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publié par Mickaël Adamadorassy le 24/10/23
MaMa Festival 2023 - Jour 1

Comme tous les ans, on retrouve le quartier de Pigalle et alentours pour le MaMa, qui transforme l’icônique quartier parisien en mini-village de la musique où quasiment tout le milieu de la musique se retrouve pendant trois jours pour des conférences et des showcases qui leur sont réservés la journée et des concerts le soir, ouvert à tous et généralement programmé avec un esprit défricheur qu’on apprécie beaucoup.

Et ce premier soir pour Le Cargo ! aura été exactement cela : six concerts enchainées de 19 heures à minuit avec exactement 0 groupe qu’on connaissait avant de venir. Pour le meilleur et parfois pour le "c’est pas toi, c’est moi".

Fernie

Pour Fernie, jeune montréalais de 25 ans, c’est plutôt la deuxième option : on est pas trop fan de soul/"R’n’B moderne" à la base et là les compositions comme le son, qui n’ont rien d’aventureux n’aident pas. La présence scénique du jeune homme même s’il se bouge n’est pas folle, la voix non plus. On décroche donc assez rapidement, le seul bon point pour nous est la présence d’un vrai groupe derrière le bonhomme, pas un DJ voir carrément juste une bande mais autour de nous, on sent qu’il a l’air de toucher une bonne partie du public. Donc... c’est pas toi, Fernie, c’est vraiment qu’on cherchait autre chose en ce premier soir de MaMa. Sans rancune ? Et puis par acquis de conscience en réécoutant quelques titres en rédigeant cet article, en studio, le résultat est plus convaincant même si l’originalité/le mélange des genres qui pourrait nous faire kiffer du R’n’B n’est pas là (mais existe t’il ?)

On s’éclipse sans trop de regrets après quatre titres de Fernie : comme dans tout festival, si vous voulez voir un maximume de groupe il faut malheureusement s’éclipse avant la fin de chaque concert qui dure de toute façon de 30 à 40 minutes seulement. La suite n’est pourtant pas très loin, la porte d’à côté ,littéralement, puisque qu’on passe de la Cigale à la Boule Noire pour Isia Marie. On ne connait pas non plus mais sur l’affiche elle a une guitare alors on présume que le niveau de rock’n’roll va sérieusement monter.

Isia Marie

Et guitare il y a, on aura même droit à un solo en tapping et d’une manière générale, la Telecaster d’Isia Marie n’est pas là que pour les photos promo, la six-cordes est largement à l’honneur avec une formation en trio clavier/basse - guitare - batterie. Dans une tenue noire moulante qui lui donne un petit air de Cat Woman, Isia Marie a une belle présence scénique : même si cette musicienne normande vient tout juste de boucler le crowdfunding de son premier album, elle peaufine son répertoire depuis dix ans et a déjà eu plusieurs groupes.

Par contre, malgré la guitare, on est plutôt dans une pop dansante, s’appuyant en majorité sur les claviers avec des textes français assez cash, parfois on ne rentre pas trop dedans ( "Montagnes Russes" et son "phonetel", on doit être trop vieux pour pas grimacer) parfois il y a un bon refrain et on se dit qu’il y a tout à fait une place sur la scène française pour quelqu’un qui place à la fois des solos de guitare et une boite à rythme trap sur des morceaux légers comme Vélo avec son très bon gimmick ou en plus émouvant, elle a une chanson qui s’appelle … "C’est pas toi, c’est moi". On aurait aimé qu’il y a chez Isia Marie un peu plus de piquant , qu’elle soit un peu plus rock et encore plus sans filtre, à la Mademoiselle K mais elle propose déjà quelque chose qui changerait un peu de ce qu’on entend d’habitude dans le mainstream.

On quitte la Boule Noire après une petite demi-heure de concert pour rejoindre le Backstage By The Mill, auquel on accède par une petite ruelle sur le côté du Moulin Rouge. Pour que le bruit ne dérange pas trop les voisins, on rentre par petits groupes via un "sas", quand on arrive enfin à l’intérieur, on comprend le but du procédé : le rock’o’meter passe direct dans le rouge, sur scène ça joue fort !

Dirty Shades

Avec ce quatuor, on découvre la scène rock angoumoisine, mais aussi le terme "angoumoisin", s’appliquant donc à ce qui vient d’Angoulême. Que l’on connaissait pour son festival de BD et son école du jeu vidéo. Et la (trop) longue pente entre les parties hautes et basses de la ville. Il faudra donc rajouter la scène rock si les autres représentantd ont les mêmes qualités que Dirty Shades, qui déroule de longs titres plein de détours inattendus, maitrisent aussi bien les arpèges alambiqués en son clair que le gros gros noise.

Pour ce concert au Backstage, le groupe propose un long set trippant qui évoque tour à tour le pysché, le noise, le math-rock dans ses plages instrumentales et le rock progressif voir le "post-emo" façon Mars Volta dans les bonnes parties chantées : et c’est peut être sur ce point que le groupe est encore un peu "vert" : le chant féminin qui est généralement convaincant sur leur EP live, ne nous a provoqué les mêmes émotions, n’avait pas la même charge sur ce concert et on voit plus les limites, quand il s’agit de pousser, et du choix des mélodies vocales. A tel point que c’est le chant du bassiste qu’on a préféré. Mais dans l’ensemble c’est le premier concert du jour qui se détache et si The Dirty Shades ne gagne pas sur le chant, ils se rattrapent sur l’énergie et sur la partie instrumentale.

Th Da Freak

Cela fait déjà plusieurs qu’on doit arbitrer un soir à trois ou quatres concerts parisiens en défaveur de découvrir Th Da Freak en live, alors c’était plutôt cool que cette soirée rock du MaMa permette d’enfin réparer cette injustice et de voir si ce nom qui revient régulièrement mérite qu’on s’y arrête. On va pas tenter le suspens et les longs rebondissements qui prendraient cinq paragraphes supplémentaire : Th Da Freak qui sur disque est principalement un Freak, Thoineau Palis et en live un quintet de Freaks est un groupe talentueux et attachant. Pour notre plus grand plaisir c’est clair et net que Thoineau a beaucoup écouté du grunge (et comme il n’est pas encore trentenaire, ça veut dire qu’il a connu Nirvana à l’âge où "certains" fredonnaient les chansons du Club Dorothée). Mais il n’y a pas que ça chez Th Da Freak, à mi-concert Thoineau lâche sa Jaguar (la guitare électrique préférée de Cobain avec la Mustang) pour une acoustique : pas de formule unique, d’influence chez Th Da Freak, mais une belle auberge espagnole et une bonne humeur scénique, un esprit très indie, un "cool indémodable" qui fait penser à Mac DeMarco ou à Beck. En interview, le monsieur cite les meilleurs albums de Mercury Rev, sur son cinquième album, Coyote (2022), on voit plus la filiation que sur ce live, mais toujours est-il que bonne humeur, bon gros rock et mélodies efficaces ont plus que suffi à notre bonheur

Marcel

Sur la programmation du MaMa, il y a marqué "Marcel (BE)", est-ce pour éviter la confusion avec "Marcel et son orchestre", est-ce pour souligner la "belgitude" comme un pedigree rock, on ne saurait le dire mais une chose est sûr : les cinq garçons qui investissent la petite scène du Backstage ont déjà un son et un jeu scénique qui n’ont rien de ceux de débutants : en fait on les aurait bien vu dans un gros festival ou sur une scène bien plus grande aux côtes de Ghinzu ou des Hollywood Porn Stars. Du rock fiévreux, avec un frontman qui donne de sa personne, des riffs efficaces, du gros son... mais il ne faut pas s’arrêter à cette image un peu stéréotypée, en écoutant les paroles, on s’aperçoit que les Marcel ne se prennent pas tant que cela au sérieux et plus le concert passe, plus leur performance devient déjantée et des éléments incongrus tels que le kazoo ou la flute à bec s’invitent dans les chansons et apportent une touche de folie supplémentaire plutôt bienvenue.

Tramhaus

C’est au quintet néerlandais Tramhaus que revient l’honneur de clôturer la soirée. On pourrait penser que ce serait une gageure de jouer aussi tard, devant un public déjà bien épuisé par une succession d’excellents groupes et qui commence à calculer l’heure de rentrer par rapport à son dernier métro.

Mais en quelques notes, oubliées toutes ces considérations. Tramhaus est un groupe avec un son, une atmosphère sombre, orageuse, explosif et captivant. On commencer à penser que DC Fontaine dominait de très haut une scène post-punk qui risquait de tourner à la carricature et en fait non : il y a encore des choes à dire ou à hurler, des dissonances à faire grincer, des fosses à faire suer et Tramhaus s’y applique avec classe et une bouteille qui fait qu’on a du mal à croire que ce groupe n’a même pas encore sorti un album mais juste un EP et quelques titres au compte-goutte. A côté du chanteur Lukas, frontman remuant, il faut avouer que c’est beaucoup la jazzmaster de Nadya van Osnabrugge qui nous a scotché par son jeu, comme le son qu’elle tire de l’instrument, même si bien sûr il y a aussi derrière l’appui d’une deuxième guitare très intéressante elle-aussi et d’une section rythmique discrète mais efficace.

Le concert est un peu court à notre goût même si on est obligés de se presser derrière pour retrouver le métro et ne pas louper notre correspondance mais c’est sûr et certain qu’on y reviendra, en live comme sur disque.

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