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publié par benoît le 03/03/10
Titiyo - J'ai juste un peu d'oreille, un peu de feeling

Connue pour son hit international "Come Along", aussi (surtout ?) comme demi-soeur de Neneh Cherry, la suédoise Titiyo est passée de la soul de ses débuts - il y a déjà 20 ans - à un album de ballades pop, Hidden, qui sort le 23 mars en France. Elle sera en showcase à Paris (à l’International) ce jeudi 4 mars.

Stockholm, 2 mars 2010 : Titiyo donne rendez-vous dans un cosy café du centre où elle a ses habitudes. Elle arrive entre les flocons, en manteau léopard, avenante. Petite causerie spontanée au-dessus d’une mousse... de cappuccino.

Prête pour Paris ?

Oui ! J’espère qu’il fera un peu moins froid qu’ici... Je n’y ai pas joué souvent et je suis contente d’y retourner. Je trouve le public français assez curieux et ouvert, par rapport à la Suède où certes, on produit énormément de musique, mais où ce qui cartonne est encore et toujours le schlager, toute cette merde qu’on envoie à l’Eurovision... il y aussi pas mal de rock-indé-à-guitares assez chiant... mais aussi beaucoup d’excellents singer-songwriters. J’ai toujours serpenté entre les catégories, et avec Come Along, je voulais sortir du schéma rock traditionnel, utiliser ma voix soul-folk pour faire quelque chose de différent. Mélanger les genres. C’est mon truc.

En Suède, il y a aussi Tingsek ou Jenny Wilson qui mélangent pop et soul.

Oui, absolument. D’ailleurs je joue avec Sara Wilson, bassiste et soeur de Jenny Wilson. Tingsek est un ami. On est déjà monté sur scène ensemble, mais on n’a jamais rien enregistré. Et puis j’ai un faible pour Ane Brun. Je l’ai rencontrée il y a quelques années, on était invitées toutes les deux à chanter avec Club Killers, un groupe de ska avec des milliers de cuivres. Je ne m’attendais pas à la trouver là !

Elle peut tout chanter, apparemment...

Ouais, elle est incroyable. Je l’adore. Je voudrais travailler avec elle. On en a parlé, déjà. Elle sera ma prochaine victime !

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photo © emma jonsson

Tu travailles toujours avec la même équipe ou tu changes à chaque projet ?

J’aime bien changer... en fait j’ai pas mal évolué depuis la soul de mes débuts. Je crois que si j’avais continué, ce serait devenu vraiment ennuyeux à écouter, et je m’ennuirais moi-même. Pour Come Along en 2001, j’ai travaillé avec Peter Svensson des Cardigans. Mais c’est moi qui ai trouvé la ligne de basse !

Tu joues de quels instruments ?

Hm... je n’aime pas trop la réponse à cette question, parce que c’est : "aucun". Comme je viens d’une famille de musiciens, je pensais que ce serait inné, mais non ! Mon père a bien essayé de m’apprendre la batterie, mais je préférais aller faire du skateboard ou draguer les mecs. A l’adolescence, je me suis mise à écouter beaucoup les Clash, et j’ai pris des cours de basse. Mais je n’étais pas très assidue non plus alors j’ai vite arrêté mais je le regrette. Je crois que j’aurais pu devenir une bonne bassiste. Mais c’est beaucoup de travail. Alors je me suis contentée de chanter, ça au moins, c’était en moi !

Donc le chant ne t’a pas demandé beaucoup de travail ?

J’ai commencé à faire des choeurs dans le groupe de mon père quand j’avais 18 ans. ça m’a ouvert plein d’opportunités, je suis devenue choriste pour beaucoup de groupes. Alors j’ai pris des cours de chant, des cours classiques, on faisait des gammes, des exercices de respiration... Et c’était aussi un peu un rêve, de chanter du classique. J’adore l’opéra. Malgré tout, j’ai arrêté les cours par manque de temps, j’étais très demandée comme choriste. Ma prof m’a dit qu’elle allait me regretter, que j’avais du potentiel... même quand j’ai commencé à fumer !

Comment tu t’es mise à composer ?

Quand on écoute ma musique, ça évoque pas mal la vague "trip-hop" du début des années 90. J’aime bien les choses un peu hypnotiques comme ça, qui s’appuient sur un accord. Et c’est aussi parce que je ne suis pas très douée pour changer d’accord !

Ayant appris la basse, tu joues un peu de guitare ?

Pas du tout. Ou alors juste deux notes, comme ça, dans une réverb, je joue avec le son... et puis je change les réglages sur l’ampli, j’essaye autre chose. Je fais du "collage", en quelque sorte.

C’est le son qui t’inspire, en fait.

Oui, je crois. Et il y a toujours une mélodie qui finit par sortir. Quand je dis que je ne sais pas jouer, les gens ne me croient pas. mais en fait j’ai juste un peu d’oreille, un peu de feeling. Dans mes chansons, il n’y a pas beaucoup de refrains forts. Sauf pour certains hits, comme Longing for lullabies, mais elle a été écrite par Kleerup. C’est un excellent compositeur. Le plus souvent, je construis un squelette, j’apporte des idées. Et sur ce dernier album, j’ai vraiment mené toutes les opérations.

Comment ça se passe pour la transposition sur scène ?

C’est une question que je me suis posée, mais le nouveau groupe apporte une interprétation plus hypnotique, plus fiévreuse. Mon batteur est Andreas, de Wildbirds & Peacedrums, et les autres musiciens sont tout aussi doués avec leurs instruments respectifs. Du coup je commence à danser sur scène ! Jamais ça ne m’était arrivé auparavant. Mon père me le disait d’ailleurs, quand il assistait à mes concerts : « C’est bien mais tu devrais danser ». Mais franchement, Come Along, c’est impossible à danser ! Et pour danser sur la soul/r’n’b de mes débuts, il faut être sacrément douée. savoir se déhancher comme les stars du genre, c’est pas donné à tout le monde.

Tu amènes tout le groupe avec toi à Paris ?

Non, je serai juste avec ma bassiste. Et peut-être aussi mon ami Gordon Cyrrus, qui vit à Paris. Tu te souviens du groupe Whale ? Il était leur bassiste.

Oui ! J’avais cet album ! En 1995 ou quelque chose comme ça... y’avait pas Tricky dans le coup aussi ?

Si. Et leur manager était le petit ami de ma soeur Neneh.

OK, tout s’explique ! Et maintenant elle joue avec Cirkus [groupe de Cameron McVey]

Voilà. J’adore ce qu’ils font tous ensemble.

Tu as grandi avec Neneh ?

Pas vraiment. On ne se voyait qu’une ou deux fois par an, quand elle venait à Stockholm. Parce qu’elle a grandi entre la Scanie [sud de la Suède] et New-York, avec Don Cherry, mon beau-père. Mon père est Ahmadu Jah. et c’est aussi le père biologique de Neneh. Voilà pourquoi il y a confusion la plupart du temps. En 1979 on a fait notre premier voyage ensemble en Sierra-Leone, le pays d’origine de notre papa. C’est là qu’on a vraiment appris à se connaître, qu’on est devenues des soeurs. Ensuite j’ai passé pas mal de temps avec elle à Londres, où elle s’est installée en 1982. Elle est devenue ma plus grande influence. Quand je revois des photos ou des vidéos du début des années 90, c’est effrayant comme on se ressemble ! Les cheveux, les fringues... A cette époque elle cartonnait en Angleterre avec son album Raw Like Sushi et le tube Buffalo Stance, et c’est aussi à ce moment que mon premier album est sorti là-bas, alors la presse me présentait toujours comme "la petite soeur de Neneh Cherry". On était un peu Kylie et Danni Minogue ! C’est peut-être aussi parce qu’ils n’arrivaient pas à écrire mon nom correctement... En tout cas c’était vraiment cool, et il n’y a jamais eu de compétition entre Neneh et moi, c’était même tout le contraire. On se soutient et on se comprend totalement. Et en fait on ne parle pas tellement de musique ou de business ensemble... On fait surtout la cuisine et on boit du vin.

...avec Eagle-Eye aussi ?

Eagle-Eye est le demi-frère de Neneh. Je n’ai donc aucun lien de sang avec lui. Je le voyais tout au plus une fois par an quand j’étais gamine, mais maintenant il vit à Stockholm, depuis 10 ou 15 ans, et nous sommes comme des frères et soeurs. Mon père a eu huit enfants avec cinq femmes différentes, alors la famille est un peu compliquée ! Mais nous nous connaissons tous. Et tu sais, cette famille est en fait celle dont l’arbre généalogique est le plus complet au monde ! ça remonte jusqu’au XVIIème siècle sur la côte ouest de la Suède, d’où ma mère est originaire. J’ai découvert que j’avais des liens familiaux avec d’autres artistes suédois comme Thåström, ou le chanteur d’Eskobar.

> L’album Hidden sur Spotify

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publié par le 03/03/10