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publié par Mickaël Adamadorassy le 18/01/12
Terra Nova - Pilote
Pilote

Il y a un an ou deux, j’ai eu cette idée un peu saugrenue de regarder à nouveau Jurassic Park que je n’avais jamais revu depuis son passage au cinéma en 1993. Et je m’imaginais déjà en train de moquer des images de synthèse terriblement vieillottes comparées à ce qui se fait maintenant dans les studios de CGI (images générées par ordinateur) et puis bien sûr je m’attendais à être déçu de revoir avec des yeux plus adultes une des œuvres du violeur d’Indy.

Le dinosaure ça ne se démode pas

Et là grosse surprise, les coupes de cheveux, les vêtements ont vieilli mais les dinos sont toujours aussi classe, on est toujours sur les charbons ardents devant la scène du T-Rex et de la jeep ; en pestant tout ce qu’on peut contre cette gamine débile qu’ils auraient du laisser mourir en vertu du darwinisme (sauf qu’il y a besoin d’elle à la fin pour utiliser un système unix en 3D rigolo).

Dans la foulée, je me suis donc envoyé les deux suivants, pourtant pas inoubliables, sans même me demander si les images de synthèse seraient meilleures ou pas, finalement ça n’a aucune importance, ce qui fonctionne à chaque fois c’est de mettre de petits humains tous fragiles et tellement sûrs de maîtriser la situation qu’ils trouvent encore le moyen de se pourrir entre eux face à quelques tonnes de dino aux dents et aux griffes acérées et de regarder le résultat (vous aimez le steak haché ?).

Le dinosaure ça demande son poids en $$

Avec Terra-Nova, Spielberg se propose donc de réveiller à nouveau notre fascination pour ces grands reptiles disparus, ce regret latent de ne pas avoir été leurs contemporains (et leurs repas) mais cette fois-ci au format tv. Ça pourrait faire peur, même si les séries intègrent depuis un moment des images de synthèse de qualité, les rares apparitions de dinos au format tv en dehors des documentaires se sont avérées plutôt catastrophiques.

Heureusement l’avantage quand on s’appelle Spielberg c’est qu’on a les moyens de convaincre un network de s’engager dans ce genre d’aventure et payer le prix fort, à tel point que fait assez rare dans le business des séries aux Etats-Unis, la Fox a acheté directement toute une saison de la série, les coûts de production étant tellement élevés que la commande d’un simple pilote n’aurait pas eu de sens...

Et ça se sent, la production n’a pas grand chose à envier à celle d’un film qui aurait déjà un budget très honnête, il y a bien un ou deux plans un peu foirés, des incrustations sur des décors en image de synthèse qui se voient et qui sont moches, il y aussi a ce grand dino végétarien qu’on voit au tout début en plan large et en plein jour et dont a du mal à ne pas se dire "tiens un dino en CGI" mais dans le feu de l’action, quand on passe aux plans rapprochés et à un montage plus saccadé, on oublie complètement ce genre de considérations et on se retrouve scotché à son canapé en se disant que là la bande de jeunes benêts rebelles va finir par se faire massacrer par les slashers, de méchants dinosaures carnivores dont les deux caractéristiques remarquables sont la houppe sur le sommet de leur crâne et leur queue, qui a la désagréable capacité de pouvoir découper un humain en deux.

Les dinosaures ils sont morts alors on peut en inventer

Ah oui comme y avait apparemment pas assez de dinosaures réels pour les scénaristes, ils en ont créé de nouveaux, mais avant de vous indigner, sachez que d’après eux, ils "auraient pu exister". Ouf !

Bon on charrie mais en même temps on est content de pas se retaper le T-Rex et les raptors vus en long et en large dans les Jurassic Park.

Les dinosaures vivaient il y a 85 millions d’années

Mais bon reprenons un peu les choses dans l’ordre, c’est bien joli de confronter des dinosaures aux humains mais il faut bien une explication logique (euh scénaristique on va dire, la logique c’est un cran au dessus bien souvent), dans Jurassic Park, c’était de l’ADN de dinosaure bricolé avec celui de reptiles contemporains qui redonnait vie aux bestiaux disparus à notre époque. C’était encore à peu prêt scientifique, dans Terra-Nova, on y va franchement, pourquoi s’embêter à reconstituer des dinosaures quand on peut voyager à travers un portail temporel qui traînait par là et qui amène dans le passé ?

Et puis comme on est dans un futur surpeuplé et pollué où les riches vivent dans des dômes préservés tandis que les pauvres doivent se contenter de masques à l’efficacité relative, ceux-ci ont quand même de bonnes raisons de tout lâcher pour aller taquiner du dino et construire un monde meilleur.

Surtout que pour limiter la population, le gouvernement a interdit aux couples d’avoir plus de deux enfants et la série commence à donc avec le papa qui émerveille sa fillette avec une orange, le fiston l’épluche pour elle sous les yeux attendris de la maman et là l’autre fille arrive toute affolée en parlant d’une descente de police. Si vous avez compté jusqu’à trois, vous comprenez le problème...

Les dinosaures mangent aussi les enfants

Et c’est là que je dis “Ah non Steve !” : Tu nous emmerdes avec tes gamins. Déjà il y a un an tu nous faisais le coup de la scène pathétique d’enfants traumatisés par les méchants extraterrestres dans Falling Skies et ce coup-ci on a droit à un passage (théoriquement) révoltante où les méchants policiers enlèvent la petite toute mignonne à sa famille. Faut arrêter de prendre les spectateurs pour des cons et jouer la carte de l’empathie avec les pauvres ti nenfants. Ça ne marche plus, tu le fais à chaque fois, c’est une ficelle grossière qui dessert le propos plus qu’autre chose.

Enfin bref... le paternel se retrouve en prison où les pauvres détenus n’ont même pas droit aux masques filtrant l’air. Sachant qu’on est dans un monde surpeuplé et exsangue, chaque prisonnier doit coûter cher et en même temps on les laisse mourir à petit feu, très logique... mais bon il y a pas que les petits que le spectateur doit prendre en pitié...

Les dinosaures ne sont pas très malins

Petite ellipse de quelques années la mère qui est un médecin bardé de diplômes censée être très douée (mais dont le plan pour qu’on ne trouve pas sa fille lors d’une descente de police est de la cacher derrière une grille d’aération en plein milieu de la pièce, sans rien pour l’empêcher de parler ou de faire du bruit) reçoit une place pour rejoindre les colonisateurs de Terra Nova mais comme elle a été vilaine de ne pas respecter la loi, elle n’a pas le droit de prendre l’enfant du pêché avec elle.

Là on admire l’acharnement des scénaristes dans le pathos en dépit de toute logique : séparer les civils aussi brutalement de leur famille, y a rien de mieux pour garantir leur efficacité dans une petite communauté de colons déracinés dans un passé hostile.

Les dinosaures ne s’évadent pas de prison

Du coup la mère qui rappelons le est vraiment très intelligente, se dit qu’elle va faire évader son mari d’une prison sécurisée en lui refilant un laser minuscule et juste ça (son mari c’est un ancien flic un peu super héros sur les bords semble-t’il), elle va payer quelqu’un pour faire rentrer sa fille dans l’enceinte ultra-sécurisée (mais pas trop) du portail et le père va s’y introduire, récupérer sa fille de 4 ans dans un gros sac à dos et passer toutes les sécurités pour partir avec le reste de la famille dans le passé.

Là quand même les scénaristes ont eu pitié de nous et n’ont même pas essayé de rendre tout ça crédible, une ellipse bien pratique amène superpapa de la prison à sa fille jusqu’aux derniers mètres avant le portail qu’il passe en mettant K.O. deux ou trois gardes et en piquant un sprint. Nous sommes dans un monde où ce portail est la seule chance de retrouve une vie décente pour des millions de gens, on n’y accède que par loterie mais un homme sans arme le passe sans problème, y a que quelques gardes et ils ne tirent pas, même pas un coup de semonce en l’air...

A ce stade honnêtement je n’ai plus trop cherché la cohérence dans tout ça, s’il y a du plaisir à prendre dans cette série, ce sera dans le premier degré et en s’arrangeant de l’invraisemblable.

Les dinosaures ne complotent pas

Et paradoxalement la suite est finalement pas si inintéressante même si on a une impression de déjà vu à peu prêt tout le temps : le dur à cuire qui dirige la colonie avec un bureau en tête de dino, la bande de jeunes à la cool qui ne respectent pas les règles établies, le fils qui s’oppose au père, la fille qui est total geekette (ce qui est bien pratique pour expliquer les dinosaures et divers éléments de l’univers de la série), jusqu’aux habituels dissidents.

Et c’est là que ça devient un peu plus excitant, plus que l’heure passée sur la situation des jeunes idiots (dont le fils de superpapa qui a voulu faire sécession) ; ils fabriquent de l’alcool de contrebande dans une jungle remplie de dinosaures et sont attaqués par les fameux slashers évoqués plus hauts. Malheureusement la plupart survivront... (la plupart des jeunes idiots)

Pour en revenir aux dissidents ou « Sixers », ce sont des colons arrivés tous en même temps lors du sixième transfert migratoire par le portail. Mais la loterie désignant les colons a apparemment été truquée pour que ces mercenaires arrivent tous en même temps et en profitant d’armes camouflées, ils ont volé suffisamment de ressources à la colonie principale pour établir leur propre base et la défendre correctement, et en plus ils contrôlent l’accès à des ressources clés pour les colons.

L’homme est un dinosaure (carnivore) pour l’homme

L’origine et le but des Sixers est un mystère mais une chose est sûre, ils sont une grosse épine dans le pieds de nos colons, on sent bien avec ce pilote qu’il ne va pas être question de se la jouer ma petite maison dans la prairie préhistorique et que la menace la plus dangereuse vient des hommes et non pas des gros animaux à la cervelle limitée.

Et puis il y a ces dessins bizarres que les jeunes idiots découvrent dans la jungle, s’agit-ils d’extra-terrestres (remember Indy ?), de Dieu ou alors sont-ils vraiment dans le passé ?

Ce qui est chouette quand un scénariste renonce définitivement à la cohérence, c’est que à peu près tout peut se produire....

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publié par le 18/01/12
Informations

Sortie : 2011
Label : Fox