’ordre ; un centre commercial tout proche est clairement la prochaine cible des casseurs. du côté des flics, les crs sont toujours là. quand les provocations vont trop loin et se rapprochent trop d’eux, ils tirent des lacrymos. des policiers en civils interviennent assez brutalement, c’est une évidence ; on voit des personnes se faire embarquer. manifestement pas les plus agitées, sûrement des gens comme vous et moi, ayant un peu trop bu seulement, et qui risquent de payer les pots cassés. je suis plutôt en "état de choc" : je venais aux trans pour la musique, et rien d’autre. au final, j’ai assisté à une scène de guérilla urbaine à propos de laquelle je ne sais pas trop quoi penser.

rave

rejeter la responsabilité sur les "casseurs", et dire qu’ils étaient cons & bourrés ? sur les crs trop obtus ? sur un service d’ordre qui a été débordé ? ou pourquoi pas sur les bérus qui a chauffé à blanc un public qui était déjà bouillant ? je livre ces quelques éléments en vrac, il y a indiscutablement beaucoup plus à en dire. au moment où j’écris ces lignes, les sirènes de flics continuent à gueuler (j’habite près du commissariat), et il est clair que certains étaient motivés à en découdre pour un long moment quand je suis parti, il y a maintenant presque deux heures. j’ai une boule dans le ventre quand je repasse dans ma tête certaines images vues ce soir. et une autre boule, coincée dans la gorge, quand je pense à l’équipe des trans. après le coup de la rave & la venue de sarko l’année dernière, ces évènements risquent de laisser des traces : chouette soirée d’anniversaire, n’est-ce-pas ? dommage que certains aient décidé de balancer des lacrymos qui ont fait exploser les bougies du gâteau, à mon avis. voilà, ce sera tout pour ce soir.

conférence de presse vendredi matin, très tôt, je rédigeais un compte-rendu de « l’à-côté » du concert des béruriers noirs. forcément, j’étais encore sous l’influence des images marquantes que je venais de voir. le lendemain, une conférence de presse confrontait le groupe aux journalistes. le cargo ! y était. « d’abord, on veut saluer le travail super classe qui a été fait par le service d’ordre, la brigada à l’intérieur de la salle.. ensuite, pour ce qui est du concert, à l’intérieur, il faut bien dire qu’il y avait une osmose, on était vraiment impressionné, c’était vraiment hyper fort au niveau émotionnel. ». voilà qui est dit, cependant nous ne résistons pas à l’envie d’en savoir davantage sur le ressenti du groupe face aux évènements extérieurs …

tchernobyl

« pour ce qui s’est passé dehors, c’est clair, que ya eu des ordres de la préf’, et en dessous des abus ; les crs une fois qu’ils sont lâchés, ils savent pas s’arrêter. c’est de la folie, certains sont barjots ! quand on a des chiens, il faut savoir les tenir, et encore, ce que je dis, c’est un manque de respect pour les chiens ! ». ce n’étaient pas vraiment ces paroles de loran, le guitariste version tchernobyl qui allait me réconcilier avec le groupe. hurler que les crs sont tous des cons, c’est pas un peu facile ? « non, c’est vrai, ce sont pas forcément tous des cons, même si ce ne sont pas mes potes, c’est clair. d’ailleurs chez les rg, depuis le temps, on peut être sûr que certains écoutent les béru maintenant ! »

radiateur

en fait, c’est françois, le chanteur, qui nous réconciliera un peu avec le discours du groupe, lui qui est au final beaucoup plus posé. on n’insistera pas davantage sur leur vision des évènements, juste pour eux le temps d’annoncer que leur concert prévu dans un squat (la villa) de rennes, comme on pouvait l’entendre un peu partout dans les conversations à rennes depuis quelques jours n’aurait finalement pas lieu, « parce qu’on a pas envie que des gens aient des problèmes à cause de nous » expliquent-ils. par contre, françois s’expliquera sur le pourquoi d’une participation aux trans. « en fait, c’est clair, ca nous fait quand même un peu chier d’être sur un gros festival. vous êtes là vous les journalistes parce qu’il y a un village pour les media, parce que y a un radiateur donc vous êtes pas dans le froid. nous ça nous choque de voir cette partie du village où y a que les gens badgés. mais pour toucher un max de gens, fallait faire ça. et puis ça c’est vraiment super bien passé avec béatrice (macé, directrice administrative du festival). »

stupeflip / sniper

quand on leur fait remarquer que douze personnes passent en comparution immédiate au tgi de rennes, c’est d’abord loran qui s’exclame : « quoi, mais c’est dégueulasse ca !! » alors que françois se voudra plus posé : « attends loran, on va pas défendre n’importe qui. le mec qui va casser des vitrines ou du flic juste comme ca, nan, désolé, mais c’est normal. » et puis, il y a aussi cet ultime coup de pied dans la fourmilière « vous connaissez stupéflip ? » « oui, mais nous on serait plutôt du genre sniper… » du côté de la direction cette fois, jean-louis brossard et béatrice macé eux, semblaient touchés par le problème rencontré, mais confiaient « ne rien regretter, et surtout pas d’avoir fait venir le groupe. il n’y a eu aucun blessé à l’intérieur, à part peut-être un ongle cassé. il n’y a pas eu plus d’évacuation sanitaire pendant la soirée de jeudi que celle de vendredi, donc pour ça, on est quand même très content. pour ce qui est du dehors, c’est sûr que ça nous concerne, de toute façon, ça touche l’image des trans, donc on est concerné ». béatrice macé expliquera ensuite que la direction du festival « ira rencontrer les riverains et commerçants, pour essayer d’instaurer un climat suffisamment apaisé. »

coupes

ces 25èmes rencontres transmusicales commencent à l’ubu, la salle de concert gérée par l’association des transmusicales (atm) et jouxtant le théâtre national de bretagne. au cas où on aurait pu l’oublier, un compteur égrène sur la façade le nombre de jour restant avant l’entrée en application de la réforme sur le régime des intermittents du spectacle. comme pour mieux rappeler que même un festival assez énorme et reconnu, qui repose sur une structure de 10 salariés permanents, qui gère un budget de 1,6 million d’euros pourrait lui aussi connaître de sérieuses difficultés dans un avenir très proche. béatrice macé se voulait rassurante face aux journalistes. mais s’il est vrai que l’ubu ne connaîtra pas de coupes sombres dans ses rentrées d’argent, il n’en est rien de « l’autre » salle rennaise, l’antipode qui va très certainement rencontrer des difficultés suites au désengagement de partenaires publics dans son financement.

santa cruz

il faut se frayer un chemin dans un public remplissant assez largement la petite salle pour aller écouter santa cruz, groupe français de sept membres formé il y a à peine un an, supposé « nous emmener sur les traces d’un lambchop ou d’un will oldham » disait le programme des trans. a nos oreilles pourtant, la première référence qui viendrait à l’esprit serait plutôt le rock de grandaddy, pour la voix du chanteur d’abord, capable du meilleur, pour le son des guitares ensuite, et pour l’évidente humilité qui se dégage du groupe enfin. les titres s’enchaînent facilement, même si un titre sortira cependant de la logique guitares/basses/batterie/chant/clavier, en invitant une scie musicale. pour le coup, on aura la preuve que bruno green, le chanteur et guitariste, peut également être capable du pire, puisque, sans toutefois parvenir à égaler un didier wampas, il nous donnera quelques frissons quand sa voix prendra quelques libertés avec la justesse. au final, un set vraiment très bon : bien plus qu’une simple mise en bouche, un vrai coup de cœur pour un groupe qui était alors encore inconnu –à tort !- à nos oreilles.

philippe pascal / denez prigent

philippe pascal, qui leur succède sur la scène de l’ubu est lui très loin d’être un inconnu, puisqu’il est l’ancien chanteur des défunts marquis de sade. difficile pour quelqu’un qui découvre le personnage ce soir là d’en cerner complètement les contours, mais une chose est cependant sûre : le défi qu’il s’est fixé avec les musiciens du philippe pascal blue train choir de se replonger dans un blues primitif est lui atteint. peu de blabla, une grande place laissée à la musique, une présence sur scène forte : on comprend pourquoi ce monsieur a pu marqué l’histoire des trans et qu’il est encore présent pour cette 25ème édition. sur le court chemin qui nous emmène jusqu’au liberté, c’est la plongée dans un autre monde qui nous attend (voir le cr sur les béruriers noirs). lorsqu’on entre dans l’immense salle omnisports, c’est denez prigent qui commence son tour de chant a capella. un punk du premier rang, accoudé à l’avancée de la scène accompagne « physiquement » l’entrée en scène du breton : une version moderne du choc des cultures, certainement. le chanteur a assez largement intégré dans son spectacle les sons électroniques, proposant au public un spectacle qui ne laisse pas indifférent. on aime ou pas. nous rangeant parmi les seconds, nous ne nous étendrons pas sur le concert….

arno / béruriers noirs

ensuite, c’est au tour du belge arno de se jeter dans l’arène. assis sur le premier titre, il se relève péniblement pour la suite du concert, ce qui incite les mauvaises langues du public à parier sur le temps que passera le chanteur loin de sa chaise : désolé de vous décevoir les gens, mais c’est debout sur ces deux jambes que arno se livrera au public… la voix est rauque, la musique tantôt rock et blues, voire à la limite proche de la guinguette lorsqu’arno emprunte à adamo ces "filles du bord de mer". c’est bon et ca prend aux tripes. une déception : pas de "mother little helper", la reprise des stones qui figure sur son dernier album, arno charles ernest. vient ensuite « la » performance tant attendue. les bérus survivants (moins « renard », à la mémoire duquel un petit autel est dressé sur la partie arrière de la scène…) font leur entrée, et c’est tout le parterre du liberté qui s’enflamme. le son est assez proche de ce que l’on en connaissait, le public de tous les âges (certains n’étaient certainement pas nés lors des derniers concerts des groupes en 89, quelques uns plus âgés ont visiblement ressorti les vieux cuirs et grosses chaussures pour l’occasion, d’autres, enfin, ressembleraient plus à des « teuffeurs » de rave party qu’à des punks). le bon esprit domine, le service d’ordre (la « brigada ») qui opère sur le devant de la scène intraitable. tous les ingrédients pour une performance réussie, a priori.

stephan eicher

pourtant à notre goût cette reformation sent un peu trop la naphtaline, quelque chose bloque. difficile à expliquer. l’odeur du shit empêche certainement de retrouver celle de la madeleine qu’on avait encore dans l’esprit... un peu comme ce "liberté", nouveau morceau, fruit d’une résidence dans une ferme, « né dans la salle à manger et que l’on a joué comme dans la salle à manger… » expliquera le groupe le lendemain en conférence de presse. trop de dénonce « facile » (la pollution, c’est pas bien, l’altermondialisme, c’est bien…). alors bien sûr, c’est indispensable que certains fassent passer le message, mais des bérus, on attendait mieux. le set d’un peu plus d’une heure s’achèvera sur un "salut" version dub, ce qui ne sera sans doute pas plus mal pour faire retomber (un peu) la pression, tandis que derrière, le logo mcdo est détourné. vient le tour de stéphan eicher, après une très courte prise de parole de jean-louis brossard expliquant la tournure que prennent les évènements au dehors (voir par ailleurs), et appelant chacun à faire preuve d’ouverture d’esprit, en écoutant par exemple le suisse chantant. c’est pourtant devant une salle à moitié vidée par ses occupants que le chanteur livrera un concert a priori bien attrayant, avec sa voix si … particulière. nous n’en verrons cependant que très peu, difficile donc d’en dire plus.

métal urbain / minimal compact

sur la scène du liberté-haut, pendant ce temps, le passé a continué à ressurgir, avec, respectivement, les concerts de métal urbain et de minimal compact. bien sûr, les premiers sont cultes, et difficile de leur reprocher de sombrer dans la facilité. mais les années 80 commencent à nous énerver pour ce soir. quant aux seconds, les bruits qui nous en parviennent depuis le balcon du liberté laissent penser que leur set aura été assez magistral, emmenés par l’excellent samy birnbach devenu dj morpheus. il est déjà tôt, et bauchklang, les autrichiens qui sont alors sur la scène du bas ne parviendront pas à nous maintenir en éveil pour attendre le concert de danyel waro, hélas.

pauline croze

pour cause de sommeil en retard, de cours où il faut bien aller malgré tout, et enfin de conférence de presse bérurière, ce n’est qu’avec pauline croze remplaçant à la dernière minute à la salle de la cité une dani siciliano s’étant fait porter pâle que commenceront les concerts de la programmation officielle ce jour là. pauline croze est intimidée, c’est évident. jean-louis brossard a beau tenté de la rassurer comme il le peut la jeune chanteuse de 24 ans, on sent bien qu’elle est morte de peur. pourtant, elle n’avait vraiment aucune raison de se sentir si intimidée. elle chante seule, en s’accompagnant à la guitare d’une voix quasi-indescriptible, aux antipodes tant des « chanteuses » à voix que d’une carla bruni et sa (non) voix. son auto-accompagnement à la guitare met en valeur des paroles à la frontière de tous les genres, mais généralement très personnels. où la preuve qu’une chanteuse et une guitare, ca peut être autre chose que profondément chiant et/ou niais. en rappel, la jeune chanteuse s’en sortira très bien d’une reprise de "la javanaise" pourtant particulièrement casse-gueule et risquée (la chanson originale, pas –seulement- la reprise.)

cibelle / the thrills / !!!

seulement le temps de voir deux titres de la très jolie brésilienne cibelle, plutôt plaisant, mais bien trop court pour se forger un avis sur la musique de cette dernière, puisqu’il faut filer au liberté, voir the thrills. ils’en sortent plutôt bien, malgré le « the » pouvant laisser craindre le pire… c’est mélodique, plutôt bien construit, ça donne une impression de chaleur et de soleil… mais difficile de parler d’une originalité transcendante pour autant, plutôt d’un lien entre beach boys et strokes. ensuite, c’est le tour des  !!! (il paraît que ça se prononce chick chick chick…). là, on est déjà plus dépaysés : la section rythmique est vraiment très impressionnante, le son entre punk et funk, et l’envie de remuer immédiate. de là à en faire un « coup de cœur », comme brossard confie l’avoir eu, il y a une marge, mais indiscutablement, un gros potentiel, une démarche atypique réussie, et un public conquis. vient le tour de la surprise. non, pas celle de l’invité surprise, dont désormais tout le monde connaît le monde (beth gibbons vs le peuple de l’herbe), et qui jouera un peu plus tard. quand on parle de suprise aux trans, on ne sait pas trop à quoi s’attendre, là, jean louis brossard avait, paraît-il, lâché l’info la veille sur l’antenne du mouv’, délocalisée à rennes pour trois jours, et elle était également annoncée dans le ouest-france du jour, visiblement mieux renseigné que nous qui ne l’apprendrons que quelques heures avant…

ben harper / gangstarr / mu

ben harper, qui avait joué sur la scène de la cité lors des trans de 93, est venu posé sa chaise devant un public qui s’attendait à voir débarquer gangstarr. devant la scène, les fans du groupe de rap us sont interloqués, et pour certains, c’est la soupe à la grimace, à tel point qu’ils réclameront gangstarr à plusieurs reprises pendant le concert de ben harper … de même, on ne compte pas les appels médusés de certains pour lancer des « devine devant qui je suis en ce moment ? » pendant les morceaux. pas vraiment fan de ben harper sur disque, il faut quand même bien reconnaître que le garçon impressionne, seul, avec ses guitares, posé sur une chaise. quatre (ou cinq ?) titres, comme une parenthèse enchantée et enchanteuse. malgré l’impersonnalité du « frigo » qu’est l’immense scène du liberté bas, le contact passe très bien avec un public médusé. pendant que gangstarr prend la relève et fait chavirer les fans du genre (dont nous ne sommes résolument pas), en haut, c’est mu qui est aux platines, pour un set pouvant se rapprocher du foutage de gueule, il faut bien l’avouer, et dont on s’échappera bien vite. après la passage de gangstarr, place au fameux « invité surprise » du liberté bas.

peuple de l’herbe vs beth gibbons / keziah jones

on parlait d’invités « fumeux », c’est plutôt l’invitée les accompagnant qui devrait être qualifiée de la sorte, puisque c’est clope à la main que beth gibbons rejoint le peuple de l’herbe, après un titre de ces derniers, seuls. ce sont "dummy" et "glory box" qui vont successivement être joués… c’est très proche de la ligne originale de portishead (mais est-ce que ce n’est pas aussi pour beaucoup la voix de beth gibbons qui procure cette impression ?), tout en étant forcément différent. le groupe a intégré notamment sa trompette habituelle, et n’hésitera pas à partir dans un break assez phénoménal sur "glory box". le public du liberté remue sur du portishead, aussi incroyable que cela puisse paraître… à l’origine, jean-louis brossard aurait demandé à portishead de venir jouer, mais devant le refus du groupe tandis que beth gibbons avait donné son accord, c’est donc cet « accompagnement-arrangement-remix » qui a vu le jour. pour notre plus grand bonheur. si si. suit un titre du peuple de l’herbe seul, plaisant, mais sans plus. deuxième grande surprise de la soirée : keziah jones fait son entrée sur la scène du liberté bas. mais il est tôt (encore), et l’appel du sommeil ne résiste pas au jeu de guitare pourtant excellent de keziah jones.

caravan elektro / marmite / bic...

pour préparer le compte-rendu que je dois faire pour un journal local du nord (nord littoral, no promo, bien entendu) –bin voui, des fois, il faut bien bosser…-, je me rends à l’espace qui a été prêté à une association financée par le conseil régional du nord-pas-de-calais à « la maison du champ de mars », à 50 mètres du village pro (comme par hasard…). la veille, on y avait aperçu la caravane elektro, synthèse plutôt réussie entre musique électro et tsigane, une des énièmes déclinaisons des activités de l’excellente compagnie du tire-laine lilloise. cette après-midi, c’est de la chanson française du nord (les mauvaises langues, lulu et jef kino) qui prend le relais. pas déplaisant du tout, mais plutôt décalé par rapport au reste de la programmation (et au cargo, en général…). reste que l’initiative est suffisamment rare pour être soulignée, et puis le nordiste d’origine que je suis a particulièrement apprécié l’après-midi passée en compagnie d’autres nordistes. mention spéciale aux bénévoles de la marmite et de la brigade d’intervention culturelle, la « bic », qui ont fait un boulot remarquable pour permettre la concrétisation de cette opération … et qui le soir venu ont montré au bar que les nordistes sont définitivement les meilleurs buveurs de bière nationaux du monde…

deportivo

petit détour par l’ubu, le temps de voir deportivo, un groupe de petit branleurs parisiens. un trio guitare/basse/batterie assez poussif, des titres courts, une voix trop proche de celle de gaétan roussel de louise attaque pour être honnête. on avait entendu d’eux jusqu’à présent le single "la salade" qui avait pourtant laissé un souvenir pas trop désagréable. sur scène, la crétinerie de ces adolescents pourtant signés sur l’habituellement très bon village vert atteint des sommets : la voix du chanteur s’énerve et énerve, quant à leur sortie de scène, elle sera tout bonnement ridicule. a l’aide de sa guitare, le chanteur percera la grosse caisse de la batterie, balancera ces micros par terre, tandis que les éléments de la batterie voleront d’un bout à l’autre de la scène. ridicule, tout simplement.

the legendary tiger man / sebastien tellier

la suite des réjouissances se déroule à la cité, avec le concert de the legendary tiger man. paulo furtado, portugais d’origine joue seul un rock très efficace. pas de superflu (les rythmiques sont forcément épurées à l’extrême, puisqu’il n’a que deux pieds libre pour assurer une ligne cohérente…), l’homme tigre va droit au but. qu’il attend sans problème, montrant qu’à lui seul, effectivement, il mérite largement ce « the ». derrière lui, un écran diffuse une partie de poker que se disputent deux filles nues, ce qui ne fait que rajouter à l’ambiance particulièrement …. libidineuse des chansons : les paroles y évoquent quasiment uniquement les thèmes en rapport avec le « sex » dit-il entre deux morceaux. vient un autre moment particulièrement attendu, à savoir le set de sébastien tellier. la presse a gentiment organisé un buzz autour de ce disque (voir l’opération sur lesinrocks.com, ou bien encore la double (triple ?) page qui lui est consacrée dans le technikart du mois). mais c’est bien uniquement d’un buzz dont il s’agit tant le contenu du concert est pauvre. sébastien tellier est aux claviers et au chant, rob autour d’un autre clavier, tony hallen aux percussions, le tout complété par un bassiste. partout en ville avaient poussées des affiches « votez pour sébastien tellier le 6 décembre », tandis qu’à l’entrée (mais uniquement celle des « badgés », dingue, non ?) étaient distribués des flyers en forme de tract électoral, expliquant la promo autour de la sortie de l’album.

sebastien tellier

après une entrée plutôt ridicule (sébastien tellier glissant sur les genoux jusqu’au devant de la scène, et qui ne se prend résolument pas pour n’importe qui…), quelques titres commencent à s’enchaîner. pas grand-chose qui permettrait de comprendre pourquoi ce concert devrait être un « meeting » : tellier -au look visiblement très travaillé, santiags rouges…etc…- se fait casser une bouteille en verre sur la tête, avant de renvoyer la pareille sur son bassiste (mais quel est donc le sens de ce verre cassé ? le mystère reste entier…) , et c’est à peine si sébastien tellier desserrera les dents, hormis pour demander que « tous les pierre de la salle lèvent la main »… puis un spectateur le prend à parti : « dis sébastien… » … « oui ? » …. « t’es pas vraiment à l’aise avec la scène, hein ? »…. pas de réelle réaction, un « pédé » en guise de réponse, et un doigt tendu sur la chanson suivante au moment où tellier est supposé faire la preuve de sa plus grande virtuosité, certainement. comme dernier morceau, tellier et ses accompagnateurs se lanceront dans "broadway", seul titre qui n’était pas inconnu puisqu’il figurait sur une compile des inrocks (tiens tiens, encore eux…) au moment de la rentrée, mais qui est jouée sans un seul changement par rapport à la version disque. enfin, un pseudo début de rappel, avec tellier seul à la guitare, qui chante un truc horriblement faux avant de retourner en coulisses au bout de 20 secondes. visiblement, c’est un concert écourté qui a eu lieu, même si je n’ai pas pu récupéré la set-list, je serais quand même bien étonné qu’un set d’une seule petite demie-heure environ ait été prévu.

cody chesnutt

après ce moment plutôt ridicule, entre en scène cody chesnutt. avant même de connaître quoique ce soit de la musique de ce garçon, on l’apprécie déjà énormément : il a en effet demandé à ce que le concert se déroule dans une salle sans fumée de clopes, asthmatique qu’il est. et c’est drôlement agréable un concert sans tabac, même pour le fumeur que je suis. immédiatement après son entrée en scène, cody plonge dans l’espace des photographes et salue un à un tout le public qui se trouve dans les deux premiers rangs de la cité. pendant ce temps, son batteur, au physique de skateur californien, commence (déjà) ses pitreries. on ne sait toujours pas de quoi il retourne avec la musique du groupe, mais il dégage quelque chose « d’entier ». a l’amorce de son premier morceau, le rapprochement se fait immédiatement avec ben harper, d’autant plus qu’on l’a aperçu la veille pour quelques titres. d’autant plus qu’entre les morceaux, cody se lance dans de longs développements, sur dieu, sur « la pression » empêchant l’homme de se réaliser (si j’ai bien tout compris). il se passe manifestement quelque chose avec la salle, et à vrai dire, on pourra bien dire que la ressemblance est trop forte avec ben harper pour être vrai, qu’importe, nous aussi on décolle avec le son de ce guitariste visiblement surdoué. « une perle rare de la scène américaine » nous annonçait le programme des trans. assurément, et bien plus encore. un son assez incroyable, aux frontières du rock version sixties, du blues, des dialogues entre instruments qui s’inscrivent assurément dans une démarche découlant du jazz… du calme, du plus agité, mais toujours du très bon.

bilan

du coup, plus aucune envie de voir melissa auf der maur, on préfère achever ses trans sur la très belle surprise qui vient de nous être offerte. du côté bilan, l’atm ne cachait pas sa bonne santé, samedi après-midi : « on avait besoin de faire 25 000 entrées pour atteindre l’équilibre financier. là, on en est déjà à 27 000. c’est tout bon, et on ne le cache pas ». du côté chiffres toujours, béatrice macé relevait le record des 687 accréditations pour les media, ainsi que plus de 1 000 pass « pro » vendus. d’où parfois l’impression de ne croiser qu’un public « badgé » dans les concerts, et la salutaire remarque de françois béru (voir l’interview). pour autant, comment ne pas être à 200% d’accord quand les deux directeurs expliquent d’une seule voix que le festival est bien « le lieu de résistance par rapport à une certaine dérive qui consiste à faire de la musique un produit de marketing… » l’année prochaine, un défi de taille attend l’équipe de l’atm. la salle du liberté, et l’esplanade la jouxtant seront en effet en travaux, rendant impossible l’habituelle implantation d’un village, et réduisant de moitié la jauge du liberté : un déménagement s’imposera. gageons pourtant qu’une fois encore nous y serons surpris et que ce challenge permettra au festival de continuer sa perpétuelle évolution.

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publié par le 07/12/03