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publié par Mathilde Vohy le 29/10/19
Archimède - On vieillit et le métier se durcit

En décembre dernier, nous avions parlé avec Archimède de leur histoire et de leurs projets pour l’avenir. Nous avions eu à cette occasion le privilège d’annoncer la sortie de leur nouvel album : Pop Decennium, sorti le 30 août dernier. Après une dizaine d’écoutes et de jours, nous avions de nouveau rendez-vous avec les frères Boisnard dans un café parisien.

Pour commencer, pouvez-vous me parler du nouvel album ? Dire aux lecteurs de quoi il s’agit pour ceux qui ne l’auraient pas écouté ?

C’est un album anniversaire qui vient célébrer les 10 ans d’existence d’Archimède. Nous tournons depuis la sortie de notre premier album en juin 2009 et voulions célébrer cela. C’est également un album live dans lequel nous avons revisité 10 ans de chanson. Nous avons réorchestré et réarrangé 12 titres existants de notre répertoire et nous en avons ajouté 5 inédits. Ce n’est pas un best-of. C’est vraiment un nouvel album avec de nouvelles chansons et des anciennes revisitées. Bref, beaucoup de nouveautés !

Méhari est sorti il y a deux ans, en 2017. Est-ce que cela fait deux ans que vous travaillez sur ce nouvel album ou le projet s’est fait plus récemment ?

Cela fait environ douze mois que nous travaillons sur cet album. En réalité nous avons composé les chansons en début d’année dernière. Le livret et les visuels sont très léchés, un coffret a été créé, tout cela prend du temps. Une année de boulot !

Est-ce que cet album a demandé plus de travail que les précédents ?

Non, en réalité tous les albums mettent au moins 1 an et demi, voire plus le temps de composer. Cette fois-ci, on a mis un peu moins de temps pour écrire les chansons car il n’y en a que cinq qui sont inédites. Mais c’est du boulot quand même. En 10 ans on a sorti 5 albums, c’est un bon rythme !

Pensiez-vous depuis longtemps à faire un album anniversaire ou c’est une idée qui est venue sur le tard ?

C’est une idée qui est venue sur le tard et qu’on nous a soufflée. On voulait refaire un album classique ou un simple live du dernier album. Notre label nous a incités à faire quelque chose de plus original. C’est ce qu’on a fait. On a revisité tout notre répertoire en pop orchestrale, c’est beaucoup plus ambitieux. Cela ne concerne d’ailleur pas que les chansons, le projet tout entier est plus audacieux, il y a un coffret inédit, avec un artwork léché...

En parlant de réorchestration ; cela peut paraître simple de sortir un album où douze des chansons sont déjà écrites. Est-ce que ce n’est finalement pas plus difficile d’avoir un projet fini et retravailler tout ce qu’on a déjà fait précédemment ?

C’est vrai que quand on nous a proposé un quatuor à cordes, sur le coup, on s’est dit “cool on aura moins de boulot” ! (rires)

En réalité c’est un autre enjeu, un autre défi et, en somme, un exercice très différent. On avait toujours rêvé de réenregistrer nos chansons avec des cordes parce que la pop se prête bien à ça. Sur chaque album il y avait déjà des violons en studio. Ce qui diffère c’est que là nous les jouons en live. Ce qui change aussi c’est que nous avons vraiment donné les clés du camion à deux producteurs Christophe Darlot et Hubert Harel. On les connait très bien on savait qu’ils feraient du super boulot.

Vous aviez déjà travaillé avec eux ?

Oui, sur Méhari, et ça c’était hyper bien passé. Ils sont issus du conservatoire et ont une fibre théorique que nous n’avons pas. Ils savent ressentir la musique et écrire par exemple une partition de cordes. Quand on sait pas faire, on s’entoure de professionnels spécialistes. Moi, par exemple, je ne sais pas faire les pizzas, ben je vais chez le pizzaiolo ! C’est pareil avec la musique.

N’est-ce pas frustrant de déléguer la composition finale d’un album quand on a l’habitude de le faire soi-même ?

Non, du tout, nous étions très complémentaires. Christophe et Hubert ne savent pas forcément non plus écrire nos textes par exemple. On leur amène un patron et eux taillent un costume à la chanson. Évidemment on a notre idée et il faut que ce qu’ils nous proposent ressemble à Archimède.

Concernant la manière dont l’album a été accueilli par le public : quand on sait que le public apprécie déjà 12 des chansons, n’y a-t-il pas un peu moins de stress ?

C’est pas faux ! (rires) Le disque a été hyper bien accueilli. Les gens sont contents de réentendre de vieilles chansons comme « L’Eté Revient » qui a 10 ans et qui a pris une baffe dans cet album. Les titres sont bien réarrangés, ça crée un sentiment de nouveauté et les gens s’en sont réjouis. Ça fait super plaisir !

En réalité, le stress dans un album live c’est le traitement des voix. Nous sommes généralement assez sûrs de nous sur les compos et les textes. Bon, et du coup, là on a de la chance c’est tombé sur un concert où on chantait assez juste ! (rires)

Pour finir sur le réarrangement, comment s’est fait le choix des chansons qui figureraient dans l’album ?

On a été très mathématiques. C’est peut-être Archimède qui veut ça ! On voulait piocher équitablement dans nos 4 albums précédents. Au début on avait dit 2 chansons par album mais ça ne faisait que 8 chansons. On en a finalement pris 3 de chaque album. Ce sont globalement 12 chansons qui ont marché. Il en manque quand même plein quand on a écrit plus de 50 chansons c’est toujours difficile de choisir. Beaucoup de fans nous disent qu’on aurait par exemple dû mettre « On aura tout essayé » et « Le Grand Jour ».

Pour le prochain anniversaire !

Oui puis il faut mettre les choses dans leur contexte. « Le Grand Jour » a été enregistrée avec une multitude d’instruments en studio. Genre Les Choeurs de l’Armée Rouge ! (rires) Là, à 4 cordes, le morceau aurait sonné vide.

C’est vrai que, hormis l’aspect commercial de la chanson, il y a aussi la manière dont elle a été composée qui importe.

Oui, pour « Le Grand Jour » ça n’aurait eu aucun intérêt. « On aura tout essayé » c’est pareil. Sur l’album, elle a un côté un peu électro. Avec cette réorchestration, ça n’aurait pas forcément bien marché. C’est marrant on n’a pas non plus mis notre single « Je t’aime Low Cost ». Ces titres s’y prêtaient un peu moins quoi.

D’ailleurs, lorsqu’on écoute l’album d’une traite, nous avons le sentiment d’entendre un ensemble uniforme, y compris lors du passage des nouvelles chansons. Est-ce grâce à l’enregistrement live ?

C’est vrai que l’ensemble est assez homogène. Le live joue évidemment. Surtout que les conditions techniques étaient excellentes. On avait la dream team des musiciens !

En parlant de live, ce dernier a-t-il duré la durée habituelle d’un concert ou il y avait des prédispositions prises pour l’enregistrement ?

Non cela s’est déroulé exactement comme d’habitude ! Quelques interventions ont été coupées mais sinon on est vraiment dans la forme brute du concert. Rien n’a été retouché. Il n’y a pas eu de chanson recommencées ou autre. Ce n’était pas une émission de télé, c’était un vrai concert. Il y a eu en réalité deux concerts. Les 90% de l’album viennent du deuxième et quelques moments ont été ajoutés en provenance du premier. Pas de triche !

L’idée d’enregistrer en live est donc venue de la fusion de vos envies et de celles du label ?

Tous les gens qui nous suivent nous disaient que nous n’avions jamais sorti de live. On se disait donc que pour nos 10 ans on sortirait un live de la tournée Méhari avec de vieilles chansons. Puis notre label nous a proposé de créer quelque chose d’un peu plus original. Beaucoup d’idées ont fusé puis finalement les propositions du quatuor à cordes et du live ont fusionné pour donner le projet actuel. Nous avons ensuite décidé de délocaliser le studio et d’aller dans un château. C’était incroyable ! Cela correspondait à l’ADN du disque, c’était l’écrin idéal. Ce disque a une vraie ligne éditoriale, c’est un projet complet et cohérent. Cela se voit aussi grâce au coffret, on est sur un vrai produit qualitatif.

Le fait d’enregistrer en Mayenne et près de Laval était important pour vous ? Ou il s’agit seulement du fruit du hasard ?

Ce n’est pas le hasard mais ce n’est pas non plus parce que nous souhaitons toujours rester par chez nous. Il se trouve que la Mayenne est une terre de châteaux et que nous avions donc le nécessaire sous la main. On nous aurait dit il y a un super château à Nantes on serait allés à Nantes !

Cela nous a permis de faire un clin d’œil à nos origines et de vivre une belle histoire. C’est une dame de 80 ans qui nous a accueillis dans son château. Elle est venue au concert et a voulu à tout prix acheter sa place. Nous ne la connaissions pas auparavant, on a tout chamboulé dans sa maison et pourtant elle en garde un super souvenir. On est arrivés, on a bougé tous les meubles, on a joué, on a nettoyé les tapis et on est repartis ! Elle a même acheté le coffret !

Connaissait-elle vos chansons auparavant ?

Non même pas ! Elle a une vraie ouverture culturelle et intellectuelle. J’espère vieillir comme elle.

En parlant de ce coffret, qui est à l’origine de ce bel artwork ?

Une belle histoire d’amitié ! En 2017, un auteur nous a sollicités pour faire un concert BD. nous jouions sur scène pendant qu’il dessinait ce qui lui venait en tête en entendant nos chansons. Ses créations étaient projetées en direct pour les spectateurs présents. Ça avait super bien marché. Christopher, le dessinateur, est devenu un vrai pote. Comme il est également musicien, il m’a ensuite demandé de lui enregistrer ses maquettes. En remerciement de ce coup de main, il nous a dessinait une affiche à l’effigie d’Archimède. On a trouvé le résultat absolument génial et on lui a demandé d’imaginer la pochette de notre nouvel album.

Pour revenir aux différents titres de cet album, si je ne fais pas erreur c’est la première fois que vous avez des featurings sur un album ?

Oui c’est vrai ! On nous a pourtant souvent proposé. Sur chaque album on nous disait faudrait que vous fassiez un duo.

Et vous n’aviez pas envie ?

Nous n’avons jamais trouvé chaussure à notre pied. Si c’est juste pour avoir un nom ça ne nous intéresse pas. Nous souhaitons collaborer avec des mecs comme Greg Zlap qui apportent une plus-value incroyable à tous nos projets. En ce qui concerne Aldebert, c’est un vrai copain. Les feats de cet album ne sont pas du tout marketing et stratégiques, ce sont juste des potes !

Et êtes-vous satisfaits de ces duos ?

Oui c’est super d’avoir ses amis sur un album, d’autant plus sur un album d’anniversaire. Ils font partie des 10 ans d’aventure d’Archimède. Greg Zlap a par exemple enregistré notre deuxième album, le quatrième et il est encore là sur le cinquième, c’est génial ! C’est presque un musicien d’Archimède maintenant (rires). J’espère qu’il sera avec nous sur certaines dates.

Peut-être à Paris ?

Surprise, peut-être !

Dernière question un peu plus légère : quand on en est à son cinquième album, a-t-on une préférence pour l’un d’entre eux ?

Trafalgar peut-être, j’ai un peu la nostalgie de cet album. Il y avait un parti pris très rock. On avait une grosse actualité, on passait souvent en télé. Pour le troisième album nous avons changé de réalisateur et nous avons un peu perdu cette fibre et publicité. Les fans qui nous suivent depuis le début continuent d’acheter nos albums mais on a perdu quelques amateurs de rock. Les médias ont aussi beaucoup évolué depuis 2012. On vieillit et le métier se durcit.

Pour découvrir Pop Decennium en live

P.-S.

Un grand merci à Fred et Nico pour leur temps, leur bonne humeur et la bière !

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publié par le 29/10/19