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publié par Mickaël Adamadorassy le 06/01/16
StaticObserver
- Rabbit's Run
Rabbit's Run

On est un peu intimidé quand il s’agit de parler de StaticObserver, à la fois parce que le projet est pointu et savant, à l’image de son géniteur, Jean-Baptiste Guignard, "docteur en sciences cognitives spécialisé dans la philosophie du langage et la linguistique" (cf cette interview sur Skriber) et en même temps la séduction opère dès les premières notes de l’album au niveau le plus instinctif. Dans la voix comme dans la musique, il y a des choses belles, des choses émouvantes.

Des atmosphère inquiétantes, cotonneuses, hypnotiques. Des fulgurances aériennes, du brouillard à couper au couteau. Des introductions théâtrales, de longs développements en cascade qui vous emportent loin et un peu dans toutes les directions, piochent dans des vocabulaires musicaux très différents. Du post-rock Sigur Ros-ien aux bidouillages et ambiances façon Portishead, des influences Bjorkiennes aux touches de contemporain. StaticObserver se permet même une reprise d’Elysian Fields classieuse : ce n’est pas facile de chanter à la place de Jennifer Charles, de faire vivre le morceau sans sa voix et sa présence si particulière et là ça fonctionne très bien.

C’est une constante chez StaticObserver, ce foisonnement, ce télescopage entre des univers a priori assez éloignés. De réussir à être très sophistiqué, expérimental mais sans tourner à l’électronica abstraite. Jean-Baptiste a su garder de la pop music suffisamment de cadres pour ne jamais perdre l’auditeur mais au contraire l’intriguer, renouveler sans cesse son intérêt, avec comme fil directeur la voix.

StaticObserver | Clank [Live] from Static Observer on Vimeo.

Ce qui nous amène au moment fatidique : c’est difficile d’évoquer Rabbit’s Run sans parler de Thom Yorke et Radiohead tant le vocabulaire et les ambiances de StaticObserver recoupent ceux des anglais, période Amnesiac/Hail to The Thief, c’est le même brouillard qui vous colle à la peau, c’est la même manière de placer la voix dans le haut de la tessiture, à fleur de peau. Mais plus vous explorerez ce nouvel univers, plus cette impression se dissipe, l’instrumentation n’est pas dépourvue de synthétiseurs et de sons triturés en tout genre mais le piano et les instruments acoustiques donnent quand même l’impression de diriger les débats. De même les rythmiques sont inventives, elle peuvent être sophistiquées, déconstruites, découpées, mais elles gardent un côté très organique, les sons utilisés ne sont pas les blips ou les glitches de l’électronica mais des sons de percussion "classiques" voir des sons "concrets".

On arrive à la conclusion et j’ai l’impression d’avoir à peine effleurer toute la richesse de ce disque, je savais de toute façon que je partais mal équipé pour en parler car ma connaissance de la musique contemporaine est très limitée, car l’électro c’est pas mon truc, Radiohead pour moi n’est déjà quasiment plus supportable sur Amnesiac, qui semble être un des disques de chevet de Jean-Baptiste mais pourtant il fallait que j’en parle parce que ce disque est tout simplement beau. Il n’y a rien de gratuit dans Rabbit’s Run, chaque morceau raconte quelque chose, rien n’ est arty pour être arty, c’est le petit miracle d’une musique savante qui arrive à vous chambouler à la fois le cœur et la tête.

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publié par le 06/01/16
Informations

Sortie : 2015
Label : Such Prod/Harmonia Mundi