Cette année on a décidé qu’on vous a fait suffisamment d’articles sur le MaMa, que cet festival hybride entre convention pour les pros et bouillon de découvertes pour le grand public fait désormais partie des grands moments de la fin d’année des mélomanes parisiens et donc on ne va pas le décrire, surtout pas de manière furtive, en prétendant ne pas le faire. Enfin bref passons à l’essentiel, ce qui nous a plus ou pas pendant ces trois jours de festival.
Mercredi 16 octobre 2024
On commence à la Cigale en mode totale découverte : la française Billie est jeune, comme son public présent en masse, pas si courant pour le MaMa et une belle performance pour une artiste qui n’a pas encore sorti beaucoup de titres. Sur scène, Billie est accompagnée par Margaux (aka Vera Daisies ou la blonde des regrettées Ottis Coeur) à la guitare et Lou Maréchal (Bleu Reine, Junior) à la basse. Il y a une belle complicité et beaucoup de complicité entre ces trois là, Billie est plutôt attachante et à l’aise sur scène, la voix est pas mal etl es chansons en français entre pop et rock ont la pêche, très dans l’air du temps de ce qui se fait dans la jeune scène française. Malheureusement au fil des titres, on commence à sentir que sur les fondamentaux comme la maitrise de la voix c’est encore un peu "vert", un peu maladroit ou ça manque un peu de capacité à transmettre l’émotion et sur la fin si visuellement l’impression de puissance est là, on grince des dents sur la justesse. Google en rentrant nous apprendra que Billie est la fille de Matthieu Chedid, pas très pertinent au niveau musical mais ça vous aidera à trouver Billie sur Internet au milieu de tous les article sur Billie Eillish. Pour nous le verdict est mitigé mais on écoutera volontiers sur disque et à voir ce que ça donne avec un peu plus de bouteille.
On reste à la Cigale pour le groupe qu’on attend aujourd’hui les belges de The Haunted Youth, découverts en live vidéo sur youtube, le genre de choses qu’on s’arrête rarement pour regarder en entier tant le medium incite au butinage mais The Haunted Youth a le son, indie rock mélodique aux petits oignons, l’atmosphère dense, onirique et une voix lead qui captive. On les découvre sur scène ce soir et on est pas dessus : la musique est là, puissante et enveloppante comme on l’attendait, les accents mélancoliques marchent à fond avec un frontman à l’aise avec ce rôle, mais qui manque peut être encore un poil de charisme, d’intensité dans ce qu’il projette face au public... mais ce n’est pas grand chose, c’est beau, c’est rock, émouvant et on se régale. Maintenant il serait tant que le groupe sorte un album béton et tourne intensivement, il ne leur manque que ça pour accéder à un statut comme celui d’illustres prédécesseurs comme les Girls In Hawaii.
Pour la suite et fin de la soirée, on a choisi deux sons assez radicalement opposées mais qui jouent dans le même lieu : la grande scène de la Machine du Moulin Rouge pour les hard-rockeux de Furies et une petite scène dans les tréfonds du lieu pour Maya Kamaty et son mélange détonnant de rap, de rock et de musique réunionnaise. On regarde Furies avec toute la bienveillance d’une adolescence plongée dans le metal et de premières années de concerts parisiens plongées dans cette scène. Le groupe a les codes vestimentaires, musicaux, les attitudes, les soli d’une scène hard-rock /metal qui n’est plus vraiment ce qu’est le metal "moderne" et ça tombe bien on n’accroche plus vraiment à celui-ci. Et bien sûr tout le groupe joue très très bien, pas forcément très original pour le boulot des guitares mais très compétent et c’est fait avec des sourires et sans se prendre trop la tête non plus. Et ils ont une chanteuse qui a vraiment de la voix et une énergie contagieuse. Sans être fan de style musical, on passe donc un chouette moment avec eux.
Dans notre programme il était indiqué TTSSFU aux trois baudets, avant de commencer la soirée, on était très motivé pour faire l’aller-retour avant Maya Kamaty mais finalement petit coup de barre/ coup de flemme, on décide de rester sur place et de finir la soirée avec Maya. Petite déception : elle joue en solo avec un playback, plutôt qu’avec tout son groupe et on y perd l’énergie rock qu’il y a parfois dans leurs prestations par contre toute seule dans ce format, Maye se décarcasse autant que tout un groupe pour bouger, danser, chauffer le public et faire de ce live une communion typique de ce qu’on peut voir dans ces concerts et très vite, avec la complicité du public de l’artiste, en majorité réunionnais ou "adjacents", c’est toute la salle qui danse et chante en réponse à Maya, comme dans les Kabars de la Réunion. De quoi faire monter la température à "tropical" dans le sous-sol de la Machine.
jeudi 17 octobre 2024
On commence à la Cigale avec Natascha Rogers, on ne connait pas du tout son répertoire, la qualité du jeu et la présence de l’artiste fait qu’on restera tout le set en passant un bon moment mais on accroche pas plus que ça, plus une histoire de style qu’un problème dans la prestation de l’artiste. Idem pour Nerlov, mais là c’est peut être un début de lassitude par rapport à ce type de pop "du quotidien" plaintive et chantée comme tu parles à tes potes, avec un instru électronique basique derrière.... Mais sur quelques titres, cette même formule à notre corps défendant fonctionne bien et parfois on frôle le Indochine et ouille. Au final on ne sait pas trop, on réessaiera sur disque.
On file ensuite aux Trois Baudets où le tourneur Premier Jour organise sa soirée et avec Elias Dris et Troy Von Balthazar, c’était sûr qu’on serait là, mais prenons cette occasion pour les remercier de permettre à des artistes talentueux et originaux de tourner en France dans des bonnes conditions.
Elias Dris est assez rare sur scène et c’est dommage car même s’il a l’air toujours un peu stressé entre les morceaux, c’est un exercice dans lequel il excelle avec de supers musiciens à ses côtés : Swanny Elzingre à la batterie (Juniore) dont la frappe se marie très bien à la folk sensible d’Elias et le très bon guitariste Théo Cormier . Le concert déroule un répertoire plutôt familier, le dernier album d’Elias commence à dater mais on ne vas pas se plaindre de réentendre en live toutes ses pépites, avec un très bon son et un éclairage des Trois Baudets de qualité (et sans trop de fumée), on a même un nouveau morceau intitulé Los Angeles. C’est le premier concert du jour qui nous convainc à 100%. Loupe qui succède à Elias sur la scène des Trois Baudets est un groupe d’Amsterdam à majorité féminine et qui fait très très jeune, le guitariste lead, on lui donnerait pas plus de quatorze ans, la chanteuse 18 à peine. Mais peu importe, la musique elle est très en place et on sent tout de suite que leur pop-rock aux accents soul, au diapason du style de la chanteuse qui n’a peut être pas un coffre ou une technique extraordinaire mais le sens du groove est là. Idem pour la bassiste tandis que la guitare est plutôt sophistiquée, avec le son et les lignes qu’il faut pour soutenir l’ensemble sans être trop bavard. Cela fait beaucoup de maturité pour un groupe aussi jeune mais entre le charisme d’une chanteuse qui n’en fait pas trop et les sourires entre les musiciens, l’ambiance est plutôt chaleureuse sur scène. Voilà donc un groupe qu’on se dit qu’il vaut le coup de garder un oeil dessus et qu’on reverra avec plaisir.
Troy Von Balthazar mène depuis la fin de Chokebore une carrière solo exemplaire : chaque album amène quelque chose de différent, pousse l’exploration sonore dans de nouvelles directions et en même temps il y a quelque chose de fragile, sensible, une douleur qui confine parfois au désespoir, qui rend sa musique profondément émouvante. On l’a déjà vu de maintes fois en live, y compris dans la formule du MaMa, en duo avec le violoncelliste François-Pierre Fol, parfois tout seul à la guitare (la fameuse telecaster noir et vert fluo de Chokebore ou une acoustique), au piano, à lire un poème ou s’accompagnant d’un vieux radio-cassette et de percussions perché sur une chaise. Et ce soir au MaMa c’était toujours aussi fort, aussi original, c’est à la fois un concert, une performance et une expérience rare, puissante, qui résonne encore en vous après que la musique se soit tue.
vendredi 18 octobre 2024
Notre dernier jour de MaMa commence plus tard que d’habitude pour nous et on verra moins de groupes que prévu. Astral Bakers est un "super-groupe" composé de musiciens talentueux qui sont d’habitude les musiciens de scène d’autres artistes. Là c’est leur propre projet et la disposition scènique (tout le monde sur la même "rangée" avec la batterie sur le devant de la scène donc) semble indique qu’il n’y a pas vraiment de leader.... Et c’est un peu ce qu’on ressent alors même qu’en fait c’est plutôt faux : certes tout le monde chante un peu, Theodora un peu plus mais il y a quand même un membre du groupe qui chante plus que les autres et pour l’instant il manque un peu de présence, surtout un peu caché en fond de scène. Sur la musique pas grand chose à dire, ça joue très bien, on est ravis de voir la batteuse Zoe à l’honneur sur le devant de la scène, ils ont tous des bouilles sympathiques mais il nous aura manqué quelque chose qui tranche, qui aide à rendre singulier ce qui pour nous est sinon du rock indé/psyché assez classique.
On avait loupé Rori à Rock en Seine en se trompant de direction en prenant le tram et on nous en avait dit le plus grand bien, on était donc impatient de se rattraper au Mama. Et on est pas déçu : Rori a la pêche, elle a du charisme et du charme à revendre, une légère infusion de sensualité sans abuser dans sa petite robe noir, une énergie bien rock. Difficile de ne pas être captivé, de ne pas la suivre de droite à gauche puis de gauche à droite pendant qu’elle arpente la scène, en marchant, en courant, en dansant. La musique est un poils classique, un peu propre mais heureusement on n’avait pas en France, d’artistes de ce genre, pop avec un côté rock très affirmé comme Olivia Rodriguez et ça manque alors on apprécie d’autant plus la proposition de Rori.
Mais pour nous le concert du jour sera quand même celui de Bibi Club, aux Trois Baudets, si vous ne connaissez pas le nom peut paraitre étrange voir ne pas donner trop envie mais ne nous y arrêtez surtout pas, ce projet vaut vraiment le coup. On adore le groupe sur disque mais on n’avait pas eu l’occasion encore de les voir en concert et c’est donc une belle claque de se prendre l’énergie du groupe, la manière dont Nicolas Basque bataille avec sa guitare électrique et se tortille, le chant impeccable d’Adèle qui fait vivre ses chansons à la fois évidentes dans leurs mélodies pop et légèrement tordues, voir parfois carrément dynamitées dans les versions live de ce soir. Et là comme souvent on regrette d’être si bien assis aux Trois Baudets, une prestation comme ça aurait mérité un public debout qui se trémousse avec le groupe mais l’ambiance est quand même bien chaude et le groupe reçoit des acclamations bien mérités. Rah dire que les canadiens ont la chance des les avoir toute l’année, on croise les doigts pour qu’ils nous reviennent vite.