Mai 2012 : nous avons rendez-vous à la Dynamo de Pantin pour une interview puis une session autour du projet Playing Carver dont nous savons encore peu de choses. Mais l’idée nous a séduits (un corpus de chansons inspirées par l’univers de l’écrivain Raymond Carver) et le collectif réunit des gens que l’on admire et apprécie de longue date, ainsi que d’autres dont nous avons plus récemment fait la connaissance : John Parish, Marta Collica, Gaspard LaNuit et les quatre membres d’Atlas Crocodile (Boris Boublil, Marion Grandjean, Jeff Hallam, Csaba Palotaï). Ils ont écrit les chansons à distance entre Berlin, Bristol et la région parisienne et disposent d’une semaine de résidence à la Dynamo pour préparer leur concert.
Au-delà de la simple curiosité que pouvait susciter le projet, on est très vite frappés par l’impression de cohésion et de complicité qui se dégage du collectif, dont certains membres ne s’étaient pas encore rencontrés en chair et en os : plus qu’une simple collaboration, on pressent qu’il s’agit d’une vraie rencontre sur un plan humain autant que musical. Puis, de fil en aiguille, on reste assister au filage après avoir filmé en session deux morceaux que l’on découvrait tout juste. Et là, quelque chose de très fort se produit, qu’on revivra le lendemain lors du concert lui-même. Ce projet qui s’est construit discrètement, loin de tout battage médiatique, se révèlera être pour nous l’une des grandes surprises de l’année. Une belle et riche aventure musicale qui brasse des voix diverses mais complémentaires, où les instrumentaux et mises en musique de textes de Carver côtoient des chansons en anglais ou en italien. Chacun y joue un rôle central, chacun est tour à tour auteur, interprète ou musicien, chacun prête sa couleur particulière à une palette qui se révèle bien plus riche que la simple somme des éléments qui la composent. Une véritable alchimie est à l’œuvre. On quitte la Dynamo avec un pincement, ne sachant pas très bien si ce splendide projet connaîtra un jour une suite.
Juin 2013 : le projet a suivi son cours. Le collectif se retrouve en région parisienne dans le studio de l’ingé son Benoît Gilg pour l’enregistrement d’un album et nous invite cordialement à y passer quelques heures pour prendre photos et vidéos. Une maison tranquille en pleine campagne, une ambiance chaleureuse et studieuse à la fois. Pas moins de trois morceaux seront enregistrés le jour de notre passage, entrecoupés de pauses piscine ou pétanque pour se détendre avant de mieux reprendre le travail. C’est avec une certaine émotion qu’on retrouve ces morceaux jamais réentendus depuis le concert de la Dynamo mais qui nous étaient restés en tête. Et là encore, tandis qu’on se fait tout petits pour ne pas perturber l’enregistrement, on est impressionnés par l’évidence et l’intensité des chansons, la complémentarité des membres du groupe. Savoir qu’on redécouvrira bientôt ces morceaux sur album est déjà un plaisir ; partager ce moment avec eux et capturer sur carte mémoire ces instants de création et de complicité le rend encore plus grand. On a le sentiment d’avoir reçu un très joli cadeau.
Septembre 2014 : l’album voit enfin le jour. Il s’appelle Leave the door open, a été mixé à Bristol par les soins de John Parish, et sa sortie (le 22 septembre) s’accompagnera de plusieurs dates à Paris et ailleurs. On espère cette fois que le projet sortira de l’ombre pour de bon. En attendant, on se réjouit déjà de cette sortie espérée depuis deux ans : il aurait été tellement dommage qu’il n’existe aucune trace enregistrée de ce magnifique projet.