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publié par Renaud de Foville le 23/10/00
u2 - man ray, paris - 19/10/2000
man ray, paris

intimes

les smashing pumpkins, bowie, les red hot chilli peppers à l’elysée montmartre, oasis au bataclan, les rolling stones à l’olympia, rem à rtl, beck à canal plus, les cure à la fnac (!) ou dernièrement radiohead au grand rex... tous ces groupes qui remplissent les plus grandes salles dans le monde, voire des stades pour certains, sont venus ces dernières années à paris, pour des concerts « intimes », dans des salles à taille humaine. cela ne garantit en rien la réussite du concert - le mauvais concert des radiohead, pourtant l’un des plus attendus, en est la meilleure preuve. mais quoi qu’il arrive cela crée l’événement ! parmi ces megas groupes, u2 semblait intouchable, tout le monde se disait que si on les voyait à bercy ou, avec énormément de chance, au zénith c’était déjà un effort sur-humain pour bono et sa bande... surtout pour bono que l’on voyait de moins en moins capable de se produire devant moins de 50000 personnes ! et pourtant, quelques jours avant la sortie du (seul) plus mauvais album du groupe - all that you leave behind - u2 était encore une fois là où on les attendait plus. a quelques mètres des champs elysées, dans un des restaurants les plus branchés de la capitale, le man ray, se pressaient les fans les plus acharnés du groupe et une brochette impressionnante de vip, aimant le groupe pour certains, aimant se faire voir là où il faut être vu pour d’autres (au hasard zazie, obispo, pagny, j.m jarre, naomi campbell, guillaume durand, les smashing pumkings, castelbajac, balasko, karl zero, ophelie winter, les cherry frères et sœurs, les daft punk, guillaume fedou, david halliday, rachid taha, johnny depp, vanessa paradis et un nombre de mannequins ou de pseudo mannequins au mètre carré assez impressionnant). tout ce monde réunit pour une soit disant écoute dix jours avant la sortie du nouvel album de u2 - c’est ce que la maison de disque, island, à essayé de nous faire croire pour ne pas créer une émeute digne du tournage du clip de "where the streets have no name" à los angeles en 1987 - c’était un peu gros quand même.

deux francs cinquante

personne n’y croyait, surtout en voyant l’affolement total des équipes qui encadraient cette soirée et la tonne de matériel qui était installée au rez-de-chaussée de ce restaurant habituellement fréquenté par des branchouilles à deux francs cinquante ! mais comme prévu, pour 21h30, un animateur d’énergie nous annonce que l’on va écouter « la crème du sublime du best of du meilleur », enfin avec un vocabulaire normal - ce qui n’a pas l’air d’être la qualité première de la plupart des animateurs radio - le nouveau u2 ! plus sympa à écouter dans cette ambiance boite de nuit que chez soi, il reste d’une pauvreté absolument déconcertante pour ce groupe qui nous a offert quelques uns des plus grands albums de ces 20 dernières années, rien que ça ! cela ne fait rien, le public écoutant à peine les chansons est conquis d’avance, et de toutes façons, comme nous ne pense qu’à une chose, le concert, u2 sur une scène minuscule, devant quelques centaines de spectateurs, on écoute d’une oreille distraite ! la tension n’en fini plus de monter, au moindre vip qui passe, au moindre mouvement des roadies qui s’agitent et de l’incontournable joe, l’ingénieur du son de u2 depuis plus de 20 ans, le public de vrais fans - les super vip sont relégués dans les hauteurs du restaurant - se tend, et réagit au quart de tour.

différence

pendant le dernier morceau de l’album, "grace", l’un des seuls vraiment écoutable, la minuscule scène - comparé à celle du pop mart c’est assez délirant - s’ouvre sous nos yeux et tout le monde n’attend plus qu’une seule chose, vivre quelque chose d’unique pour tous ceux qui connaissent et aiment u2 : leur premier concert devant un public aussi réduit - au maximum 500 personnes - depuis 20 ans. et le concert, ces 50 minutes de u2 en club - je n’avais jamais pensé pouvoir réunir les deux mots dans une phrase aussi courte, aussi simple... qu’est ce que vous voulez en dire ? c’était unique, tout simplement. edge est un véritable ordinateur vivant au commande du groupe, adam clayton, est l’image type du bassiste cool et décontracté, tout autant que larry mullen jr est à l’image du batteur, effacé derrière sa batterie et sa simplicité... les trois musiciens de u2 sont d’une décontraction déconcertante. bono, par contre, n’en mène pas large sur cette scène sûrement plus petite que sa salle de bain, cette scène qui le met face à face avec un public concret et humain. pour bono plus le concert avance, plus il perd sa voix, ce qui arrive relativement souvent à ce leader « charismatique » du « plusgrandgroupederockdumonde »... la pression d’un concert hors norme l’aura rendu des plus humains, touchant de simplicité quand, par exemple, se plantant sur "ground beneath her feet" ou "beautiful day", le groupe reprendra les morceaux - à la différence d’un tom yorke, qui au grand rex nous a planté sur pas mal de morceaux sans jamais se dire qu’il pouvait les recommencer pour nous offrir une meilleure version...

aux sources

"elevation" passe bien mieux sur scène que sur all that you can leave behind, avec un final assez impressionnant, "new york" et "beautiful day" - deux des rares bons morceaux du prochain album - sont taillés pour la scène. seul "stuck in a moment", second single du groupe, reste quand même un peu tristounet... mais très vite u2 revient aux sources et nous offre quelques moments de grâce, d’émotion et de simplicité... un vrai concert rock, comme ils savent le faire en dehors des stades. si bono a bien du mal à se caler sur "mysterious ways" - pourtant chanté depuis 1992 un nombre de fois impressionnant - c’est très vite oublié avec le superbe "all i want is you" et une version acoustique et émouvante de "ground beneath her feet". ce morceau prend une ampleur et dégage une émotion qui n’étaient pas assez mis en évidence sur la version cd. ce soir, juste accompagné par the edge, la voix défaillante de bono nous touche et nous émeut... au fil des années on s’aperçoit que l’une des grandes qualités de ce groupe c’est tout simplement son intelligence, sa redoutable analyse de tout ce qui fait de u2 l’un des plus gros groupes du monde, et l’un des meilleurs.

15 ans

cela se voit, par exemple, dans le choix des quatre nouveaux morceaux qui ont ouvert ce mini concert, très certainement les futurs singles du prochain album et surtout ceux qui passent le mieux sur scène... mais aussi parce qu’ils savent très bien qui est le véritable public qui est venu les voir, ces acharnés prêts à tout pour vivre ce moment rare, même si le mot est assez creux : des fans - je ne parle pas des supers vip à la beatrice dalle qui sont venus parce qu’il y avait des caméras de tv - et donc u2 peut se permettre ce qu’ils n’osent pas, hélas, faire dans les grands stades, jouer leur morceau les plus forts en live, les plus émouvants et non pas les plus connus. "bad", pour ceux qui connaissent u2 et qui les suivent depuis longtemps, j’avoue faire partie de cette catégorie depuis 15 ans, est un des moments les plus intenses que l’on peut voir lors de leur concert, et quand l’alchimie est là, l’un des moments les plus intenses que vous pourrez voir en concert tout groupe confondu... même sans voix, même pour la promo, même devant un public de jet set et de vip sans intérêt, u2, et surtout bono, ne sait pas jouer ce morceau sans se donner complètement, sans le vivre avec une intensité communicative... et même si on peut se dire que reprendre quelques couplets de "ne me quitte pas" est un peu facile, bien qu’incroyablement émouvant, ce "bad" magique, intense et emporté restera gravé dans les mémoires de tout ceux qui ont eu la chance - merci laetitia - d’être là ce soir. alors oui c’est vrai on reste très déçu par le nouvel album, mais on continuera d’aller et d’aimer voir u2 sur scène, de suivre ce qu’ils font car a l’opposé d’un groupe comme radiohead - qui a sûrement réussi l’un des meilleurs albums de l’année tout en étant ratant leurs concerts - u2 sait faire naître l’émotion par leur attitude généreuse et simple. car à vrai dire tout cela n’est pas très important, c’est juste du rock, à peine de la musique...

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publié par le 23/10/00